Triste Pâque juive

Depuis vendredi dernier et jusqu’au week-end, la tradition célèbre Pessah, la Pâque juive qui a une signification tout à fait différente de celle des chrétiens. Il s’agit de fêter un événement particulièrement fondateur : l’Exode des Hébreux hors d’Égypte où d’après la tradition biblique, ils étaient réduits en esclavage.

Peu importe que la Mer Rouge se soit, ou non, ouverte au passage de Moïse et refermée aussitôt sur les armées de Pharaon, son frère adoptif. Qu’on croie ou non au buisson ardent, aux plaies d’Egypte et aux Dix Commandements, le fait est qu’en cette période troublée, cette importante fête juive a d’étranges relents.

Vous avez dit exode ?

En veine d’optimisme, Le Vif-l’Express indiquait dans une couverture récente : « Juifs : pourquoi ils ne partiront pas » après les attentats islamistes qui ont touché en premier cette communauté. Rester ? Fuir ? Incontestablement, de nombreuses familles se renseignent sur le Canada, les Etats-Unis ou Israël en vue d’une terre mieux promise. Champions de l’intégration (la religion juive prescrit de s’adapter aux lois locales des « Gentils »), les Juifs sont aussi plus prompts à bouger quand ça sent le roussi.

Notons qu’un départ massif des Juifs a, historiquement, souvent correspondu au début d’un déclin, que ce soit les Marranes fuyant l’Espagne ultra-catholique ou les Juifs soviétiques fuyant le communisme. A contrario, selon Jacques Attali*, la révolution américaine n’aurait pas été possible sans l’immigration juive.

Faut-il dès lors se « consoler » en constatant que les terroristes islamistes s’en prennent aujourd’hui indifféremment aux chrétiens, athées, juifs, musulmans ou agnostiques ? Que le nombre d’actes antimusulmans croît également ?

En tout cas, il n’y a guère qu’une communauté qui, dans notre pays, doive aujourd’hui réellement se cacher ou être protégée si elle est repérable : la communauté juive.

Bien sûr, pour un Juif qui n’observe aucun des rites, ne porte aucun signe distinctif, ne porte pas de patronymes repérables, n’est ni rabbin ni Hassidim ou scout étoilé et n’a aucune revendication communautaire, la vie continue comme si de rien n’était.

Il est clair que, contrairement à l’Allemagne des années 30 et 40, les Juifs belges ont la pleine citoyenneté et jouissent du soutien moral des hommes politiques et des médias. Mais, au-delà des discours et des éditoriaux, si toute observance de la vie juive (cultuelle et culturelle) vous oblige à être entouré de murs et de militaires, peut-on encore parler de démocratie ?

70 ans après les camps d’extermination, le vrai scandale n’est pas que les Juifs observants doivent, pour leur sécurité, veiller à bien retirer la kippa en sortant du Temple. Le vrai scandale réside dans le fait que quasi personne ne s’en émeuve. 36.000 voix, combien de divisions ?

*dans « Les Juifs, le monde et l’argent » (Fayard).

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