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Eric Zemmour, polémiste sulfureux et bête médiatique

Le Vif

Bête médiatique, polémiste à succès, Eric Zemmour, condamné pour incitation à la haine, est passé en quelques années de la transgression frondeuse à un populisme violent.

Se disant gaulliste, le chroniqueur de 61 ans, de retour sur CNews à partir de lundi, a de tout temps aimé pourfendre le « politiquement correct », l’anti-racisme ou les « droits-de-l’hommistes ». Il a multiplié les provocations, surfant sur la montée de l’anti-islamisme et dénonçant un supposé déclin de la France.

Devenu une des bêtes noires des féministes, puis des associations anti-racistes et de défense des droits des homosexuels, cet orateur conserve ses fans parmi les téléspectateurs, les lecteurs et certains patrons de médias, qui lui gardent le micro ouvert, en dépit de deux condamnations pour provocation à la haine, raciale en 2011 puis religieuse en septembre 2019.

CNews, chaîne d’info appartenant à Vincent Bolloré où il fait son retour après en avoir été évincé en 2014 (quand elle s’appelait encore iTélé) pour avoir fustigé les musulmans dans un entretien au journal italien Corriere della Sera, assure qu’il ne s’agira pas d’une « tribune sans filtre » accordée au polémiste.

Passionné de politique, Eric Zemmour y aurait probablement fait carrière sans ses deux échecs au concours d’entrée de l’ENA. Il se rabat sur le journalisme, Philippe Tesson lui mettant le pied à l’étrier au service politique du Quotidien de Paris, avant qu’il ne passe au Figaro, à Marianne et Valeurs actuelles.

Origines modestes

A la télévision, iTélé le lance en 2003 dans l’émission « Ça se dispute » face à Christophe Barbier. Mais c’est sa participation à l’émission de Laurent Ruquier sur France 2, « On n’est pas couché », qui lui vaut sa première grande popularité entre 2006 et 2011.

L’auteur aime à rappeler ses origines modestes. Né en 1958 à Montreuil, il a grandi à Drancy, en banlieue parisienne. Il est le fils d’un préparateur en pharmacie devenu ambulancier et d’une mère au foyer. Il se définit comme un « juif d’origine berbère » et « Français, ni plus, ni moins ».

Auteur prolixe, il a publié une quinzaine d’ouvrages: des biographies (Edouard Balladur, Jacques Chirac), trois romans et plusieurs essais.

Dans « Le Suicide français », pavé de 500 pages paru en 2014, nostalgique de la société « d’avant mai-68 », il accuse les élites politiques, économiques, médiatiques et intellectuelles d’avoir bradé les valeurs de la France. Après ce succès en librairie, il publie en 2018 le « Destin français », une réflexion sur l’histoire de France, avec des notes personnelles.

Selon un confrère, « Zemmour adore prendre le contre-pied des idées reçues, quitte à passer pour un vieux réac, c’est un bretteur, avec la mauvaise foi que ça nécessite parfois ».

Virage politique?

Son acolyte sur Paris Première, Eric Naulleau, a dit de lui: « Avec un os, il reconstitue un dinosaure. C’est la marque des grands idéologues et des grands paranoïaques ».

Parmi ses autres chevaux de bataille identitaires brillent la francisation des prénoms (« Quand on vit en France, on donne un prénom français » à son enfant, en 2009) et l’attribution de crimes à une partie de la population française (« La plupart des trafiquants sont noirs et arabes, c’est un fait », dans la même émission de Thierry Ardisson).

Même s’il s’en défend, il semble être devenu plus politique en cette rentrée en participant à une convention organisée par des proches de l’ancienne députée d’extrême droite Marion Maréchal. Dans un discours virulent, Eric Zemmour s’en est pris aux immigrés « colonisateurs » et a repris à son compte la théorie du « grand remplacement » de la population blanche et chrétienne par une population immigrée musulmane.

Ce discours, en direct sur LCI, a entraîné l’ouverture d’une enquête par le parquet de Paris pour « provocation publique à la discrimination, la haine ou la violence » et a suscité de nombreuses réactions politiques, associatives et médiatiques.

RTL a décidé de prendre ses distances avec le polémiste, qui garde en revanche ses rendez-vous au Figaro (groupe Dassault) et à Paris Première. CNews assure pour sa part avoir obtenu « des garanties » sur le fait que son collaborateur ne nourrissait pas d’ambition électorale.

Un polémiste qui en revanche, pour le Monde, devrait désormais être « traité pour ce qu’il est : un délinquant et un pyromane ».

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