Charles Michel © BELGA

Plaidoyer pour le sens des réalités: un politicien n’est pas un magicien

Cinq mois avant les élections, les présidents des partis profitent des réceptions de nouvel An pour promettre l’impayable et parfois même l’impossible. Ils risquent de le regretter.

Depuis quelques jours, les présidents des partis promettent aux électeurs monts et merveilles. Ils se comportent comme si une force secrète leur permettait d’accomplir des miracles.

Le MR du Premier ministre Charles Michel, par exemple, promet de baisser les impôts de 4 milliards. Le président Olivier Chastel a déclaré à plusieurs journaux francophones que son parti souhaite mettre en oeuvre une réforme fiscale au cours de la prochaine législature, où l’exonération fiscale – la partie des revenus non imposée – sera relevée de 8300 à 12.500 euros. Le fait qu’un groupe d’experts du Conseil supérieur des finances travaille à un rapport sur la réforme de l’impôt des personnes physiques (et sur son coût et ses recettes) n’empêche pas les libéraux francophones de lancer quelques idées en l’air. Comment cette réduction d’impôt sera-t-elle financée et où réalisera-t-on des économies? Pas un mot à ce sujet. Hocus Pocus!

Pour Elio Di Rupo, 2019 doit être l’année du retour de son PS. Un mandat de politique de droite MR/N-VA suffit :  » L’heure est à la reconquête ». Lors de son discours du Nouvel An à Bozar, il a présenté un certain nombre de propositions ambitieuses, telles qu’une pension de 65 ans au lieu de 67, des visites gratuites chez le médecin et le dentiste, une réduction de la TVA à 6% sur l’électricité et sur les prothèses, lunettes et appareils auditifs. Les socialistes francophones non plus n’ont pas soufflé mot sur la manière dont tout cela sera financé. Bibbity bobbity bou!

Alors que les partis francophones avancent surtout des thèmes socio-économiques, le président du CD&V Wouter Beke plaide pour  » la révolution de la raison ». Selon lui, l’électeur a le choix : le CD&V ou le chaos, une formule en train de s’user. Pour Bart De Wever, président de la N-VA, le confédéralisme reste  » la plus grande ambition « , mais la participation à un gouvernement est encore plus importante, tant que ce dernier met suffisamment l’accent sur la sécurité, la migration et la politique socio-économique. De Wever poursuit ainsi une fois de plus sa stratégie 2014. Il a amené la N-VA au gouvernement fédéral, mais les résultats que le parti peut présenter sont loin d’être convaincants, certainement dans le domaine financier et économique. Combien de fois peut-on recommencer le même tour ? Abracadabra !

Les Open VLD, SP.A et Groen tiendront leur réception du Nouvel An ce week-end et on a hâte de voir ce qu’ils vont sortir de leur chapeau. Bien entendu, les réceptions du Nouvel An devraient être utilisées pour motiver et stimuler les supporters, surtout à présent que le Super Dimanche – avec les élections flamandes, fédérales et européennes – approche rapidement. Cependant, on peut s’attendre à un certain réalisme de la part des politiciens, surtout maintenant. Notre dette nationale est encore très élevée. Il y a trop peu de gens au travail. En ce qui concerne la quasi-totalité de nos performances économiques, nous sommes en queue du peloton européen. Et les perspectives ne sont pas roses. Le monde, et l’Europe en particulier, attend un fléchissement de l’économie, tandis qu’en Belgique, la facture du vieillissement ne cesse d’augmenter. Sésame ouvre-toi? Malheureusement les portes des salles du trésor ne s’ouvriront pas par une formule magique.

Les promesses impossibles à tenir des politiciens insupportent de plus en plus. Les gens se détournent de la politique. Ils descendent dans la rue vêtus de gilets jaunes pour crier leur impuissance, ils se tournent vers des frimeurs rapides, mais dangereux qui jettent encore plus de poudre aux yeux. Aussi grande que puisse être la tentation de ces jours-ci, un politicien ne devrait pas se présenter comme un magicien. Ce serait déjà pas mal de faire preuve d’un peu de réalisme. De faire de son mieux tous les jours sur les bancs du parlement ou du gouvernement, tout comme les enfants sur les bancs de l’école.

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