Le rassemblement "Nuit Debout", à Bruxelles © BELGA

Nuit debout : les citoyens parlent aux citoyens

Stagiaire Le Vif

Le mouvement  » Nuit Debout « , né en France dans la foulée des mouvements sociaux opposés à la Loi El Khomri, cherche à réinventer la démocratie. Hier soir, Place des Barricades à Bruxelles, des citoyens ont aussi décidé passer la nuit debout. Retour sur l’aube d’un mouvement citoyen.

Ils se sont donné rendez-vous vers 19 h, et sont maintenant entre 200 et 300 rassemblés autour d’une sono posée sur une chaise. Le son passe mal, alors les premiers rangs s’assoient pour le laisser atteindre les derniers rangs. Dans une foule majoritairement jeune, les moins jeunes n’ont toutefois pas manqué à l’appel. Il y a aussi des parents, parfois venus avec leurs enfants. « Ces questions les concernent aussi », entendra-t-on plusieurs fois au cours de la soirée. Sur le bord de la place, des personnes filment l’évènement, qui est retransmis en direct sur l’application Periscope.

L’assemblée générale de la « Nuit Debout » se veut un espace de discussion ouvert où chacun peut prendre la parole à tour de rôle, sans être plié à un agenda. C’est ainsi que le débat prend des directions multiples. Certains abordent des sujets précis qui leur tiennent plus particulièrement à coeur, invitant les personnes sensibles à ces thématiques à se rassembler en comités par la suite pour les approfondir et réfléchir à des propositions de solutions concrètes. D’autres insistent sur l’importance de mieux organiser les débats, les rendez-vous, et les prises de décisions. Quelques personnes présentes aux « Nuits Debouts » de la Place de la République, à Paris, ont fait le déplacement pour faire part de leur expérience. Un jeune homme se propose pour prendre en charge, du moins temporairement, les tours de paroles. Ce qu’une majorité de personnes de l’assemblée approuve en agitant leurs mais au-dessus de leur tête. Un code gestuel que l’on retrouvait déjà dans le mouvement des « Indignés » espagnols et qui comporte l’avantage de manifester son accord ou désaccord sans interrompre la personne au micro.

Chaque décision étant soumise au vote de l’assemblée, le processus de décision est lent. Un homme s’avance. Il invite les participants à trouver « leur Loi El Khomri », à focaliser les débats sur des sujets politiques plus concrets. « Ça m’énerve d’entendre dire qu’il faut être efficace », réplique une intervenante, en ajoutant que « toutes ces questions de forme, comment on parle, comment on s’exprime, elles sont importantes, car elles sont déjà politiques ». Une des premières décisions majeures de la soirée sera d’ailleurs de trouver un lieu capable d’accueillir le rassemblement dans les jours à venir, la Place des Barricades étant jugée trop isolée par une partie de l’assemblée. Alors on propose et on rediscute. Parmi les endroits soumis au vote, le parc de la Porte de Halle, le Mont des Arts, ou encore la Place Lumumba. Les débats sont lancés, et suscitent inévitablement quelques désaccords et frustrations. « Je pense qu’on est OK pour dire qu’on différencie les personnes des idées. Si quelqu’un n’est pas d’accord avec une idée, il ne s’oppose pas à la personne, et cette personne n’a pas à se sentir attaquée », rappelle-t-on. « Si on est bienveillants tous ensemble, on va arriver à faire quelque chose cette nuit et les nuits prochaines ». L’assemblée semble d’accord. Le Mont des Arts sera finalement désigné comme lieu de rendez-vous pour le lendemain.

L’enthousiasme est en tout cas palpable. Cette première rencontre aura été l’occasion de prendre la température des aspirations des participants, et de souligner un besoin de retisser du lien social. Il n’apparaît pas ici de revendication concrète et unique, mais une volonté de poser les mots sur un malaise, d’afficher un refus. Pour mieux réinventer ensuite les bases de la vie de Citée. La première « Nuit Debout » bruxelloise a vécu, elle compte bien maintenant jouer les prolongations.

Arthur Sente (stg.)

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