The Secret of the Unicorn, sorti en 2011, ne figure pas parmi les réalisations majeures de Steven Spielberg. © AMBLIN ENTERTAINMENT/WINGNUT F/BELGAIMAGE

Tintin, prisonnier d’Hollywood

Olivier Rogeau
Olivier Rogeau Journaliste au Vif

Quand sortira Prisoners of the Sun, le deuxième volet des aventures de Tintin en images de synthèse, projet sans cesse reporté ? Peter Jackson, qui doit le réaliser, envisage de travailler sur le script cette année.

« Capitaine, capitaine, ne voyez-vous rien venir ?  » Sorti en octobre 2011, le film de Steven Spielberg The Adventures of Tintin : The Secret of the Unicorn avait été présenté comme le premier volet d’une  » trilogie Tintin « . Mais les années passent et le réalisateur américain se contente de répéter de temps à autre que le cinéaste néo-zélandais Peter Jackson ( Le Seigneur des anneaux), appelé à réaliser le deuxième épisode,  » se prépare à travailler sur le script « . C’est encore ce que le réalisateur des Dents de la mer a affirmé en mars 2018, estimant que  » Tintin 2 « , que Spielberg produira, ne sortira pas avant trois ans, donc plus de dix ans après le premier film. Peter Jackson, lui, a reconnu en octobre que rien n’avait encore été entrepris, mais qu’il pensait se mettre à l’écriture du scénario en 2019. Titré The Adventures of Tintin : Prisoners of the Sun, le nouvel opus mixera les histoires des albums Les 7 Boules de Cristal et Le Temple du Soleil.

Reste que le premier volet n’a pas rencontré outre-Atlantique le succès escompté : les recettes y ont à peine dépassé la barre des 77 millions de dollars, pour un budget de 135 millions de dollars. C’est grâce à l’international (France, Grande-Bretagne et Espagne en tête) que le film est parvenu à faire des bénéfices (près de 300 millions de dollars de recettes). Et ce grâce à un énorme budget promotionnel : Sony et Paramount ont investi 100 millions d’euros dans la campagne médiatique. Réalisé en images de synthèse et en motion capture (captation de mouvements en 3 D), ce film ne figure pas parmi les réalisations majeures de Spielberg. Il a d’ailleurs vite sombré dans l’océan de l’oubli, à l’image de la Licorne, le vaisseau du chevalier François de Hadoque. Bon nombre de cinéphiles et de tintinophiles sont restés perplexes devant l’adaptation. Ils l’ont trouvée très éloignée de l’esprit, du rythme et de l’univers graphique des albums de Tintin. Le scénario intègre artificiellement l’intrigue du Secret de La Licorne à celle du Crabe aux pinces d’or et ne reprend quasiment aucun élément du Trésor de Rackham le Rouge, qui est pourtant la suite du Secret. L’apparence photo réaliste des personnages les rend peu expressifs, voire grotesques (les nez des Dupondt !). Leur représentation en volume et les plans surchargés de détails brouillent la  » ligne claire  » chère à Hergé. Certains protagonistes des albums sont éliminés ou voient leur rôle transformé (Sakharine, personnage secondaire dans la BD, devient ainsi le méchant principal de l’histoire, à la place des frères Loiseau, escamotés) et le final de ce film d’action échevelé déçoit.

La Licorne de Spielberg n’a pas réussi à faire oublier la série télévisée d’animation produite en 1991 par les sociétés Ellipse (France) et Nelvana (Canada). Si elle a longtemps été boudée par les puristes pour la fadeur de son graphisme, elle est plus fidèle à l’oeuvre d’Hergé (le scénario a été supervisé par le tintinologue Philippe Goddin) que le film du réalisateur américain. Rediffusés à de nombreuses reprises, les 39 épisodes demeurent, par leur impact sur des générations d’enfants, la référence absolue de l’exploitation à l’écran de la licence. Le générique, où on voit Tintin et Milou courir sur place devant un cercle jaune, est devenu culte, tout comme la BO qui l’accompagne, expression musicale accomplie des thèmes de l’aventure et du danger. Le chef d’orchestre belge Dirk Brossé, qui a dirigé le concert Autour de Tintin à la Philharmonie de Paris, le 17 juin dernier, n’a pas manqué d’en faire le clou du spectacle.

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