Le stade de Budapest le 27 juin dernier © Getty

Covid: l’Euro 2021 à l’origine d’un rebond en Europe?

Celine Bouckaert
Celine Bouckaert Journaliste au Vif

Si en Belgique le nombre de contaminations continue à baisser, il n’en va pas de même ailleurs en Europe. L’OMS annonce un rebond du nombre de cas de Covid. Hans Kluge, directeur d’OMS d’Europe, n’exclut pas que l’Euro de football ait pu faire office de « supercontaminant ».

Après dix semaines de baisse des cas, la semaine dernière, le nombre de contaminations a augmenté de 10% en Europe, en raison selon Kluge « de l’augmentation des brassages, des voyages, des rassemblements et de l’assouplissement des restrictions sociales ».

L’OMS Europe prévoit que le variant dit Delta, initialement détecté en Inde, devienne « dominant » d’ici août, confirmant la projection du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC). Elle s’attend à ce qu’il constitue 70% des nouveaux cas européens début août et 90% fin août. Le variant Delta est 40 à 60% plus transmissible que l’Alpha – détecté d’abord au Royaume-Uni.

Suivi au-delà des stades

Interrogé sur le rôle de l’Euro de football dans ce rebond, Hans Kluge a répondu: « J’espère que non, mais je ne peux pas l’exclure ». Les villes-hôtes des derniers matches de l’Euro de football doivent assurer un meilleur suivi de la circulation des spectateurs, y compris avant leur arrivée et après leur départ du stade. « Nous avons besoin de regarder bien au-delà des stades eux-mêmes », souligne Catherine Smallwood, une responsable de la branche européenne de l’OMS. Elle appelle à mieux suivre ce que les spectateurs peuvent faire « quand ils quittent le stade, vont-ils dans des bars ou dans des pubs très fréquentés ? ».

Plusieurs centaines de cas ont en effet été détectés chez des spectateurs de matches de l’Euro, notamment des Écossais de retour de Londres, des Finlandais de retour de Saint-Pétersbourg ou des spectateurs dans le stade de Copenhague qui se sont avérés porteurs du variant Delta.

Plus de 60 000 spectateurs à Wembley

Selon le gouvernement britannique, plus de 60.000 spectateurs seront autorisés dans les tribunes londoniennes de Wembley pour les demi-finales et la finale de l’Euro, au lieu des 40.000 initialement prévus, dans cette enceinte d’une capacité maximale de 90.000 places. La semaine dernière, le président du Conseil italien Mario Draghi avait pourtant émis le souhait que la finale « ne se déroule pas dans un pays où les contagions sont en train de croître rapidement ».

Quelques heures avant la huitième de finale Allemagne-Angleterre de mardi dernier, le ministre allemand de l’Intérieur Horst Seehofer avait déjà exhorté le gouvernement britannique et l’UEFA à réduire le nombre de supporters admis dans le stade de Wembley pour les derniers matches de l’Euro. En Allemagne, où l’Allianz Arena de Munich accueillera vendredi le quart de finale Belgique-Italie, la capacité a été fixée à 20%, soit environ 14.000 spectateurs. Seehofer, la règle des 20% devrait servir de « critère » pour toutes les autres rencontres.

« Je trouve cela irresponsable que des dizaines de milliers de gens se rassemblent sur des espaces étroits dans des pays classés à risque à cause du très contagieux variant Delta », comme cela est le cas actuellement de la Grande-Bretagne, avait déploré Seehofer, également ministre des Sports, dans un entretien au quotidien régional Augsburger Allgemeine.

Si décès et hospitalisations restent faibles actuellement au Royaume-Uni, pays le plus endeuillé en Europe avec 128.000 morts, le pays a enregistré dernièrement plus de 20.000 nouvelles contaminations par jour.

La Fédération anglaise de football invite ses supporters à rester chez eux

La fédération anglaise de football (FA) a indiqué pour sa part qu’elle renonçait aux 2500 places auxquelles elle avait droit pour le quart de finale de l’Euro, samedi à Rome, contre l’Ukraine, et a invité ses supporters à ne pas se déplacer.

« Nous vous prions de noter que, malheureusement, la FA ne vendra aucun ticket par le biais du Club (officiel) de voyage des supporters anglais pour ce match en raison des restrictions en place dans les deux pays » pour lutter contre la pandémie de Covid-19, a-t-elle écrit dans une lettre au groupe qui organise les déplacements officiels. La FA avait droit à 16% des 16.000 places qui seront occupées dans le Stadio Olimpico pour ce match, soit 2560 tickets. Ces billets devraient donc être vendus par les canaux habituels de distribution. Un résident anglais qui souhaiterait se rendre à Rome devrait en effet observer 5 jours de quarantaine, alors que le match est dans trois jours, et il devrait, en outre, s’isoler jusqu’à dix jours à son retour sur le territoire britannique. La FA a cependant ajouté « travailler avec l’UEFA et l’ambassade britannique en Italie pour faciliter la vente d’autant de tickets que possible aux résidents anglais en Italie ».

Protection limitée contre le variant Delta

L’OMS rappelle que 63% des Européens n’ont pas encore eu leur première dose de vaccin. « Ce que nous observons c’est qu’une nouvelle vague pourrait arriver avant l’automne ». Les études scientifiques révèlent qu’une seule dose de vaccin n’apporte qu’une protection limitée contre le variant Delta. Aussi l’Organisation mondiale de la Santé appelle-t-elle à la vigilance sur tous les grands rassemblements de l’été en général, Euro de foot ou non.

Une étude menée conjointement par la KU Leuven et l’ULB analyse l’impact des voyages internationaux sur la circulation du virus lors de l’été 2020 vient confirmer ses dires. Dans la majorité des pays européens étudiés, plus de la moitié des souches de Covid-19 circulant à la fin de l’été 2020 étaient le résultat de nouvelles introductions après le 15 juin. Cela suggère que les assouplissements et les voyages internationaux ont joué un rôle important dans l’émergence de la deuxième vague.

L’impact des souches nouvellement introduites semble d’autant plus important que le taux de circulation du virus était faible dans une région donnée. Les chercheurs comparent ce phénomène à un feu de forêt. « S’il y a déjà beaucoup de petits foyers dans une forêt, en allumer quelques-uns en plus ne fera guère de différence : le feu se propagera de toute façon », explique le chercheur FNRS Simon Dellicour. « En revanche, s’il n’y a que quelques foyers sporadiques, alors en allumer de nouveaux peut accélérer et augmenter la violence de l’incendie à venir ». Aussi les chercheurs prônent-ils la prudence.

Avec l’AFP

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