Carte blanche

Lettre ouverte d' »Ambassadeurs de la Propreté » épuisés (carte blanche)

Parmi les ramasseurs de canettes bénévoles, la fatigue s’installe. Il y a toujours plus de canettes et de bouteilles à ramasser. C’est pourquoi ils plaident pour un système de consigne qui est plébiscité par une majorité de Belges (*). Mais FostPlus, Comeos et Fevia (**) s’y opposent farouchement. Pourquoi ? Les ramasseurs cherchent à comprendre.

Nous ramassons bénévolement les déchets sur les côtés des routes mais le flux ne tarit pas. Nous sortons nos gilets jaunes, nos gants et nos pinces gracieusement offerts par BeWaPP, nous écopons encore et encore… Mais bouteilles en plastique et canettes reviennent sans fin. Le travail est toujours à recommencer, cela ressemble au supplice de Sisyphe.

Alors nous nous posons la question : puisque le Belge ne semble pas doté d’un sens civique à toute épreuve, pourquoi ne pas se servir de la consigne ? Un outil qui fonctionne plutôt bien en Allemagne, Finlande, Suède, Norvège et au Danemark.

Mais quand nous avançons l’idée de la consigne, il y a généralement une levée de boucliers. Principalement de la part de FostPlus, Comeos et Fevia. Mais aussi de la part de BeWaPP, vous savez, les « gentils organisateurs » des grands nettoyages de printemps.

Lettre ouverte d' »Ambassadeurs de la Propreté » épuisés

On nous rétorque que nous, les Belges, avons un système presque parfait (les sacs bleus) et que nous sommes pratiquement champions du monde du tri. D’accord, la plupart des ménages respectent les règles et nous remettons une partie non négligeable des emballages « dans le circuit ». C’est très bien.

Mais comment pouvons-nous être considérés comme des modèles alors que nous avons des tonnes de canettes et de bouteilles en plastique qui jonchent les routes et que les poubelles « tout venant », et plus particulièrement les poubelles publiques, contiennent d’énormes quantités de ces déchets pourtant recyclables.

Les soi-disant excellents chiffres de recyclage sont régulièrement mis en évidence par FostPlus qui s’auto-congratule et qui les utilise comme argument pour contrer la consigne. Or, ils ne sont pas neutres dans ce débat.

Les considérations financières seraient-elles plus importantes que la lutte contre les déchets sauvages ?

Ils récupèrent, via le sac bleu, de grandes quantités de plastique et d’aluminium qui représentent des sommes considérables et ils ne souhaitent probablement pas que ce « butin » aille vers les machines à consigne. Les considérations financières seraient-elles plus importantes que la lutte contre les déchets sauvages ?

Lettre ouverte d'
© GETTY

Comeos et Fevia s’expriment aussi clairement contre la consigne. Sans doute craignent-ils que l’instauration de la consigne ne nuise à leurs marges bénéficiaires. L’emballage jetable (régulièrement jeté dans la nature) est manifestement la solution la plus efficace pour vendre d’énormes quantités de canettes, mais c’est la pire solution pour la propreté de notre environnement. Nous ne pouvons pas croire qu’ils ne sont pas conscients des conséquences de la mise sur le marché de ces produits jetables.

Enfin, en creusant un peu, nous nous apercevons que ces trois farouches opposants à la consigne ne sont pas indépendants. FostPlus est exclusivement financé par Comeos et Fevia, et chacun d’entre eux a des intérêts financiers qui vont à l’encontre de la consigne.

Les liens suspects ne s’arrêtent pas là. Quand nous nous intéressons à BeWaPP, qui rassemble la population pour de grandes opérations citoyennes de nettoyage, mais est aussi opposé à la consigne, nous découvrons que c’est FostPlus, Comeos et Fevia qui financent BeWaPP. Encore et toujours les mêmes protagonistes et exactement le même discours anti-consigne.

Résumons…

Quand la gestion des déchets d’emballages est confiée à une asbl privée (FostPlus), créée et financée par la grande distribution et l’industrie de l’emballage, il est facile d’imaginer que les enjeux prioritaires ne sont pas la propreté publique.

« L’opposition de Fost Plus est une question de business », tranche Julie Frère, la porte-parole de Test Achats.

Quand nous enfilons nos gilets jaunes, nous sommes les petites mains qui contribuent bénévolement à un effort collectif présenté comme « citoyen ». Alors qu’en réalité, cet effort est télécommandé par les entreprises qui profitent de la vente de ces canettes et bouteilles.

Devons-nous continuer à jouer leur jeu, à donner de notre temps et de notre énergie pour compenser leur refus d’assumer les conséquences de la mise sur le marché de leurs produits jetables ? Ne sommes-nous pas les dindons de la farce ?

Est-ce normal ? Devons-nous continuer à jouer leur jeu, à donner de notre temps et de notre énergie pour compenser leur refus d’assumer les conséquences de la mise sur le marché de leurs produits jetables ? Ne sommes-nous pas les dindons de la farce ? Pouvez-vous comprendre notre colère ?

La cerise sur le gâteau est la découverte du fait que l’opération-pilote visant à tester l’efficacité de la consigne (***) a été mise sur pied par les organismes que nous venons de citer, qui sont farouchement opposés à la consigne (FostPlus, Comeos, Fevia, BeWaPP). Concernant cette expérience pilote, il est aussi à noter que le système de prime retour n’est pas un système de consigne, nous nous demandons dès lors quelles conclusions valables pourront être tirées de cette expérimentation annoncée avec fierté ?

Dernières questions : les élues et les élus du Parlement Wallon sont-ils tous bien conscients de ces rapports entre les acteurs du débat sur la consigne ? Sont-ils conscients du fait que les statistiques et conseils reçus de FostPlus et BeWaPP sont biaisés ? Quel est le poids des lobbies en la matière ?

Quant à nous, nous restons convaincus qu’un système de consigne sur les canettes et les bouteilles PET devrait être instauré parce que, même s’il n’est pas la panacée, il contribuerait à réduire considérablement les déchets sauvages sur terre et dans les mers.

*8 Belges sur 10, selon un sondage réalisé en 2018 par Recycling Netwerk ; Inter-Environnement, Test-Achats et Ecoconso sont également pro-consigne. Certains grands groupes, tels que Spadel, seraient, selon certains parlementaires, enthousiastes à l’idée d’aller vers une consigne.

** Fevia : fédération de l’industrie alimentaire belge qui représente 700 entreprises produisant des produits alimentaires et des boissons.

Comeos : porte-parole du commerce et des services en Belgique.

FostPlus : organisme privé qui assure la promotion, la coordination et le financement de la collecte sélective, ainsi que le tri et le recyclage des emballages ménagers.

Fevia a contribué à la création de FostPlus. Son financement provient des entreprises qui mettent des produits emballés sur le marché belge.

BeWaPP : ASBL créée par FostPlus, Fevia et Comeos afin d’améliorer la propreté publique en Wallonie.

*** Opération mise sur pied dans une vingtaine de communes et se terminant en juin 2021.

Signataires :

Régine Florent (Initiatrice de la pétition pour la consigne déposée sur le site du Parlement Wallon), Benoît Embrechts (Ambassadeur Propreté à Falmagne-Falmignoul), Emmanuel Gervy (Ambassadeur Propreté à Ittre), Guy Godeau (Ambassadeur Propreté à Ittre).

Jef Helderweert (Let’s Do it ! Belgium, initiative pour un système de consigne partout dans l’UE), Etienne Mayeur (Eco-citoyen engagé), Viviane Rousseau (Ambassadrice Propreté à Marche-les-Dames), Eddie Van Hassel (Ambassadeur Propreté à Erpent), Marie-Claude Van Winnendaele (Ambassadrice Propreté à Lives-sur-Meuse), Didier Verboomen (Ambassadeur Propreté à Ittre)

Nous vous proposons d’exprimer votre soutien au système de consigne via la pétition suivante.

La pétition existe également en version papier et peut être obtenue sur simple demande à florentregine@gmail.com

Elle peut aussi être téléchargée sur la page Facebook – Objectif planet

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