Brexit : l’UE rejette les conditions posées par Boris Johnson

Le Vif

L’Union européenne a rejeté jeudi la demande du nouveau Premier ministre britannique Boris Johnson de négocier un nouvel accord pour la sortie du Royaume-Uni et, sans fermer la porte à des discussions, se prépare à un divorce sans accord.

« L’accord de retrait a été rejeté trois fois. (…) Ses termes sont inacceptables pour ce parlement et ce pays », a déclaré Boris Johnson lors de sa première allocution devant les députés britanniques, au lendemain de sa prise de fonction.

Le dirigeant conservateur a en particulier réclamé « l’abolition » du « filet de sécurité » irlandais, destiné à éviter le retour de contrôles à la frontière entre la province britannique d’Irlande du Nord et sa voisine la République d’Irlande, agitant sinon la menace d’une sortie sans accord.

« Inacceptable », a rétorqué le négociateur de l’UE Michel Barnier, usant ostensiblement du même vocabulaire que Boris Johnson. Une « absence d’accord ne sera jamais le choix de l’UE, mais nous devons tous être prêts pour tous les scénarios », a-t-il ajouté.

– Etre fermes face à Boris –

Les dirigeants de l’UE ont toujours répété qu’ils ne rouvriraient pas l’accord de divorce conclu en novembre avec Theresa May, contrainte à la démission après le rejet de ce texte par les députés britanniques. Ils se montrent en revanche ouverts à modifier la déclaration politique jointe à l’accord de retrait, qui jette les bases de la future relation entre le Royaume-Uni et l’UE après le Brexit.

L’accord est « le meilleur et le seul possible », lui a redit jeudi au téléphone le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker au cours de leur premier entretien. Les deux dirigeants ont échangés leurs numéros de portable et sont convenus de rester en contact, a expliqué sa porte-parole

« La Commission reste disponible au cours des prochaines semaines si le Royaume-Uni souhaite tenir des pourparlers et clarifier sa position de manière plus détaillée », a-t-elle assuré.

Mais les Européens ne se font plus beaucoup d’illusions. « Boris Johnson donne la priorité à la planification du +no deal+, en partie pour faire pression sur l’unité de l’UE27 », a averti Michel Barnier.

« Face à Boris Johnson, il faut être fermes. Si on veut lui forcer la main, il faut se préparer au +no deal+, montrer que l’on a pas peur », a assuré un responsable européen sous couvert de l’anonymat.

« Je préférerais que nous sortions de l’UE avec un accord », a assuré Boris Johnson, même s’il a annoncé avoir demandé à Michael Gove, son bras droit au gouvernement, de faire de la préparation du « no deal », synonyme entre autres de retour des contrôles aux frontières, une « priorité absolue ».

Quoi qu’il arrive, il a promis de faire sortir son pays de l’UE d’ici au 31 octobre, pour faire du Royaume-Uni « l’endroit le plus génial au monde », balayant les prédictions pessimistes en cas de « no deal ».

– Virage à droite –

Il n’a pas encore posé ses valises à Downing Street, où il devrait emménager avec sa compagne de 31 ans, Carrie Symonds, mais à peine arrivé au pouvoir, Boris Johnson a annoncé la couleur en se débarrassant d’une très large partie de l’équipe de Theresa May, et en nommant aux postes clés de fervents « Brexiters » comme Dominic Raab, 45 ans, qui a hérité de la diplomatie, Priti Patel, 47 ans, nouvelle ministre de l’Intérieur, ou Jacob Rees-Mogg, 50 ans, chargé des relations avec le Parlement.

Les Européens misent sur les dissensions politiques dans le pays. « Nous devons suivre attentivement les nouvelles réactions et évolutions politiques et économiques au Royaume-Uni », a souligné Michel Barnier.

Le chef du Labour, principal parti d’opposition, Jeremy Corbyn, a appelé à une manifestation jeudi soir pour demander la tenue de législatives anticipées.

Boris Johnson devra aussi composer avec la résistance au parlement (où il ne dispose que d’une majorité de deux voix, en comptant les élus de son allié nord-irlandais DUP) d’élus conservateurs favorables au maintien de liens étroits avec l’UE. L’ex-ministre des Finances Philip Hammond a annoncé qu’il était prêt à « tout » pour empêcher un Brexit sans accord.

La Première ministre de l’Ecosse Nicola Sturgeon, où une large majorité d’électeurs ont voté contre le départ de l’UE, a elle demandé à Boris Johnson de proposer à sa province une « option alternative » à ses projets de Brexit. Mme Sturgeon, qui dirige aussi le parti nationaliste SNP, a souligné que le Parlement écossais étudierait ces prochains mois des textes de loi permettant l’organisation d’un référendum sur son indépendance.

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