Le panneau solaire peut produire jusqu'à 250 litres d'hydrogène par jour. © Printscreen VRT

Une source d’hydrogène vert inépuisable, la découverte prometteuse d’ingénieurs belges

Caroline Lallemand
Caroline Lallemand Journaliste

Une équipe de la KU Leuven a annoncé avoir mis au point un panneau solaire fabriquant de l’hydrogène avec l’humidité de l’air ambiant. Le premier projet test sera lancé bientôt pour des habitations à Oud-Heverlee.

Après dix ans de travail, les bio-ingénieurs du Centre de chimie et de catalyse des surfaces à la KU Leuven ont mis au point un appareil qui sépare les molécules d’eau H2O contenues dans l’air ambiant en hydrogène (H2) et en oxygène (O). La grande particularité et ingéniosité de cet appareil est qu’il ne fonctionne pas grâce à de l’électricité produite par l’énergie fossile ou nucléaire, mais exclusivement via l’énergie solaire, ce qui rend sa production renouvelable et inépuisable, rapporte Le Soir. Grâce à ces panneaux de 1,6 m2 chacun, 15% de la lumière solaire est directement transformée en hydrogène gazeux à partir de la vapeur d’eau. Le panneau peut produire jusqu’à 250 litres d’hydrogène par jour, un record mondial, selon l’équipe d’ingénieurs louvanistes.

« Nous pensons que nous avons franchi une étape importante dans la résolution du problème des émissions de CO2, qui sont à l’origine du changement climatique actuel », explique au Soir le professeur Johan Martens, qui collabore au Centre de chimie et de catalyse des surfaces de la KUL. « Vingt panneaux solaires de ce type pourraient fournir suffisamment d’hydrogène chaque jour pour alimenter une famille en électricité et en chaleur pendant un an. Car le gaz est facile à stocker dans les réservoirs existants. Il pourrait par exemple être utilisé durant les mois d’hiver, lorsqu’il devient difficile de se débrouiller avec la seule énergie des panneaux solaires classiques ».

Selon les chercheurs de la KUL, les applications pratiques sont nombreuses. L’appareil pourrait très bien être installé au milieu du désert pour fournir une énergie puissante et régulière. Ce carburant renouvelable peut aussi être utilisé dans des voitures avec l’avantage que du pot d’échappement de ces véhicules ne sorte que de l’eau. A l’heure actuelle, si le réseau De Lijn est passé à l’hydrogène pour une partie de sa flotte, seule une trentaine de particuliers roulent à l’hydrogène en Belgique. Il n’y a pour le moment que deux stations de ravitaillement. La semaine dernière, le constructeur automobile Toyota a annoncé qu’il voulait produire de l’hydrogène avec un prototype de 2014 du professeur Martens, explique la VRT. Il s’agit d’un panneau de 10 centimètres carrés qui produit 0,1 gramme de gaz en une journée.

Une source d'hydrogène vert inépuisable, la découverte prometteuse d'ingénieurs belges
© Getty Images/iStockphoto

Ces panneaux à hydrogène peuvent également être utiles dans les hôpitaux. « L’hydrogène peut fournir de l’énergie dans le bâtiment, tandis que l’oxygène peut être utilisé par les patients« , explique Johan Martens.

Un premier projet test chez un spécialiste de l’énergie à Oud-Heverlee sera bientôt lancé. Vingt appareils de ce type seront installés pour approvisionner en énergie un immeuble entier, voire tout un quartier. Si le test est concluant, des panneaux supplémentaires seront installés, afin de fournir la quarantaine de ménages du quartier en hydrogène. L’hydrogène produit en été pourra alors être stocké pour être transformé en électricité et en chauffage pendant l’hiver, explique la VRT. Selon les calculs des inventeurs de ces panneaux, un réservoir de la taille de quatre mètres cubes, du style donc des réservoirs à mazout encore présents dans de nombreuses habitations, suffit à compenser la baisse de la production de panneaux solaires traditionnels en hiver, explique Le Soir.

Un bémol: ce genre d’installation nécessitera des changements d’infrastructure radicaux, ce qui représentera de lourds investissements. Les gazoducs et les stations-service devront être ajustés. Le réseau de gaz devra aussi subir des modifications en profondeur afin de pouvoir chauffer des maisons ou stocker du carburant via ce mécanisme de production d’énergie.

Les chercheurs gardent précieusement secrets les détails techniques de ces panneaux révolutionnaires. Leur coût n’a pas non plus été dévoilé. Les chercheurs louvanistes révèlent toutefois au quotidien francophone qu’ils travaillent avec des matières premières bon marché sans avoir recours à des métaux précieux tels que l’or, l’argent ou le platine ni à d’autres composants coûteux.

De l’hydrogène « gris » à l’hydrogène « vert »

L’hydrogène n’est pas un nouveau carburant, ce gaz est actuellement utilisé dans de nombreux processus de production. Il s’agit d’une énergie assez complexe, qui se révèle onéreuse à produire et à stocker, d’où sa production assez faible. L’hydrogène est considéré comme un carburant « écologique » car il ne rejette aucune substance nocive dans l’air. Cependant, la majorité de cette énergie actuellement disponible provient d’une origine fossile, principalement du pétrole et du gaz. Elle n’est donc pas considérée comme une matière première renouvelable. Cet hydrogène est alors dit « gris », contrairement à l’hydrogène « vert » produit avec des sources renouvelables. L’hydrogène étant un gaz hautement inflammable, surtout dans des endroits confinés, des conditions d’utilisation très strictes doivent être établies.

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