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Vivre en ville, c’est la santé ?

En tout cas dans les 9 villes wallonnes engagées dans le programme « Villes-Santé » de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS).

Une Ville-Santé, c’est une ville qui « améliore continuellement les conditions ayant une influence sur la santé et le bien-être de ses habitants ». Tiens ? Ne serait-ce pas une préoccupation commune à toutes les villes ? « Eh bien non ! Si bizarre que ça puisse paraître, la santé et la qualité de vie des citoyens ne sont pas un axe prioritaire dans les obligations des villes et communes, confirme Michèle Lejeune, responsable du Service Santé de la Ville de Charleroi et coordinatrice du label Charleroi Ville-Santé. Mais les 9 villes du Réseau Belge Francophone des Villes-Santé (en bref, RBF), qui s’est constitué en asbl en 2009 et a reçu son accréditation de l’OMS en 2011, se sont rendu compte qu’en agissant sur les déterminants personnels, sociaux, économiques et environnementaux de la santé et du bien-être, elles s’assurent une véritable plus-value… »

Contexte local

Le projet Villes-Santé ne date pas d’hier. L’OMS l’a lancé au niveau mondial dès 1986, dans le cadre de sa stratégie « Santé 21 » – autrement dit « Santé pour tous pour le 21e siècle ». « L’OMS estime que les villes, milieux de vie, de développement et de sociabilité, ont un rôle essentiel à jouer face aux grands problèmes de santé de notre époque, souligne Chantal Leva, directrice du Centre liégeois de Promotion de la Santé. Parce qu’elles sont proches des gens, elles sont idéalement placées pour élaborer un plan d’action adapté au contexte local… »

Car les 11 critères définis par l’OMS (voir encadré) ne doivent pas être appliqués tels quels, mais revisités en fonction des particularités et des ressources de chaque ville.

Loin des discours moralisateurs, le projet Villes-Santé est basé sur la conviction que la santé et le bien-être ne relèvent pas seulement de la responsabilité individuelle, mais aussi de l’environnement au sens large : éducation, logement, accès à la nourriture et aux soins de santé, réseaux de soutien social, emploi et conditions de travail, revenus, etc. « Sous le label Ville-Santé, j’associe toujours la santé et le bien-être, insiste Michèle Lejeune, parce que je ne veux pas m’enfermer dans le biomédical. Si on table sur la définition de la santé de l’OMS – un état de complet bien-être physique, mental et social – on peut même inclure dans le projet des problématiques comme l’urbanisme, la réfection des routes, etc. qui ont un impact considérable sur la vie quotidienne… »

Entraide

Certaines villes wallonnes n’ont pas attendu la création du RBF pour poser leur candidature comme « Ville-Santé » : Huy, La Louvière et… la Province de Liège, curieusement enregistrée comme « ville », ont été admises individuellement dès 1990, Sambreville en 2004, Mouscron en 2007 et Charleroi en 2008. « Mais la force du réseau, c’est évidemment l’entraide, remarque la docteur Cathy Hansenne, médecin directeur du Service Provincial liégeois de Promotion de la Santé. Échange de données et d’expériences, mise en valeur des projets des autres membres, mais aussi développement de projets communs. Ainsi, nous venons de lancer un projet alimentation dans les crèches, qui porte sur la découverte du goût et de la consistance. »

Sur le terrain aussi, l’entraide est le maître-mot. « Le but est de créer autour de chaque projet une dynamique impliquant autant d’acteurs locaux que possible – administrations, associations, services de santé, écoles, etc. détaille Michèle Lejeune. Un même message peut ainsi être diffusé à des publics différents, et tout le monde est gagnant ! À Charleroi, par exemple, l’initiative ‘Plat Net Santé’ a été largement répercutée. »

Organisé en partenariat par l’échevinat de la Santé, l’asbl Charleroi Centre Ville, l’Association des Diététiciens Indépendants de Charleroi (ADIC) et les restaurateurs, ce projet emblématique consiste à proposer dans une série de brasseries, sandwicheries et restaurants des plats qui respectent les principes d’une alimentation saine. « Ces plats, identifiés par un logo, connaissent un succès croissant, comme d’ailleurs l’opération elle-même, souligne Michèle Lejeune. Nous avons commencé avec 6 participants, et nous en sommes déjà à 18. C’est une façon de montrer que, même au restaurant, manger peut allier plaisir et santé ! »

Citoyens experts

Mais les villes ont-elles vraiment besoin de l’aval de l’OMS pour « faire » de la santé ? Pour le député provincial (liégeois) en charge de la santé, Georges Pire, qui est à l’origine du RBF, ce n’est pas indispensable, mais c’est un plus. « Les critères de l’OMS sont assez stricts et même fastidieux, mais ça en vaut la peine, car, une fois labellisée, une ville peut chercher l’inspiration dans le monde entier, grâce aux rencontres internationales auxquelles elle est invitée. À force de s’enrichir de l’expérience des autres, elle finit par devenir une véritable Ville-Santé, capable d’intégrer la santé dans toutes ses décisions politiques, quel que soit le domaine concerné. Avec la participation de sa population, car les citoyens ne doivent jamais être cantonnés dans le rôle de consommateurs de soins : ils sont les premiers experts de leur propre santé. »

11 critères pour une Ville-Santé

1. Un environnement salubre et sans risques.

2. Un écosystème stable.

3. Une communauté forte et solidaire.

4. Un haut niveau de participation et de contrôle de la population dans tout ce qui concerne sa vie, sa santé et son bien-être.

5. La possibilité de satisfaire ses besoins premiers (alimentation,eau, logement, revenu, sécurité et travail).

6. L’accès à une grande diversité d’expériences et de ressources.

7. Une économie locale diversifiée, vitale et innovatrice.

8. L’encouragement du sentiment de lien avec le passé, c’est-à-dire avec le patrimoine culturel et biologique des citadins.

9. Une structure de ville compatible avec ce qui précède et qui l’améliore.

10. Des services de santé publique accessibles à tous.

11. Une priorité à la santé avec des standards élevés.

Pour en savoir plus : www.reseau-ville-sante.be.

Par Marie-Françoise Dispa

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