Carte blanche

Obligeons-les enfin à répartir les richesses que nous produisons

Le gérant d’un bar montois exprime sa colère sur sa façade et appelle à la mobilisation contre l’évasion fiscale.

Après 73 jours de fermeture, « La Vie est Belge », un bar situé sur la Grand Place de Mons (et donc touché de plein fouet par la situation désastreuse due au covid-19) a installé une bâche sur sa façade pour dénoncer l’évasion fiscale en Belgique (et partout ailleurs dans le monde) et ses conséquences directes et indirectes sur la crise que nous vivons actuellement, tant au niveau de l’hôpital qu’au niveau économique.

Directement touché, le patron de l’établissement souhaite exprimer sa démarche.

Dans notre pays, environ 200 milliards d’euros « s’envolent » chaque année pour se disperser sur des comptes au sein de paradis fiscaux avec la bénédiction de nos dirigeants. En 2019, uniquement pour la Belgique, quelque 790 entreprises ou personnes morales ont déclaré des versements de plus de 100 000 euros hors de notre pays. Les destinations privilégiées de ces « exils financiers » sont les Émirats Arabes Unis, l’Ouzbékistan, les Îles Caïmans, les Bermudes et le Turkménistan, entre autre. C’est de cette « légale » manière que plus d’un tiers du PIB belge s’est envolé sous forme de virements, au vu et au su de tous. Et nous ne parlons là que de ce qui est fait de manière officielle. L’exil non officiel est, par définition, incalculable. Il est donc difficile de dire combien l’Etat a perdu sur ces milliards mais on pourrait imaginer un taux d’imposition tournant autour des 30%. Ce montant est énorme et invisible. Il est impossible de chiffrer précisément son ampleur ; de 7 milliards d’euros par an, selon la Banque nationale de Belgique à 30 milliards, selon John Crombez, l’ancien secrétaire d’État à la lutte contre la fraude fiscale et sociale. À titre de comparaison, ces sommes équivalent au budget annuel de l’enseignement ou de la santé.

Aujourd’hui, et depuis maintenant plus de deux mois, nous sommes tous impactés par le covid-19, que ce soit mentalement, physiquement, socialement ou encore financièrement parlant.

Concernant la population ; les pertes de revenus ou d’emplois, la peur pour nos proches ou pour nous-même, les informations brèves, incohérentes, prises au dernier moment, complexes pour certaines, changeantes en permanence (pénurie de masques, pas obligatoires, obligatoires mais introuvables, prix exorbitants, …), etc. n’aident pas à rassurer et créent un climat d’anxiété permanent.

Gouverner c’est prévoir, le meilleur comme le pire. Ce n’est pas se contenter de couper dans tous les budgets, de plan d’austérité en plan d’austérité au point d’en arriver à la situation actuelle.

Je me dois aussi de parler du personnel soignant qui est parti au front (puisque visiblement nous sommes en guerre) quasiment sans protections, en totale improvisation et le tout avec un manque d’effectifs considérable et déconsidéré (sous-payés et surexploités) alors que nos « dirigeants » étaient déjà largement au courant avant même l’arrivée du virus. Toutes les conditions étaient réunies pour que ça se termine en catastrophe.

Comme le dénonce le collectif « La santé en lutte » et bien d’autres, nous avons pu constater que l’Etat ne finance pas comme il se doit les hôpitaux, les maisons de repos et le système de santé de manière générale et systématique. Tout ceci a contribué au nombre de morts extrêmement élevé dans notre pays. Et tous les applaudissements du monde n’y changeront rien.

Nous pouvons également constater que les petits indépendants sont quasiment abandonnés par l’Etat alors qu’ils participent grandement à l’économie du pays. Il y a bien eu quelques promesses mais peu d’actions concrètes. En Wallonie, penser qu’une prime unique de 5000€ suffira pour des mois de fermeture c’est ne pas réaliser qu’une grande partie des commerçants et autres petites structures tenaient déjà leur activité à bout de bras et une somme aussi dérisoire pour un laps de temps aussi long est simplement surréaliste.

Comment payer immédiatement les loyers et les charges non reportables (fournisseurs, assurances, eau, gaz, électricité, Bancontact, internet, téléphone, télévision, Sabam et autres abonnements divers) ainsi qu’accumuler une série de charges et d’impôts postposables mais toujours dus (TVA, lois sociales, taxes communales, régionales, précompte immobilier, …) avec une somme aussi faible ?

C’est la faillite assurée à plus ou moins court terme pour ceux qui auront la « chance » de pouvoir essayer de relancer leur activité dès que l’Etat et leurs experts le leur permettront (« experts » qui, visiblement, en fonction des pays et des moments optent tous pour des décisions différentes…) Pour clôturer le sujet, à titre informatif et selon les chiffres officiels, en Wallonie, moins d’un quart des ayants droit ont déjà touché cette « aide ». Pour les autres, et nous y compris, débrouillez-vous !

En conclusion, il est plus que temps de nous mobiliser !

C’est pourquoi, dès que cette crise sera derrière nous, tous les secteurs confondus devront s’unir pour exprimer le fait que nous exigeons des changements radicaux afin que les priorités de ceux qui nous dirigent changent du tout au tout.

Faisons de cette catastrophe une chance de pouvoir nous rassembler afin de rebâtir une société plus juste, plus égalitaire et plus humaine. Ne nous laissons pas à nouveau berner par leurs belles paroles.

Obligeons-les enfin à répartir les richesses que nous produisons pour le bien commun et non pour le profit de quelques-uns.

Soignants, indépendants, salariés, ouvriers, travailleurs précaires, retraités, chômeurs, étudiants, nous sommes tous dans le même bateau, liés les uns aux autres. Cessons de les laisser nous diviser ; luttons ensemble pour des lendemains meilleurs et appliquons enfin notre devise : « L’Union fait la force »

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