Didier Reynders (MR)

L’avenir de Didier Reynders se joue aujourd’hui au Conseil de l’Europe

Le Vif

Le prochain secrétaire général du Conseil de l’Europe, la principale organisation de défense de la démocratie et des droits de l’Homme du continent, devrait être connu ce mercredi. L’assemblée parlementaire (APCE) de l’institution, basée à Strasbourg, doit départager les deux derniers candidats en lice: le vice-Premier ministre belge Didier Reynders et la ministre croate Marija Pejcinovic Buric.

M. Reynders, interrompant sa mission d’informateur royal pour quelques jours, a mis le cap dès lundi sur la ville alsacienne pour tenter de convaincre les 324 parlementaires de l’APCE (désignés par les parlements nationaux des 47 Etats membres) des atouts de sa candidature.

Ministre fédéral sans interruption depuis 1999, le libéral pourrait bien définitivement quitter la scène nationale s’il venait à être élu. Doté d’une rémunération annuelle avoisinant les 300.000 euros, le prochain secrétaire général disposera d’un mandat de cinq ans, renouvelable une fois.

Parmi les quatre prétendants initiaux à la succession du Norvégien Thorbjørn Jagland à ce poste, le comité des ministres du Conseil de l’Europe – qui rassemble les chefs de la diplomatie des Etats membres – avait sélectionné en mars dernier les deux candidats qu’il estimait les plus aptes à occuper la fonction. Lors de cet exercice, la candidature du Belge a été celle qui a obtenu le plus large assentiment.

Le dernier mot reviendra toutefois à l’APCE, dont les députés se prononceront mercredi à l’occasion d’un vote à bulletin secret.

Les dix-huit élus russes, qui viennent de retrouver leur droit de vote après en avoir été privé pendant cinq ans suite à l’annexion en 2014 de la Crimée ukrainienne, participeront à ce scrutin.

Si aucun candidat n’obtient la majorité absolue des suffrages exprimés lors du premier tour mercredi, un nouveau vote, nécessitant cette fois une majorité relative, sera organisé le lendemain.

Pour convaincre les parlementaires, M. Reynders a probablement mis en avant son expérience, que ce soit comme ministre des Finances ou comme chef de la diplomatie belge, mais également son engagement de longue date à l’échelon européen en faveur d’un mécanisme permanent de surveillance des droits de l’Homme et de l’Etat de droit.

Alors que la Conseil de l’Europe traverse une crise avec la Russie depuis 2014 et l’annexion de la Crimée, le Belge a probablement aussi souligné qu’il a conservé de bonnes relations avec Moscou ces dernières années, prônant infatigablement la doctrine Harmel associant la fermeté à l’égard du Kremlin à un maintien des canaux de dialogue.

L’envoi récent au Conseil de l’Europe par des chercheurs belges d’une missive, dans laquelle ils fustigent la politique menée par le gouvernement fédéral et M. Reynders concernant le rapatriement d’enfants belges de Syrie, pourrait potentiellement affecter à la marge sa candidature.

L’affaire de la famille ouïghoure qui a cherché refuge à l’ambassade de Belgique à Pékin et aurait ensuite été livrée à la police chinoise est aussi susceptible de coûter des voix au ministre belge.

Par ailleurs, si sa candidature paraît solide, celle de sa concurrente, l’actuelle ministre croate des Affaires étrangères, Marija Pejcinovic Buric, dispose aussi d’atouts. Sa bonne gestion de la présidence croate du Conseil, de mai à novembre 2018, pourrait jouer en sa faveur, tout comme le fait que le poste de secrétaire général n’ait été occupé qu’une seule fois par une femme, à savoir la Française Catherine Lalumière de 1989 à 1994.

Des observateurs avertis font toutefois remarquer que la fonction de commissaire aux droits de l’Homme, l’autre grand poste au Conseil de l’Europe, est pour l’instant assuré par une femme, la Bosnienne Dunja Mijatovic. Le pays d’origine de cette dernière étant limitrophe à celui de Mme Buric, certains députés, soucieux de maintenir un équilibre géographique dans les attributions de poste au sein de l’organisation, pourraient en tenir compte.

L’appartenance de Mme Buric au Parti populaire européen, principale famille politique au sein de l’APCE avec 159 sièges, pourrait également constituer un avantage, même si les votes au sein de l’assemblée respecte en général moins les logiques de groupe que dans d’autres hémicycles, à l’instar du Parlement européen.

Créé pour redonner vie aux droits de l’Homme sur un continent ravagé par la guerre, le Conseil de l’Europe a fêté ses 70 ans cette année. Cet anniversaire fut l’occasion de célébrer ses succès – au premier rang desquels la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH)- mais aussi les difficultés budgétaires et de fonctionnement qu’il traverse.

Le prochain secrétaire général du Conseil de l’Europe débutera son mandat le 1er octobre. S’il est désigné par l’APCE, M. Reynders continuera à assurer ses fonctions au sein du gouvernement fédéral en affaires courantes de Charles Michel jusqu’à cette date, à moins qu’un nouvel exécutif ne soit formé d’ici là.

Dans les prochains jours, il poursuivra en outre sa mission d’information, avec le socialiste flamand Johan Vande Lanotte, en vue de la mise sur pied d’un attelage fédéral. Les deux hommes sont attendus lundi au Palais pour faire rapport au Roi. Ce dernier pourrait décider de mettre un terme à leur mission, ou éventuellement de la prolonger une troisième fois.

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