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Selon le gouvernement Michel, la majorité des travailleurs ne sentiront pas le saut d’index

Les manifestations et grèves de ces dernières semaines ont visé les réformes du nouveau gouvernement Michel. L’opposition et les syndicats ont dans le collimateur les restrictions imposées aux travailleurs âgés et le saut d’index qui affectera le pouvoir d’achat des travailleurs et des allocataires. De source proche du gouvernement, on relativise cet effet tout en rappelant le credo de la majorité: la politique de compétitivité permettra de créer des emplois.

Le PS notamment a rapidement sorti des chiffres pour dénoncer la perte de pouvoir d’achat engendrée par le saut d’index, jusqu’à plusieurs centaines d’euros voire plusieurs milliers sur l’ensemble d’une carrière. Le gouvernement a éprouvé des difficultés à communiquer sur le contenu de ses réformes. Pour compenser le saut d’index, il a prévu une augmentation de la déductibilité des frais forfaitaires pour les travailleurs et ajouté 127 millions d’euros de corrections sociales à l’enveloppe bien-être pour les allocations les plus basses.

Dans l’entourage de l’équipe Michel, on souligne qu’il est difficile de mesurer quel sera l’impact de ces mesures pour les contribuables tant les profils sont différents. Mais, exemples à l’appui, on certifie que la population ne verra pas la différence.

D’abord, le projet de loi prévoyant le saut d’index unique n’est pas prêt. Sa mise en oeuvre interviendra par épisodes, probablement à partir de l’été 2015, selon les différentes formules d’application de l’indexation, et jusqu’à la mi-2017, selon l’évolution de l’inflation, pour les dernières catégories concernées. En effet, l’indexation intervient dès dépassement de l’indice-pivot pour les fonctionnaires mais de façon épisodique et partielle pour les salariés. En vertu de l’évolution de l’inflation, le saut d’index n’est pas attendu avant septembre 2015 pour les traitements des fonctionnaires. En revanche, les indexations (très relatives) prévues dès janvier pour les salariés de la commission paritaire des employés (CP 218) auront quant à elles bien lieu. Et les travailleurs qui font valoir les frais forfaitaires (la toute grande majorité, seulement 3% de salariés déclarant des frais réels), bénéficieront dès janvier d’une baisse d’impôt partielle, cette mesure prenant ensuite cours pleinement en 2016. L’effet du saut d’index compensé ne peut donc être mesuré qu’à partir de 2016.

Qu’en sera-t-il? Le gouvernement ne souhaite pas s’avancer sur une série de profils bien définis mais il met en avant des chiffres qui représentent des « ordres de grandeur » à titre indicatif sur une base annuelle de 13 mois en 2016. Ainsi, un menuisier marié (conjoint « avec revenus » sans autre précision influençant le quotient conjugal, et sans enfants) gagnant un salaire mensuel de 1.233 nets (1.500 euros bruts) aurait en principe eu en 2016 un gain (annuel) de 197 euros si son salaire avait été indexé. Grâce à l’augmentation des frais forfaitaires, il gagnera en réalité 223 euros nets, soit un gain net de 26 euros par rapport à un scénario d’indexation.

Un jeune maçon marié (conjoint « avec revenus » sans autre précision, et sans enfants) gagnant 1.333 euros nets par mois (salaire brut de 1.760 euros) aurait eu, en 2016, 104 euros nets « supplémentaires » (l’indexation n’est jamais qu’un rattrapage de l’augmentation de certains prix à la consommation). Grâce à la hausse des frais forfaitaires, son net augmentera de 270 euros par an. Au final, il réalise une « plus-value » de 160 euros nets sur l’année, soit 13 euros nets par mois.

Troisième exemple, un célibataire gagnant mensuellement 3.250 euros bruts, soit 1.936 euros nets par mois aurait vu son net revalorisé de 410 euros avec l’indexation sur l’année 2016. Grâce à la déduction des frais forfaitaires, il voit finalement son net augmenter de 303 euros par an. En raison du saut d’index, il perd 106 euros nets par an ou 7 euros par mois. Dans le même ordre d’idée, un fonctionnaire célibataire gagnant 3.500 euros bruts par mois (2.053 euros nets) perdrait, après les mesures, 4 euros nets par mois. En revanche, un couple plus aisé atteignant les 100.000 euros bruts par an (5.200 euros bruts mensuels pour l’un, 2.100 euros bruts pour l’autre) perdra finalement 29 euros nets par mois. Le gouvernement conclut de cela que les 77% des gens qui travaillent pour un salaire de 3.250 euros bruts par mois ou moins ne verront pas la différence, les revenus les plus bas observant même un gain net. Ceux qui ont les épaules les plus larges feront face à une baisse symbolique de leurs revenus professionnels nets.

L’équipe Michel n’intègre cependant pas dans ses calculs d’autres mesures qui affecteront le pouvoir d’achat tels que le relèvement partiel de la taxation indirecte ou le gel de l’indexation des dépenses fiscales. Trop compliqué, dit-on tout en assurant que là aussi l’effet sera très relatif.

Par ailleurs, le gouvernement ne fournit aucun chiffre concernant les plus précarisés, à savoir les allocataires bénéficiant des revenus les plus bas. Parce que, dit-on, les montants de l’enveloppe bien-être et les correctifs sociaux qui leur seront attribués doivent encore être répartis.

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