Thierry Fiorilli

On aurait aimé que le gouvernement entreprenne enfin une vraie réforme

Thierry Fiorilli Journaliste

L’aggiornamento que l’on pouvait attendre n’a pas eu lieu et je crains qu’il n’ait pas lieu. L’équilibre dans ce gouvernement risque de faire en sorte qu’aucun des partenaires n’ose venir avec une idée saillante qui fasse changer les choses.

Je ne vois pas de vision cohérente de réforme de l’Etat providence. Quitte à se faire vraiment hara-kiri, on aurait aimé que le gouvernement entreprenne enfin une vraie réforme de la fiscalité et de la sécurité sociale afin de rendre l’une et l’autre plus efficaces.

Nous sommes dans la continuité du gouvernement précédent et de ses prédécesseurs. Mais il s’agit d’une accentuation et avec des orientations qu’on peut qualifier de néolibérales et conservatrices.

Quitte à se faire hara-kiri, on aurait aimé que le gouvernement entreprenne enfin une vraie réforme

Trois réflexions d’experts ayant décortiqué, pour Le Vif/L’Express, le programme gouvernemental de la nouvelle coalition fédérale. Trois opinions qui résument bien le sentiment de tout observateur vierge d’intérêts partisans : la véritable nouveauté véhiculée par l’exécutif Michel, c’est sa nature : sans le PS et avec la N-VA. Pour le reste, on navigue soit dans ce qui était attendu (des mesures plutôt de droite, dans la plupart des secteurs), soit dans ce qui était inévitable (des économies à faire, partout).

Mais pour ce qui est de plans à long terme, de vraies réformes, de paris pouvant générer développement et prospérité générale, on repassera. Comme c’était déjà le cas sous l’attelage Di Rupo. Comme ce sera le cas, semble-t-il déjà, avec l’actuel gouvernement wallon, dont les deux premières années s’annoncent exclusivement vouées aux sacrifices impératifs – on attendra un peu avant de juger la capacité d’innovation et d’inventivité de son homologue bruxellois, dont les objectifs semblent plus ambitieux.

Pour autant, ce discours n’est pas forcément amer. Il se veut seulement lucide. Confirmant ce que clament beaucoup (et nous en sommes, depuis longtemps) : gouverner aujourd’hui dans un pays occidental ne revient plus qu’à trouver les moyens de réduire encore tous les budgets, de se montrer inflexible en matière d’immigration et de sécurité, et à promettre de combattre le chômage sans jamais en avoir vraiment les moyens. Ou alors en précarisant l’ensemble de la société. C’est injuste pour ceux qui étendent le système d’assurance-maladie ou qui imposent le droit au mariage pour tous mais ils ne sont jugés que sur leurs performances socio-économiques.

Le gouvernement Michel n’est dès lors pas le seul ni le premier à manquer de véritable vision pour notre économie, nos atouts, les secteurs sur lesquels il faudrait miser à fond quitte à en déserter d’autres pour de bon. Mais puisqu’il n’a cessé de répéter, dès avant sa formation, que la législature serait exclusivement « socio-économique », c’est fâcheux.

Déjà accueilli avec beaucoup de scepticisme vu l’incroyable faiblesse de représentativité francophone en son sein, déjà suspect des pires complots au regard de la présence de la N-VA dans ses rangs, déjà soumis à rude épreuve en termes de crédibilité après des débuts pour le moins désastreux dans le chef de plusieurs de ses ministres, l’équipage aux commandes fédérales apparaît aussi, un mois après sa constitution, d’une très grande fragilité. Parce que guère cohérent et somme toute très peu audacieux. A un moment pourtant crucial.

Comme si le vrai changement qu’il est censé incarner ne résidait qu’en sa seule occupation du pouvoir.

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