Etienne Dujardin

PSgate : Mettons fin à la gangrène qui pollue le politique

Etienne Dujardin Juriste et élu conseiller communal MR à Woluwe-Saint-Pierre

On croyait avoir vu le pire en 2005, mais non. Depuis, il y a eu Publifin et maintenant le scandale écoeurant du Samusocial. On nous avait promis le grand nettoyage, mais la chasse aux parvenus n’est jamais arrivée.

A l’époque, Paul Magnette avait même quitté son poste à l’université pour accélérer le renouveau du parti. On voit aujourd’hui le résultat. Il a occupé les plus hautes fonctions au sein du parti, y compris la Présidence et rien n’a changé. Pourquoi Paul Magnette et Elio Di Rupo réussiraient-ils demain ce qu’ils ont raté hier ? Ont-ils échoué par incompétence ou par manque de courage ? Je ne le crois pas. Le parti socialiste est irréformable en l’état, il a tout dominé depuis 30 ans dans la partie francophone et ne pourra pas se réformer sans une réelle cure d’opposition. Le renouveau est à ce prix.

En effet, le parti socialiste ne se rend pas compte de l’ampleur de la crise profonde qu’il traverse. Ce n’est pas seulement une crise liée aux rémunérations ou au cumul des mandats, c’est une crise profonde et structurelle à laquelle il n’apporte pas les réponses attendues. Tous les trois mois, nous assistons à une nouvelle crise et celle-ci n’est probablement pas la dernière. En effet, les socialistes pourront adopter n’importe quel nouveau règlement en matière de déclaration des fonctions ou de décumul, ils ne pourront changer en quelques mois leur culture politique intrinsèque. Celle des subsides distribués sans retenue aux ASBL « amies », des jobs aux amis du parti ou à la famille des élus, des places dans les écoles ou crèches grâce à la carte du parti, des fonctions électives aux rejetons des barons. Cette culture des privilèges partisans existe dans d’autres partis traditionnels, mais à une moindre mesure. Encore récemment, je découvrais que « Présence et Action Culturelles » liée au parti socialiste avait 50 personnes à son service. Ces dernières sont rémunérées via le mécanisme des subsides octroyés via le décret « éducation-permanente » alors qu’il s’agit très clairement d’un bras militant du PS. Tous ces subsides devraient purement et simplement être supprimés, et ce, pour tous les partis, car ils reçoivent déjà une dotation annuelle pour leur fonctionnement. De même, les rétrocessions des salaires des élus ou des jetons de présence au parti devraient être interdits.

Ce n’est pas pour rien que le New York Times s’inquiétait cette semaine dans « la faiblesse de la démocratie belge », de l’étendue de la corruption facilitée par la complexification du pays, de la faiblesse des partis traditionnels qui se sont tus ou n’ont pas trop posé de questions dérangeantes durant des années. Je veux bien, en effet, que Monsieur Mayeur n’ait pas voulu que la Région bruxelloise mette trop son nez dans ses affaires au Samusocial, mais comment le gouvernement bruxellois ou l’opposition n’a pas réussi à lui imposer un cadre de transparence alors que cette ASBL reçoit des millions d’euros par an de subsides ?

Pour recréer de la confiance, il faut des réformes structurelles. À situation de choc, il faut une thérapie de choc. Il faut revoir le nombre de jetons de présence possibles et leur montant ? Comment se fait-il que d’obscurs conseillers de cabinets ministériels gagnent parfois plus que des députés de par l’ensemble de leur cumul ? Comment se fait-il que des journalistes doivent enquêter pendant des jours pour vérifier si des logements du CPAS n’ont pas été donnés à tel enfant de députés ou telles fonctions à la fille de telle ex-ministre ? Tous ces éléments devraient être transparents et publics.

Créer le renouveau politique, c’est aussi mettre fin à la lasagne institutionnelle qui fait qu’aujourd’hui pour la simple inauguration d’une plate-forme dans un parc vous avez parfois 3 ministres, 10 collaborateurs, 20 conseillers communaux présents, soit parfois plus que le nombre de citoyens heureux de participer à cet événement de première importance. Il faut rationaliser cela, tout comme il faut se poser la question de la suppression des provinces, de la communauté française, de multiples intercommunaux et autres organismes publics. Il faut dégraisser le mammouth de la politique belge. Il est temps, par ailleurs, que les politiques assument leurs responsabilités. Je ne comprends pas pourquoi un ministre qui est en charge de la mobilité depuis des années et qui doit fermer des tunnels importants de la capitale, faute de prévoyance, ne se pose même pas la question d’une démission. Et nous pourrions citer d’autres exemples du même type…

Le constat peut sembler dur. Cependant, je pense que si la presse internationale est si sévère avec notre pays aujourd’hui, c’est que certaines questions se posent. Au lieu de se lamenter, de crier au complot, cela peut être l’occasion d’un sursaut bénéfique à la démocratie. Cependant, la politique est l’un des secteurs qui résistent le plus, il ne bouge que suite à la création de rapport de force. Il est peut-être temps que tous ceux qui souhaitent, tant à l’intérieur des partis qu’au sein de la société civile, se lèvent pour apporter un souffle nouveau. Sans cela, je pense que le même article aurait pu être écrit il y a 10 ans et pourra l’être encore dans 10 ans.

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