Walter Pauli

Pouvoir mieux faire que les politiques professionnels?

Walter Pauli Walter Pauli est journaliste au Knack.

Notre confrère de Knack Walter Pauli se demande si la politique ne doit pas changer fondamentalement de mode de pensée après la proposition du fiscaliste Michel Maus de fonder un nouveau parti de technocrates.

Cette semaine, le quotidien De Morgen relayait que le professeur et fiscaliste Michel Maus envisage de fonder un parti uniquement composé de professeurs.

Michel Maus n’est évidemment pas le premier académicien à penser pouvoir mieux faire que les politiques professionnels. Il a des prédécesseurs dans tout le spectre politique, du libertaire de droite Pim Fortuyn (ancien professeur en sociologie à l’université Erasmus de Rotterdam) au modéré de gauche Romani Prodi (ancien professeur en organisation et politique industrielles à l’université de Bologne). Voilà déjà un argument qui plaide en faveur de ce professeur de droit fiscal aux universités de Bruxelles, d’Anvers et de Gand : son ambition est honorable.

Il est difficile de cataloguer Michel Maus politiquement. En 2012, il a été brièvement lié au cabinet du socialiste flamand John Crombez, ce qui ne l’a pas empêché depuis de s’en prendre aux socialistes. Peu importe pour Michel Maus que la politique soit de gauche ou de droite, il aspire à une fiscalité efficace et honnête.

Est-il possible d’instaurer une fiscalité qui ne soit ni de gauche ni de droite?

C’est ce qui rend l’homme doublement intéressant. Est-il possible d’instaurer une fiscalité qui ne soit ni de gauche ni de droite? Jusqu’à un certain niveau : oui. Aujourd’hui, même un thème comme les impôts dépasse les anciens clivages entre la gauche et la droite. La plupart des contribuables aspirent en effet à la même chose : un fisc juste. Un état qui prélève des impôts fonctionnels, justes et raisonnables. Aussi, le tax shift est-il largement plébiscité. Une grande partie de la population est prête à payer des impôts corrects, mais c’est aux politiques à décider comment et pour le moment ils n’y réussissent pas.

Les partis politiques disposent-ils encore des bonnes recettes pour s’attaquer aux problèmes de notre époque?

De nombreux libéraux et membres de la N-VA s’opposent aujourd’hui aux augmentations d’impôts et les socialistes se montrent très défensifs quand on propose de baisser les charges. Les deux bords ne savent pas très bien comment s’y prendre. Pas parce qu’ils sont stupides ou malveillants, mais parce que ces visions se heurtent à leurs points de vue politiques. C’est un réflexe tenace, enraciné dans l’ADN de leur parti. Ces partis ont été fondés en réaction logique aux principaux développements sociaux du siècle passé.

Aussi faut-il s’interroger sur la pertinence de ces partis et de leurs idéologies. Disposent-ils encore des bonnes recettes pour s’attaquer aux problèmes de notre époque ? La plupart des partis constatent que l’opinion de leurs électeurs diffère de moins en moins de ceux de la concurrence, et ce sur de plus en plus de sujets. En outre, les membres d’un même parti sont de plus en plus souvent en désaccord et le message des partis convainc de moins en moins les nouveaux électeurs.

Il y a quelques années, une grande étude du sp.a révélait que les socialistes flamands sont fondamentalement divisés sur les questions politiques les plus élémentaires (y compris les socio-économiques). Ils sont liés uniquement par l’amour de leur nom et l’attachement à leur parti, ce qui n’est pas le meilleur argument pour persuader de nouveaux électeurs.

Dans ce sens, l’idée de Michel Maus est plus dans l’air du temps que de semblables appels qui ont été lancés dans le passé. Après la N-VA qui est passée d’un parti linguistique à une fédération conservatrice, il est temps que toute la Rue de la Loi s’active même si un « cabinet d’affaires » ne semble pas la bonne réponse (10 professeurs ne décident pas mieux que 10 politiques) à une question juste: la politique ne doit-elle pas modifier fondamentalement son mode de pensée ?

Guerre froide

Les anciennes idées et les règles existantes sur la séparation de l’Église et de l’État suffisent-elles pour la nouvelle société multireligieuse ? Pensons-nous vraiment pouvoir déplacer les concepts de la Guerre froide aux conflits comme l’Ukraine et l’État islamique ? Le mouvement pacifiste et les partis de gauche peuvent-ils se contenter aujourd’hui de variantes de leurs anciennes oppositions contre la course aux armements de l’époque ? Notre ordre socio-économique est-il adapté au travail du futur?

Et qu’en est-il de la relation entre le citoyen et les réseaux sociaux? Twitter et Facebook sont omniprésents, mais font la sourde oreille quand il s’agit de vie privée ou de payer des impôts dans les pays où ils opèrent.

Une société de taxis comme Uber, qui fonctionne depuis les États-Unis via les réseaux sociaux : aujourd’hui, il n’en faut pas plus pour mettre notre modèle social en péril. Là où on ne change pas les choses, tout finit par se coincer.

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