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Polémique autour des allocations aux personnes handicapées

Francis Delpérée (cdH) déplore la polémique autour des allocations aux personnes handicapées qu’il a qualifiée d’indécente, Ecolo appelle à des politiques proactives en matière d’emploi et d’allocations, et Eliane Tillieux regrette la stigmatisation des personnes souffrant d’un handicap

Dans un entretien à Humo cette semaine, Karel De Gucht, ancien ministre des Affaires étrangères et commissaire européen, avait affirmé que trop de personnes aptes à travailler bénéficiaient en Belgique des aides réservées aux handicapés. La N-VA a embrayé mercredi en suggérant que la fraude était plus importante en Wallonie.

Interrogé sur le sujet dans Matin Première sur la RTBF, Francis Delpérée s’en est vivement pris à Karel De Gucht. « Nous l’avons envoyé comme commissaire européen. De quoi se mêle-t-il ? Chacun chez soi et les vaches seront bien gardées », a-t-il dit.

A propos de la surenchère de la N-VA, le sénateur cdH estime que le parti nationaliste « joue désormais la carte de l’opposition » et « fait flèche de tout bois ».

Les problèmes de fraude à la sécurité sociale « demandent une analyse sérieuse », a-t-il poursuivi. « Mais pas de cette façon-là, c’est indécent ».

Ecolo appelle à des politiques proactives

Ecolo a dénoncé la « Xe déclaration tonitruante de Karel De Gucht » et la « malhonnête mesquinerie de la N-VA » dans la récente polémique liée aux personnes handicapées. Le parti appelle à des politiques proactives en matière d’emploi et d’allocations.

Ecolo estime que « les chiffres nationalistes sont faux : il y a 3 % de personnes handicapées en Région wallonne, 2,8% en Flandre et 1,9% en Région bruxelloise ». La N-VA avait avancé que le nombre d’allocataires était supérieur de 50% en Wallonie.

Ecolo reproche aussi à la N-VA de choisir le critère des Régions, « alors que c’est entre les provinces riches et pauvres que les disparités existent ». « Pour la NVA, le Brabant wallon avec son 1% de personnes handicapées devrait-il cesser sa solidarité avec le Limbourg et son 1,4% de personnes handicapées? » s’interroge la députée Muriel Gerkens, qui signe le communiqué.

Sur le fond, Ecolo en appelle à une politique proactive de mise à l’emploi des personnes handicapées, notamment via des discriminations positives à l’embauche et « en brisant la concurrence allocation/salaire ». Le parti préconise aussi de porter une attention particulière au niveau et au paiement à temps des différentes allocations, en notant les difficultés financières auxquelles sont confrontées les personnes handicapées.

Une stigmatisation des personnes souffrant d’un handicap

La ministre wallonne de l’Egalité des chances, Eliane Tillieux, a regretté, dans un communiqué, les propos de Karel De Gucht, estimant que ces commentaires renforçaient la stigmatisation de cette population.

Elle insiste sur « tout le travail effectué en collaboration avec le ministre fédéral de la Personne handicapée, Jean-Marc Delizée, pour lutter, au travers de politiques volontaristes contre les préjugés et la stigmatisation des personnes handicapées ».

La ministre rappelle par ailleurs que les gouvernements fédéral, des Communautés et des Régions ont chargé le 12 juillet dernier le Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme d’assurer le suivi de la Convention de l’ONU relative aux droits des personnes handicapées, ratifiée par la Belgique.

Au travers de cette convention, la Belgique réaffirme son engagement de mettre tout en oeuvre pour favoriser l’intégration à tous les niveaux des personnes handicapées et de lutter contre les préjugés et les stéréotypes, ajoute le communiqué.

Eliane Tillieux souligne encore le rôle joué par l’Agence wallonne d’intégration de la personne handicapée (AWIPH), dont elle assure la tutelle et qui est chargée de mener à bien la politique wallonne en matière d’intégration des personnes handicapées.

« Donner de la Wallonie cette image négative est une atteinte à la solidarité de tous les Wallons vis à vis des plus précarisés ou des plus démunis, à savoir les personnes souffrant d’un handicap », conclut la ministre.

Les chiffres de la N-VA « ne reflètent pas la réalité »

Le secrétaire d’Etat aux Affaires sociales chargé des Personnes handicapées, Jean-Marc Delizée, a contesté les chiffres avancés par la N-VA relatifs aux allocations versées aux personnes handicapées. Il s’indigne que ces « fausses informations » aient été relayées dans la presse.

« Les chiffres présentés par la sénatrice N-VA Helga Stevens ne reflètent pas la réalité belge », selon M Delizée. « Elle ne prend pas en compte l’ensemble des bénéficiaires d’allocations et, de plus, elle omet aussi les bénéficiaires âgés de plus de 65 ans. »

Le secrétaire d’Etat explique en outre que le volume de bénéficiaires s’équilibre, en raison notamment de la pyramide des âges et du vieillissement de la population en Flandre par rapport à la Wallonie. « L’allocation pour personne âgée est proportionnellement plus courante en Flandre », ajoute-t-il.

M. Delizée rappelle par ailleurs que l’attribution des droits à l’allocation s’opère après un contrôle médical et une enquête sociale relative aux revenus des personnes.

Et de poursuivre : « Mme Stevens dit défendre les droits des personnes en situation de handicap, même au niveau international ; dans son combat politique belge, elle promeut plutôt le sous régionalisme et déforme la réalité au profit du débat nationaliste, stigmatisant encore une fois les Wallons. »

Regrettant le débat actuel alors que le monde du handicap fait face chaque jour à des défis d’envergure, M. Delizée conclut en appelant à un vrai dialogue pour tenter « de rencontrer les difficultés vécues au quotidien par les personnes handicapées et leurs familles tant au nord qu’au sud du pays ».

Inforautisme indigné

Les déclarations de Karel De Gucht et de Helga Stevens (N-VA) « jettent une suspicion grave sur les personnes handicapées comme des profiteurs potentiels et des parasites », a déclaré l’asbl Inforautisme dans un communiqué. « Nous sommes indignés », ajoute l’asbl.

Il y aurait en Belgique 58.000 personnes autistes handicapées non reconnues comme telles, selon Inforautisme. « Lorsqu’elles sont exclues du monde de travail et d’une vie sociale normale, on les culpabilise en les soupçonnant de tricherie et de fraude. Ces déclarations nient la réalité clinique et discréditent un combat que nous menons pour leur reconnaissance », explique l’asbl.

Inforautisme préconise donc de la rigueur dans l’attribution du statut de personne handicapée « sans pour autant accabler de soupçons diffamants les personnes qui l’ont obtenu ». L’asbl réclame également des moyens en accord avec les engagements pris par les différentes autorités compétentes.

Le Vif.be, avec Belga

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