© Image Globe / JORGE DIRKX

Rock et flamingant ?

Ces dernières années, des incidents survenus notamment au Graspop, près d’Anvers, accréditent une montée des attitudes nationalistes, parfois violentes, au sein des festivals flamands.

Début des années 1980, festival de hard en Flandre avec Iron Maiden. Première surprise : le service de sécurité est tenu par des porteurs d’insignes nazis et du Vlaamse Leeuw. Malaise, même si, depuis le concert légendaire des Stones à Hyde Park en 1969, on a souvent vu bikers, Hell’s et autres blousons noirs assumer l’ordre en même temps que la provoc’ : bienvenue dans le rock. Mais les blousons bruns ?

Trente ans après cette première rencontre, un flux de témoignages accrédite une banalisation du nationalisme dans les festivals flamands. « Au Graspop, en 2008, j’ai ressenti pour la première fois des sentiments antifrancophones. J’étais au camping et, dans la tente d’à côté, il y avait des types qui, visiblement, n’étaient pas contents de notre présence. L’un d’entre eux s’est planté devant moi et, en me fixant, a commencé à déchirer le drapeau belge en proférant des insultes. Le problème, c’est que les trois quarts de la sécurité du Graspop portent un bracelet avec le Vlaamse Leeuw. » Loïc, 21 ans, grand fan de métal devant l’Eternel, n’a plus jamais remis les pieds au Graspop de Dessel, près d’Anvers, principal raout du genre en Belgique : 135 000 spectateurs en 2010. L’édition 2011 a lieu ces 24, 25 et 26 juin.

Incidents vexatoires

Un second témoignage, toujours au Graspop – qui n’a pas répondu à nos sollicitations d’interview -, celui de Louis, 18 ans, Belgo-Britannique et aussi quarteron. « En 2009, pendant le concert d’Immortal, black métal norvégien (1), j’ai eu la surprise de voir des dizaines de skinheads faire le salut nazi alors que ce groupe n’a rien à voir avec cette idéologie. Dégoûté, je suis parti et à ce moment-là, un skin m’a craché dessus […]. Le camping était parcouru par des types aux tee-shirts Vlaams Belang, l’un d’entre eux avec l’inscription – en anglais – « On est flamands, personne ne nous aime mais on s’en fout ». »

Alors, phénomène purement réservé au Graspop ? Pas sûr. D’autres incidents vexatoires pour les francophones ont lieu ci et là, dans d’autres festivals, particulièrement dans les campings qui évoquent des zones de peu de droit. Y compris à Werchter. Contacté, le festival, très fréquenté par les francophones, botte en touche et nous répond par e-mail : « La musique unit. » […] Si Monsieur Werchter, l’Open VLD Schueremans, et son équivalent du Pukkelpop, Chokri Mahassine, député flamand SP.A, ne prônent pas le nationalisme exacerbé, on constate une forme de laisser-aller qui tend au fameux droit du sol. A contrario, en terre wallonne de Dour, où le festival accueille autant de francophones que de Flamands, le patron Carlo di Antonio dément toute forme de friction linguistique : « Jamais, je n’ai entendu pareille chose à Dour, ce n’est pas le genre de la maison. » L’été sera chaud ou ne sera pas.

PHILIPPE CORNET (1) Sous genre de heavy métal.

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