La simulation permet de pousser le véhicule à la limite de la résistance. © j.-C. moschetti/réa

À Nantes, cette soufflerie unique au monde reproduit des conditions météo extrêmes

Le Vif

Pour tester la résistance des bâtiments ou des transports.

Trois, deux, un, action ! Une rude tempête de neige souffle à 80 km/h. Coincée dans cet enfer blanc par -10 °C, une berline française carbure sans broncher quand, soudain, c’est la panne. Le blizzard tombe alors d’un coup et des ingénieurs sortis de nulle part jettent un oeil sous le capot. S’agit-il du tournage du dernier James Bond en plein cercle polaire ? Pas du tout, nous sommes à Nantes, dans la soufflerie climatique Jules-Verne, du Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB). Bourrasques de sable, pluies diluviennes, grêle, températures de – 32 °C à 55 °C…  » C’est le seul banc d’essai aérodynamique au monde reproduisant autant de conditions extrêmes « , assure Pierre Palier, l’artisan de son agrandissement à peine achevé. Sur le point de souffler ses 30 bougies, l’instrument se montre à la mesure des dérèglements climatiques présents ou à venir.

Un vent de 280 km/h

 » Depuis sa réouverture, une bonne partie des constructeurs automobiles y ont effectué des tests « , indique Maxime Roger, directeur du site. La voiture dans le blizzard est destinée, par exemple, aux marchés du nord de l’Europe.  » Nos clients veulent vérifier leur produit en situation réaliste et entendre nos préconisations « , explique Jean-Paul Bouchet, qui encadre ces essais. A l’heure des moteurs hybrides ou de l’électronique à tout-va, le premier point faible des véhicules reste l’indémodable filtre à air.  » En s’introduisant à l’intérieur, la neige et la pluie vont le saturer jusqu’à étouffer le moteur « , ajoute-t-il.

Grande comme un terrain de football, la soufflerie a deux anneaux de béton distincts. L’interne permet d’avancer sur des rouleaux jusqu’à 250 km/h ; l’externe offre les plus puissants ventilateurs reproduisant des conditions dignes du Sahel.  » On y a soumis aux rafales de sable des engins militaires, dont un canon d’artillerie, ou encore des habitats de l’ONU pour les réfugiés « , se souvient Pierre Palier. La liste de produits et de maquettes testés est longue : ponts, gratte-ciel, maisons, trains, éolien, etc.

Chaque galerie possède une géométrie variable.  » Elles appliquent le fameux effet Venturi, détaille Philippe Delpech, l’un des ingénieurs. Quand la section rétrécit, l’air s’accélère.  » Et atteint 280 km/h dans la partie la plus étroite, si bien qu’un vaste filet empêche  » l’envol intempestif  » d’objets…  » Pour imiter les perturbations du vent réel, nous ajoutons des obstacles au sol « , détaille Maxime Roger. Comme toutes les constructions doivent endurer ces turbulences, le CSTB aide à leur conception. Ses maquettes, bardées de capteurs, montrent notamment que l’entrée de la tour Hekla dessinée par Jean Nouvel, en chantier dans le quartier de la Défense, à Paris, risque d’être trop exposée aux rafales. A moins que des haies ne soient ajoutées.

A l’heure de l’augmentation des phénomènes climatiques extrêmes, la soufflerie ausculte enfin les normes et résistances des bâtiments, ainsi que leur ventilation. Par exemple, elle a étudié le prochain hall d’aéroport de La Réunion. Grâce à une brèche végétalisée fendant son toit, chaque bourrasque viendra rafraîchir naturellement les passagers… et offrir un nouveau souffle au tourisme.

Par Christophe Josset.

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