Osama Krayem © Capture d'écran YouTube

Osama Krayem, le deuxième homme de l’attentat à Maelbeek

Fils de Syriens exilés, il fréquentait la mosquée de son quartier, mais fumait et buvait. Et puis « c’est devenu quelqu’un d’autre ». Le Suédois Osama Krayem, soupçonné d’avoir participé aux attentats de Bruxelles, s’est brusquement radicalisé avant de partir faire le djihad en Syrie.

Osama Krayem est bien le deuxième homme visible sur les images de vidéo-surveillance du métro en compagnie de l’auteur de l’attentat à la station Maelbeek, Khalid El Bakraoui, confirme samedi le parquet fédéral. Il était également « présent » dans un centre commercial lors de l’achat des sacs qui ont servi lors de la double explosion-suicide à l’aéroport international de Bruxelles-Zaventem, selon le parquet belge. Il a été placé sous mandat d’arrêt et est inculpé de participation aux activités d’un groupe terroriste et d’assassinats terroristes.

Le juge d’instruction a également placé sous mandat d’arrêt le Rwandais Hervé B.M., né le 5 mai 1990, qui avait été interpellé vendredi en même temps qu’Osama Krayem. Il est inculpé de participation aux activités d’un groupe terroriste et de complicité d’assassinats terroristes. Vendredi soir, Bilal E. M., né le 10 mars 1989 et soupçonné d’avoir apporté de l’aide à Mohamed Abrini et Osama K., a également été placé sous mandat d’arrêt. Il est inculpé de participation aux activités d’un groupe terroriste et de complicité d’assassinats terroristes. Des perquisitions ont été menées vendredi soir, notamment au lieu de résidence possible de Mohamed Abrini, chaussée de Mons à Anderlecht, à proximité du square Albert où il a été appréhendé. Les autres opérations ont eu lieu chez Hervé B.M., rue Tivoli à Laeken, et chez Bilal E.M. rue des Palais dans le centre-ville. Samedi matin, une perquisition a été menée dans un appartement conspiratif présumé rue des Casernes à Etterbeek. Ni arme ni explosifs n’y ont été découverts, selon le parquet fédéral.

Enfant de la cité de Rosengård, à Malmö (sud), qui vit aussi grandir le footballeur Zlatan Ibrahimovic, Osama Krayem a donc été interpellé vendredi à Bruxelles. La police cherche à savoir s’il s’agit de l’individu qui s’adresse brièvement au kamikaze qui s’est fait exploser à la station Maelbeek, Khalid El Bakraoui. C’est ce même homme – encore non identifié – qui a acheté au centre commercial City 2 les sacs ayant servi au transport des bombes de l’aéroport. Osama Krayem est un pur produit du « cocktail désormais classique entre exclusion sociale, radicalisation idéologique » et criminalité, analyse Magnus Ranstorp, directeur de recherche au Centre d’études des menaces asymétriques du Collège de la défense nationale suédoise (CATS), qui le connaît bien. A Malmö, il est pourtant décrit comme un jeune homme ordinaire des quartiers populaires, dont le quotidien oisif et délinquant s’écoule entre ablutions et consommation de stupéfiants. « Il fréquentait la mosquée avec ses amis, comme d’habitude. Il priait cinq fois par jour, personne ne soupçonnait qu’il pourrait partir en Syrie pour se battre », confie un proche de la famille au quotidien Aftonbladet. « Il vient d’une famille ordinaire de musulmans suédois. Son papa n’approuve pas et sa maman est si triste depuis son départ qu’elle est tombée malade », confie cet homme.

Un ami d’Osama Krayem raconte qu’il menait grand train dans le quartier de Seved réputé pour ses trafics. Mais il avait pris des habitudes plus saines depuis qu’il avait commencé à travailler, dans le cadre d’un programme de formation de l’agence pour l’emploi, dans les centres de loisirs de la ville de Malmö. Il y est resté un an, avant de prendre le chemin du djihad en Syrie, pays de ses parents exilés. Sa radicalisation est venue « soudainement, de façon inattendue », selon un autre proche contacté par le quotidien Sydsvenskan. « Dans les deux ou trois mois avant son départ, il a cessé de voir ses amis. Il écoutait des prêches d’imams sur son téléphone portable, il laissait pousser sa barbe. C’est devenu quelqu’un d’autre », confie un autre ami. Selon Magnus Ranstorp, Osama Krayem a été fortement impressionné par les prêches d’Anwar al-Awlaki, imam américain d’ascendance yéménite, ancien responsable d’Al-Qaïda dans la péninsule arabique (Aqpa), tué par un drone en 2011. Avant son départ pour la Syrie, il avait « essayé de recruter » des fidèles fréquentant la même mosquée, affirme le chercheur. Krayem disparaît du jour au lendemain début 2015.

En janvier, il pose sur Facebook en tenue de combat, une kalachnikov à la main, drapeau de l’organisation Etat islamique (EI) en arrière-plan. Les photos auraient été prises à Deir Ezzor, en Syrie, chef-lieu de la province éponyme frontalière de l’Irak, contrôlée à 60% par les djihadistes de l’EI. Les enquêteurs ont retracé son parcours après son séjour syrien. Le 20 septembre, il s’enregistre sous le nom de Naïm Al Hamed sur l’île grecque de Leros. Début octobre à Ulm, en Allemagne, une voiture louée par Salah Abdeslam le récupère. Pour Magnus Ranstorp, Osama Krayem confirme la « connexion » avérée par le passé entre Suédois radicalisés et filières belges. Mohamed Belkaïd, un Algérien de 35 ans établi en Suède, a été abattu une semaine avant les attentats de Bruxelles dans un appartement de Forest où ont également été retrouvées des empreintes de Salah Abdeslam. En 2010, Taymour Abdel Wahab, un Suédois né en Irak, se faisait exploser dans une rue commerçante de Stockholm dans un attentat visiblement raté. Il portait sur lui une carte d’identité belge.

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