Carte blanche

Quand les projets du ministre de l’Intégration sociale créent une machine à exclure…

Le ministre de l’Intégration sociale Willy Borsus envisage de rendre obligatoire la conclusion d’un contrat entre le CPAS et chaque personne en demande d’aide, sous peine de sanction ou d’exclusion. Comble du cynisme, il prétend que ce contrat aidera les plus fragiles. Or, tant les mots utilisés que les dispositions envisagées sont d’une violence sociale encore rarement rencontrée.

Alors qu’un nouveau scandale d’évasion fiscale fait actuellement la Une de tous les médias, le gouvernement fédéral continue sa politique de ‘deux poids, deux mesures’ en s’attaquant à nouveau aux plus fragiles. Il poursuit dès lors son attitude lâche de faible avec les puissants et de fort avec les faibles.

Comment peut-on imaginer que toutes les personnes qui frappent un jour à la porte d’un CPAS, dans des situations de détresse parfois extrêmes et dans l’impossibilité de subvenir à leurs besoins élémentaires et à ceux de leurs enfants, soient en capacité de signer un tel contrat et d’en assumer toutes les conséquences ? Comment peut-on imaginer que ce contrat soit la solution à toutes leurs difficultés et à leur inclusion sur un marché du travail où les emplois disponibles sont beaucoup trop rares, y compris pour les plus qualifiés ?

Obliger la conclusion d’un tel contrat revient en outre à considérer que les travailleurs sociaux seraient incapables de soutenir et d’accompagner les personnes qui demandent l’aide du CPAS et qui bénéficient du revenu minimal (RIS), alors qu’ils développent d’ores et déjà des trésors de patience et d’efforts pour trouver les bons moyens avec les intéressés pour les aider à sortir de la situation qu’ils vivent.

Un travailleur social a pour mission d’aider la personne en difficulté à (re)construire un projet de vie. Identifier avec elle les problèmes, les besoins d’aide, de soutien et de formation, fixer des objectifs à atteindre et entamer un processus de co-création… Ce cheminement peut évidemment faire partie d’un plan individualisé, négocié et validé par les deux parties. Mais vouloir un contrat signé pour toutes et tous, qui ne supporte aucune erreur ou manquement sous peine d’exclusion et de perte de revenus, et qui ne prend pas en considération la situation particulière de la personne ou l’état du marché de l’emploi dans sa région, revient simplement à créer une machine à exclure. Exclure à nouveau les plus faibles, celles ou ceux qui ne rentrent pas dans le bon ‘modèle’. Et peu importe ce qu’ils deviendront.

Un contrat n’a de valeur que quand il réunit des parties qui sont en relation d’égalité. Or, ce que proposent le Ministre Borsus et le Gouvernement fédéral est un contrat « marche ou crève » avec des attentes normées de ce que doit être la « bonne intégration » pour chacun, et des termes particulièrement stigmatisants pour celles et ceux qui sont contraints de demander cette aide.

Ecolo attend plutôt du ministre de l’Intégration sociale qu’il renforce les moyens humains des CPAS. Les travailleurs sociaux pourront ainsi prendre le temps nécessaire pour remplir leur mission aux côtés des plus démunis de notre société, les accompagner et nouer des partenariats avec les autres acteurs sociaux, économiques et relationnels.

Ecolo attend également du ministre de l’Intégration sociale qu’il permette à l’aide et à l’action sociale de se concrétiser dans la construction d’un projet de vie, avec ses phases d’essais et erreurs, et non dans la menace de l’exclusion.

Ecolo attend enfin de la majorité fédérale qu’elle assure les moyens de la solidarité interpersonnelle via la sécurité sociale, plutôt que de s’attaquer systématiquement aux plus fragiles. Qu’elle permette à davantage de personnes d’avoir accès à l’emploi, via des investissements efficaces et bien proportionnés dans le fonctionnement de l’économie, et un meilleur partage de l’emploi disponible.

Quand la logique d’exclusion et de stigmatisation l’emporte sur la volonté d’aider les personnes les plus démunies, le mépris et la honte sont tout près et menacent gravement le vivre ensemble. Ce même vivre ensemble qui revient pourtant dans un grand nombre de discours de membres de la majorité. Il est urgent de passer de la parole aux actes !

Muriel Gerkens et Georges Gilkinet, députés fédéraux Ecolo

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