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Comment le coronavirus pourrait provoquer une « bombe sociale » en Italie

Le Vif

Débuts de pillages de supermarchés, distribution de bons alimentaires: la crise sanitaire liée au coronavirus est devenue sociale en Italie, où apparaît une nouvelle pauvreté mais aussi une nouvelle solidarité.

« Nous n’avons pas d’argent pour payer, nous devons manger! » Le 26 mars à Palerme, des incidents ont éclaté dans un supermarché d’où une vingtaine de personnes ont tenté de sortir sans payer.

Le maire, Leoluca Orlando, a regretté des « messages inconsidérés sur les réseaux sociaux qui risquent de créer un climat de déstabilisation » et a dénoncé des « présences criminelles et mafieuses dans et derrière ces faits ».

Mais ils sont aussi révélateurs d’une situation de plus en plus difficile pour des millions d’habitants en Italie, après plus de trois semaines de confinement et de blocage quasi total du pays.

Pour répondre à l’urgence, le gouvernement a mis en place différentes mesures, notamment l’émission de bons alimentaires distribués par les communes, d’une valeur globale de 400 millions d’euros.

A Palerme, 11.000 demandes sont déjà arrivées à la municipalité, assure le quotidien Il sole 24 ore.

La municipalité de Rome a également annoncé mardi que les familles « en situation de difficulté économique provoquée par les mesures de prévention et de limitation de la diffusion du coronavirus » pouvaient demander une aide pour faire les courses.

Celle-ci pourra atteindre 300 euros pour les foyers sans enfant et jusqu’à 500 euros pour les foyers d’au moins cinq personnes.

Aide alimentaire

Plusieurs grandes chaînes de supermarchés ont par ailleurs décidé d’offrir une réduction de 10% aux plus pauvres, sur les paiements effectués à l’aide des bons d’alimentation.

Mais malgré les mesures gouvernementales, l’arrêt de la grande majorité des entreprises, commerces et chantiers du pays a mis en difficulté de nombreux Italiens. Et la situation s’est encore durcie, dans le Mezzogiorno surtout, pour toute une frange de la population largement dépendante du travail au noir.

Au bout du compte et selon une estimation du principal syndicat agricole italien Coldiretti, ce sont 500.000 personnes supplémentaires qui ont besoin d’aide pour manger, en plus des 2,7 millions qui l’an passé avaient bénéficié d’aides alimentaires via des associations comme Caritas ou les Banques alimentaires.

Le syndicat fait ainsi état d’une hausse de 25 à 30% des demandes d’aides reçues en mars par ces associations, notamment dans les régions les plus pauvres du Sud, Sicile, Calabre ou Campanie.

L’association Banque Alimentaire de Campanie a ainsi noté une augmentation de 45% des personnes qui se sont adressées à elle depuis le début de la crise, rapporte l’agence italienne Agi.

« Bombe sociale »

« Normalement, nous servons 152.525 personnes. Mais se sont ajoutées 70.000 demandes », a raconté le directeur de l’association Roberto Tuorto, pour qui il faut désormais « faire en sorte que la crise économique déclenchée par le virus ne devienne pas une crise sécuritaire ».

Samedi, le quotidien Corriere della Sera évoquait « une bombe sociale » potentielle et assurait que la police gardait un oeil sur les réseaux sociaux et groupes de discussion où pourraient s’organiser de nouvelles opérations de pillage des commerces.

Mais les temps de crise sont aussi ceux de la solidarité et de nombreuses initiatives d’aide aux plus démunis ont été signalées dans le pays.

A Palerme, sur la plage de Mondello, a ainsi été installé un « étal solidaire », où ceux qui en ont besoin peuvent prendre de l’eau, des pâtes ou des produits d’entretien et de première nécessité, déposés par des particuliers.

A Rome, sur la petite place de l’Alberone, dans le sud de la ville, des produits de base, pâtes, biscuits, pain et boites de conserve ont également été disposés sur la margelle d’une fontaine avec ce petit écriteau: « Prenez donc si vous en avez besoin ! »

Et dans la capitale ou à Naples commencent à apparaître, descendus des balcons, des paniers remplis accompagnés de ce message: « Celui qui peut, met. Celui qui ne peut pas, prend. »

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