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Vous avez aimé Publifin ? Vous allez adorer Ores

Thierry Fiorilli
Thierry Fiorilli Journaliste

C’est une des questions essentielles que pose le scandale Publifin. Sans doute même la question primordiale : pourquoi payer des élus politiques, dans des comités de secteur, pour ne même pas assister à des réunions qui n’ont de toute façon aucune utilité ?

Tout le monde s’est légitimement indigné du principe, des montants, des cumuls de mandats dans d’autres intercommunales et dans d’autres comités, des conflits d’intérêts potentiels, des placements et replacements ici ou là de proches, de parents et de fidèles, de l’estompement des normes, de l’enrichissement personnel avec de l’argent public. Mais restait cette interrogation : pourquoi donc payer quelqu’un pour ne rien faire ? Depuis plus de deux mois, au sein de la rédaction du Vif/L’Express, et parallèlement à toutes nos investigations et toutes nos révélations, nous cherchons la réponse. Et inlassablement, une seule fusait : on paie pour asseoir son pouvoir. Re-questions, du coup : oui, mais quel pouvoir exactement ?

Il nous semble pouvoir y répondre, désormais. Grâce à un conseiller communal PS de Genappe, Jean-François Mitsch, spécialisé dans les questions énergétiques. En assistant, intrigué, interloqué puis ulcéré, depuis trois ans, à la façon dont sa commune semble valider, sans réel débat, toute politique menée, dans ce cas-ci, par Ores. Cette gigantesque intercommunale gère la distribution du gaz et de l’électricité dans pratiquement toute la Wallonie, à l’exception de la province de Liège, où le réseau est aux mains de Resa, qui appartient à l’empire Publifin-Nethys. Cette gigantesque intercommunale n’a pas payé des mandataires pour ne rien faire mais des élus d’un peu partout ont notamment siégé dans ses comités de secteur, jusqu’à leur liquidation fin de l’année dernière, contre rémunération tout à fait réglementée et pour des réunions tout à fait effectives. Reste que Mitsch considère qu’en payant ces élus, Ores, qui regroupe 197 communes, s’est assuré en fait de leur docilité. Par exemple chaque fois qu’il a été question d’opération financière, nécessitant des dépenses communales mais pouvant, à terme, leur générer des dividendes.

C’est ce qui relierait les « dossiers » Publifin et Ores : les mandataires politiques rémunérés à travers des intercommunales ne s’opposent pas, jamais, aux décisions des opérateurs énergétiques qu’ils sont censés contrôler en siégeant, précisément, dans ces intercommunales. Et font en sorte que leur commune suive les consignes, au pas et en rangs serrés.

On comprend dès lors pourquoi certains ont été payés pour ne rien faire, dans les comités de secteur Publifin. Surtout, en creusant et confrontant les soupçons du conseiller de Genappe, on découvre un scénario qu’accréditent d’autres experts : en validant toutes les politiques, tarifaires comprises, menées par les opérateurs énergétiques, ces élus, depuis leur commune comme depuis l’intercommunale dans laquelle ils ont siégé, ont contribué à surévaluer le coût de l’énergie, en Wallonie. Le discours vaut aussi sans doute en matière de télédistribution, entre autres.

Conclusion de plusieurs spécialistes qui s’expriment dans notre vaste enquête, cette semaine : à cause de ces pratiques, depuis des années, la facture d’électricité du consommateur est beaucoup plus élevée que ce qu’elle aurait dû et devrait être. C’est là que réside assurément le véritable scandale.

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