Boris Johnson © T. MELVILLE/REUTERS

Envers et contre tout: les raisons du succès de Boris Johnson

Le Vif

Il est accusé de mentir, de diviser, d’être incompétent… Peu importe, il est le favori des militants conservateurs pour devenir le prochain Premier ministre britannique, car dans cette course au pouvoir, Boris Johnson a un atout maître: le Brexit.

L’ex-maire de Londres a joué un rôle essentiel dans la campagne en faveur d’une sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne lors du référendum de juin 2016. Et c’est ce qui rend crédible aujourd’hui, aux yeux des militants tories, sa promesse de la mettre en oeuvre, après l’échec de Theresa May.

En revanche, son rival, le chef de la diplomatie Jeremy Hunt, pâtit du fait d’être un converti du Brexit. Il a d’abord défendu le maintien dans l’UE pendant la campagne du référendum, puis a changé d’avis fin 2017 devant l’attitude « arrogante » de Bruxelles dans les négociations, dit-il.

Boris Johnson a « des partisans dans des endroits très loin de Londres, où les gens sont très mécontents d’avoir voté pour le Brexit mais qu’il n’ait pas encore eu lieu » alors qu’il était initialement prévu le 29 mars, explique à l’AFP son biographe Andrew Gimson.

Les 160.000 membres du Parti conservateur départageront avant la fin du mois les deux candidats. Ils ont commencé à recevoir cette semaine les bulletins de vote.

Et le Brexit les anime: 54% d’entre eux ont déclaré être prêts à lui sacrifier leur parti, et 61% à en subir d’importantes conséquences économiques, selon un sondage YouGov du mois dernier.

Un autre publié la semaine dernière montre que 90% pensent que Boris Johnson ira au bout de sa promesse de sortir de l’UE sans accord s’il n’arrive pas à renégocier le plan de sortie conclu par Theresa May, contre 27% pour Jeremy Hunt.

« Boris est vu comme le vrai Brexiter, qui va sortir le Royaume-Uni (de l’UE) sans accord », a souligné Anthony Wells, le directeur en recherche politique de l’institut YouGov.

– Pardonné –

Boris Johnson, 55 ans, s’est déclaré candidat à la tête du gouvernement avant même que Theresa May ait annoncé sa démission le 24 mai. Depuis, les observateurs guettent la gaffe qui pourrait stopper son ascension vers le pouvoir.

Mais l’ex chef de la diplomatie a limité les apparitions médiatiques, se faisant du coup accuser de fuir le débat sur sa stratégie pour le Brexit, jugée trop vague par ses critiques.

Il a aussi évité les questions après une scène de ménage en juin avec sa partenaire, signalée à la police par des voisins diligents. Mais le scandale a vite été pardonné par ses partisans.

« Ce qui compte, c’est que ce gars va nous mettre en oeuvre le Brexit », a dit à l’AFP Hasnain Ahmed, analyste en technologie de 23 ans, lors d’une récente réunion du Parti conservateur à Birmingham (centre).

BoJo enchante en effet son public par son charisme et son humour, et il arrive à détourner l’attention et les critiques à coup de blagues sorties à propos ou d’anecdotes absurdes.

« Boris ne répond pas très bien aux questions, mais Jeremy Hunt est plutôt ennuyeux », a jugé de son côté Richard Tasker, responsable d’une association conservatrice locale. « Je voterai pour Boris, parce qu’il est le meilleur pour rassembler à nouveau notre grand parti ».

– « Succès du passé » –

Redoutant des élections anticipées si les blocages du Brexit persistent, les militants conservateurs pensent qu’il est à même de rassembler leur parti divisé entre partisans et adversaires d’un Brexit sans concession.

En 2008, puis 2012, Johnson a été élu maire de Londres sur un programme socialement libéral et pro-immigration.

Puis il a tenu un tout autre discours lors du référendum de 2016, défendant alors la limitation de l’immigration ou avançant des chiffres inexacts sur le coût de l’appartenance du Royaume-Uni à l’UE.

Il a aussi choqué de nombreux Britanniques en comparant les femmes musulmanes voilées à des « boîtes à lettres », même si sa tribune défendait en fait la liberté de pratiquer sa religion à travers ses vêtements.

En se présentant comme un gagnant, il « vit sur ses succès passés », observe Anthony Wells. Toutefois, « cela n’enlève rien à son charisme, et même s’il n’est pas populaire maintenant » en dehors du parti, « beaucoup (de militants) pensent qu’il y est arrivé avant, donc il peut réussir à nouveau ».

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