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Jeudi noir en France contre la réforme des retraites

Le Vif

Loin du tumulte habituel, les halls des grandes gares françaises sonnaient creux jeudi, les bureaux, musées et écoles étaient déserts, et la tour Eiffel fermée : face à la grève massive pour s’opposer à la réforme des retraites, la France vivait un « jeudi noir ».

« Nous avons vu qu’il y avait une grève aux infos, mais ce qui nous marque, c’est toute la présence policière, on ne voit pas ça au Canada », s’étonne Lisa, une touriste canadienne qui a dû renoncer à visiter la tour Eiffel, monument payant le plus fréquenté à Paris et fermé au public.

Déception aussi pour des touristes venus de New York, qui ont trouvé portes closes à l’Arc de Triomphe, autre monument parisien incontournable et fermé à cause de la grève massive organisée pour protester contre la réforme des retraites voulue par le président Emmanuel Macron.

Au Louvre, musée le plus visité au monde, certaines salles sont exceptionnellement fermées. Sur l’esplanade du musée habituellement bondée, une dizaine de touristes se prennent en photo devant la pyramide.

Même calme atypique à la Gare Saint-Lazare de Paris, une des plus fréquentées d’Europe, où les « gilets rouges », ces agents d’informations de la SNCF -l’opérateur du rail en France-, semblent aussi nombreux que les voyageurs.

De nombreux Parisiens ont pris leur voiture, leur vélo ou opté pour du télétravail mais d’autres n’ont pas le choix. Comme José et Philippe, deux maçons qui attendent un train pour Sartrouville, au nord-ouest de Paris.

« C’est chiant! », s’exclament-ils en choeur. « Nous, on n’a pas de voiture et on ne peut pas poser de jour de congé… Les chantiers n’attendent pas », regrette Philippe, 24 ans.

Du côté de la gare du Nord qui dessert plusieurs destinations européennes, Nicole, une trentenaire, est inquiète: « je suis témoin au mariage de mon amie d’enfance à Cologne, demain après-midi, donc je n’ai évidemment pas pensé à annuler mon voyage mais ça génère beaucoup d’appréhension ».

Jeudi noir en France contre la réforme des retraites
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A la gare de Lille-Flandres (nord), Johanna, une lycéenne de 18 ans, attend patiemment sur un banc un train pour aller en cours. « La grève, c’est un peu perturbant pour tout le monde, ça met le chaos partout », regrette-t-elle.

Pas moins de 90% des trains à grande vitesse et 80% des trains régionaux étaient annulés jeudi, et 10 lignes du métro parisien fermées.

Et la grève, qui s’annonce longue, ne se limite pas aux transports publics.

– Amsterdam sur Seine –

A l’heure où sonnent les cloches des écoles, de nombreux établissements restent ainsi dépeuplés.

Le ministre de l’Éducation nationale reconnaît l’ampleur du mouvement. « On ne peut pas nier que c’est une assez forte mobilisation », déclare Jean-Michel Blanquer sur France 2.

Jour de congé, nounou, grands-parents, les parents d’élèves ont dû s’organiser. Comme à Saint-Genouph, petite ville à l’est de Tours (centre-ouest): « On ne peut pas assurer le service minimum. On ne reçoit que les primaires, car les deux instituteurs de maternelle font grève », explique une agent d’animation de l’école de la municipalité.

La grève a ranimé les « gilets jaunes », dont le mouvement de contestation contre la politique sociale de M. Macron, déjà vieux d’un an, s’essouffle de plus en plus. Ainsi, à Rouen (nord-ouest), sur le « rond-point des vaches », un des bastions du mouvement, entre 200 et 250 manifestants sont rapidement délogés par la police à coups de grenades lacrymogènes.

Jeudi noir en France contre la réforme des retraites
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Du côté de la justice, le Conseil national des barreaux a voté une journée « justice morte » pour les avocats dans toute la France.

A Paris, contrastant avec les métros et les trains quasiment vides, le trafic cycliste était plutôt dense. La piste cyclable de la berge qui longe la Seine prenait parfois des allures d’Amsterdam, avec plus de vélos que de voitures.

« Il y a du monde et les gens sont énervés à cause de la grève », lance un utilisateur régulier de Vélib’, les vélos en location à Paris.

La question de la durée du mouvement se pose désormais. « Aujourd’hui et demain, les gens se sont arrangés, mais je redoute beaucoup lundi… la galère va commencer », craint un agent de la SNCF.

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