Luc Coene, gouverneur de la Banque nationale de Belgique. © Belga

« Trop peu de jobs créés en Belgique, car ils coûtent trop cher »

Le faible niveau de création d’emplois et les coûts salariaux qui sont parmi les plus élevés en Europe figurent parmi les principaux défis auxquels l’économie belge est confrontée.

Le faible niveau de création d’emplois, singulièrement dans les activités de marché, et les coûts salariaux, parmi les plus élevés en Europe, figurent parmi les principaux défis auxquels l’économie belge est confrontée, a souligné le gouverneur de la Banque nationale de Belgique (BNB), Luc Coene, dans le cadre de la présentation du rapport annuel 2014 de l’institution. Le gouverneur, qui prendra sa retraite en mars, estime dès lors qu’un glissement fiscal ou « tax shift » est « absolument nécessaire ».

« Il y a peu de jobs créés en Belgique, car ils coûtent trop cher », a résumé M. Coene, soulignant que cette réalité pesait surtout sur les profils les moins qualifiés dont la productivité est moins élevée. « Ce n’est pas un hasard si la Belgique est en même temps le pays où les coûts salariaux sont les plus élevés et où le taux d’emploi est le plus bas », a ajouté le gouverneur de la BNB. En 2013, les coûts salariaux horaires atteignaient près de 41 euros dans les entreprises belges de 10 salariés ou plus, là où la moyenne était de 29 euros dans la zone euro. Dans le même temps, le taux d’emploi en Belgique reste inférieur à la moyenne européenne (UE15). « Même au niveau des salaires nets, il y a peu d’espace pour une croissance des salaires si on ne veut pas mettre davantage en danger la compétitivité de nos entreprises », a jugé M. Coene. Le taux de prélèvement implicite sur le travail, défini comme l’ensemble des prélèvements sur les revenus du travail versés aux administrations publiques, divisé par la masse salariale, est 7,7% plus élevé en Belgique que la moyenne de la zone euro. Alors que l’on évoque depuis plusieurs mois l’idée d’un glissement fiscal ou « tax shift » permettant d’alléger la fiscalité sur le travail, la BNB a tenté de voir là où des marges de manoeuvre étaient possibles tout en restant budgétairement indolores. En matière de TVA, tout d’abord, la Belgique se situe dans la moyenne européenne. Depuis 2008 et l’éclatement de la crise financière, notre pays figure parmi les rares de la zone euro à ne pas avoir augmenté leur taux de TVA. « En 2008, le taux belge était parmi les plus élevés. Il a depuis lors été largement dépassé. Cela semble indiquer qu’il y a des choses à faire à ce niveau-là », a estimé M. Coene. Interrogé sur les éventuelles conséquences négatives sur la consommation d’une hausse de la TVA, le gouverneur a souligné que « le plus important, ce n’est pas le présent mais l’avenir. Il faut plus de jobs, plus d’emplois. À un certain moment, il faut faire quelque chose. Il y aurait peut-être un effet légèrement négatif à court terme mais l’important, c’est de créer à terme les emplois dont on a besoin. Ce n’est pas dans les secteurs hautement technologiques, même s’ils sont importants, que l’on va créer les milliers d’emplois dont on a besoin ». Certains taux de TVA réduits appliqués à divers produits (antiquités, produits de luxe voire l’électricité) pourraient également être revus à la hausse, selon le gouverneur. La BNB voit aussi « des marges disponibles » en matière de taxes environnementales puisqu’à cet égard, la Belgique applique des taxes sensiblement inférieures à la moyenne de la zone euro. En matière de taxation du capital, la BNB avance quelques pistes possibles comme la mise en place de prélèvements sur les plus-values ou l’adoption de mesures relatives aux déductions et exemptions fiscales. Enfin, la BNB estime dans son rapport qu’une « utilisation optimale des moyens techniques permettant d’identifier tous les revenus et d’établir la situation patrimoniale des particuliers renforcerait efficacement la lutte contre les différentes formes de fraude ». « Plus on aura un impact sur le coût du travail, mieux cela sera pour l’emploi. Après, il revient aux responsables politiques de voir ce qui est faisable et de faire des choix », a conclu Luc Coene.

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