© BELGA

Pollution de l’air: La neige, pas si immaculée qu’elle n’y parait

Caroline Lallemand
Caroline Lallemand Journaliste

La neige qui recouvre le sol contient des particules polluantes présentes dans l’atmosphère, le plus souvent des particules de gaz d’échappement. Explications de ce phénomène.

La neige, comme la pluie, mais de manière beaucoup plus efficace, absorbe les particules fines de pollution, rejetées notamment par les pots d’échappement des voitures. Une équipe de chercheurs de l’Université McGill et de l’École de technologie supérieure de Montréal s’est penchée sur ce phénomène.

Dans le cadre de leur étude publiée en 2017 dans la revue Environmental Pollution, l’équipe de chercheurs a recréé un environnement neigeux dans un espace isolé de leur laboratoire. Plusieurs types de neige y ont été exposés à des particules polluantes semblables à celles rejetées par les voitures. Les niveaux de plusieurs éléments toxiques – tels que le benzène, l’éthylbenzène et le xylène – ont été mesurés dans la neige et dans l’air au cours de l’expérience.

Ces analyses ont permis de déterminer le taux d’absorption des particules fines par la poudreuse. Les chercheurs ont découvert que la neige, en milieu urbain, absorbait certains polluants organiques toxiques et cancérigènes appelés hydrocarbures aromatiques polycycliques. Piégés par la neige, ils ont aussi observé que les polluants atmosphériques subissaient des transformations chimiques qui peuvent donner naissance à d’autres polluants avec différents degrés de toxicité et de cancérogénicité.

7 millions de décès par an

L’étude de ce phénomène est important et notamment dans la réduction de la mortalité causée par la pollution atsmosphérique: « Comprendre l’interaction entre ces polluants et l’environnement, y compris avec la neige, revêt une importance cruciale si nous voulons réduire les centaines de milliers de décès prématurés que cause la pollution de l’air, même légère, en Amérique du Nord. À l’échelle mondiale, la pollution de l’air est responsable de quelque 7 millions de décès« , affirme Parisa A.Ariya, auteure principale de cette recherche.

Autre observation interpellante: les températures froides et l’interaction entre la pollution atmosphérique et la neige augmentent la quantité relative des petites nanoparticules dans l’air pollué au-dessus du tapis neigeux. Ces polluants, les plus petits que l’on retrouve dans l’air, ont également été associés à plusieurs problèmes de santé, notamment des problèmes respiratoires.

On peut toutefois relever un point positif pour la santé lors d’épisodes neigeaux. Les précipitations de neige contribuent à nettoyer l’air de manière efficace. Selon Jean-François Muller, chercheur à l’Institut d’aéronomie spatiale de Belgique (IASB) cité par Le Soir : « C’est positif pour notre santé, puisque cela signifie que ces particules fines ne pourront plus nuire à nos voies respiratoires. Car ces particules – en particulier les plus fines d’entre elles, d’une taille inférieure à un micron – peuvent se retrouver très loin dans nos poumons, voire dans notre système sanguin. Un lien a d’ailleurs été établi entre ces particules et des maladies du système circulatoire. »

Moins de particules qu’il y a 10 ans

Mais qu’en est-il une fois que la neige a fondu ? Certains composés, parfois plus néfastes que les polluants de départ, se volatiliseront pour retourner dans l’air, alors que d’autres s’accumuleront dans la neige et se retrouveront dans les eaux de fonte.

« Ces rejets pourraient, à court terme, provoquer une augmentation de la concentration de certains polluants dans l’air, les sols et les eaux de surface vers lesquelles s’écoulent les eaux de fonte « , affirme Yevgen Nazarenko qui a pris part à l’étude de l’université McGill.

De son côté, Thierry Visart de Bocarmé, professeur de chimie à l’Université libre de Bruxelles (ULB), n’exclut pas une pollution des sols par ce biais mais nuance ces affirmations: « Cela reste des particules d’hydrocarbure, donc quelque chose qui n’est pas propre en soit. Maintenant, de là à dire qu’il y a danger, notamment pour les nappes phréatiques, je n’y crois pas trop. » Il émet le même raisonnement concernant le contact avec l’être humain. «  Ce n’est pas parce que la neige contient des particules de l’atmosphère qu’un enfant qui joue et qui avale trois flocons est en danger pour autant « , assure-t-il dans Le Soir.

On pourrait aussi penser que la neige contient plus de particules fines que dans le passé. «  Si l’on compare avec la concentration en particules de la neige d’il y a plus d’un siècle, alors oui, c’est certain, il y’en a plus aujourd’hui, considère Jean-François Muller. En revanche, il y en a certainement moins aujourd’hui qu’il y a 10 ans, notamment parce que les moteurs conçus, de nos jours, dégagent moins de particules de ce type », rassure Jean-François Muller dans le quotidien belge.

Les auteurs canadiens de l’étude estiment que de nouvelles études et une surveillance environnementale accrue pourraient permettre de repérer les polluants les plus néfastes et, à terme, réduire leur présence dans l’environnement en modifiant la composition des carburants et en optimisant les moteurs et les catalyseurs des voitures.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire