Abderrahim Lahlali © BELGA PHOTO NICOLAS MAETERLINCK

Rapatriement de 10 enfants de combattants belges en Syrie: les parents vont en appel

Les parents des 10 enfants qui doivent recevoir une assistance consulaire ainsi que des documents de voyage en vue de leur rapatriement en Belgique depuis la Syrie vont en appel de la décision du juge des référés de Bruxelles, ont indiqué lundi à Belga leurs avocats, maîtres Abderrahim Lahlali et Mohamed Ozdemir. Le recours ne vise que la partie du jugement qui précise que les parents ne sont eux-mêmes pas concernés par un rapatriement.

Le 11 décembre, le juge des référés à Bruxelles avait statué que l’État belge devait fournir à ces 10 enfants l’assistance consulaire et des documents administratifs, de voyage et d’identité en vue de leur rapatriement. Celui-ci doit intervenir dans les six semaines, sous peine d’une astreinte de 5.000 euros par jour et par enfant en cas de retard dans l’exécution de la décision, précisait le jugement.

Il s’agit des enfants des combattantes Nadia Baghouri, Jessie Van Eetvelde et Sabah Hammani, et du combattant Adel Mezroui. Les femmes et les 10 enfants séjournent dans le camp de réfugiés d’Al-Hol, en dehors de la zone actuellement occupée par les Turcs en Syrie. Adel Mezroui est, lui, détenu dans la prison kurde d’Al-Hasakah sans assistance médicale.

« Nous n’allons pas en appel contre la partie du jugement relative aux enfants », précise maître Abderrahim Lahlali. « Nous considérons que les droits découlant de la décision à l’égard des enfants sont acquis et notre appel ne change rien au fait que le gouvernement doit exécuter le jugement à l’égard des enfants, sous peine d’amende. »

L’État a décidé de ne pas interjeter appel, avait annoncé mercredi passé le ministre des Affaires étrangères Philippe Goffin. Ce dernier a ajouté que le ministère étudiait la façon de se conformer à la décision.

« Cette communication ambiguë a joué dans le fait que nous fassions appel », pointe Me Lahlali. »Le gouvernement maintient le flou sur les étapes du processus de rapatriement. Les autorités nous ont ainsi contactés pour qu’on leur transmette des photos récentes des enfants, afin de préparer leurs documents d’identité. L’État belge travaille donc activement à l’exécution de la décision de justice mais ne communique pas à ce sujet et ne nous tient pas au courant. De plus, les enfants doivent être accompagnés pour leur retour mais on ne sait pas si une ONG internationale est disposée à le faire, si les mineurs sont séparés de leurs parents », souligne lundi Me Lahlali.

Par ailleurs, le juge bruxellois a estimé que les parents ne pouvaient pas avoir recours à l’assistance consulaire parce qu’ils étaient entrés de leur propre chef dans une zone de conflit. « Cette loi a cependant été adoptée fin 2018, alors que nos clients sont partis avant », poursuit l’avocat. « Cela peut-il leur être appliqué ? En outre, la décision du juge des référés conduirait à la séparation des parents et des enfants ce qui est contraire à la Convention sur les droits des enfants ».

L’article 9 de la Convention sur les droits des enfants prévoit que l’Etat belge doit garantir que les enfants ne soient pas séparés de leurs parents sauf si cette séparation est nécessaire et dans l’intérêt des enfants, par exemple en cas de maltraitance ou de négligence de l’enfant par les parents.

« Selon le juge des référés, il est question ici de négligence à divers degrés mais il ne le prouve pas », explique l’avocat Lahlali. « Neuf enfants sur 10 sont nés en Syrie et n’ont donc pas été ramenés en zone de conflit et par ailleurs, il n’existe pas de ‘négligence à divers degrés’. Il y a de la négligence ou il n’y en a pas. Enfin, même si les enfants étaient séparés de leurs parents, l’Etat doit garantir un contact régulier entre les deux parties. Comment cela se fera-t-il si les parents se trouvent en Syrie? »

Toujours selon l’avocat, une séparation des enfants avec leurs parents mettrait également en péril le bien-être personnel et le développement des enfants.

Le recours a été déposé lundi, aucun calendrier n’a encore été établi concernant le traitement de l’affaire.

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