Olivier Mouton

Nucléaire: et si Charles Michel disait la vérité…

Olivier Mouton Journaliste

L’hypothèse de la construction d’une nouvelle centrale écartée ? La Suédoise, embarrassée par son Pacte énergétique, devrait oser dire que la sortie du nucléaire en 2025 est impossible.

Le gouvernement a-t-il mis à l’étude la construction d’une nouvelle centrale nucléaire ? C’était ce qu’annonçait ce matin nos confrères de La Libre : l’université de Gand et le Bureau du Plan sont chargés de ce travail. Un revirement, alors que le scénario était jusqu’ici de confirmer la sortie du nucléaire en 2025 ? L’information a suscité une énième fois la fureur de l’opposition, déjà échaudée par l’affaire Francken. « L’agenda caché du gouvernement ? », s’interroge Michel de Lamotte (CDH). « Encore un revers pour le Premier ministre fantôme ? », ironise Karine Lalieux (PS). Pour couper l’herbe sous le pied de la rumeur, le président du MR, Olivier Chastel, a précisé qu’il s’agissait de démontrer qu’une telle hypothèse était « impayable ». Réuni ce matin, le Kern (Conseil des ministres restreint) a confirmé que l’option ne serait pas étudiée. Le scénario de la construction d’une nouvelle centrale nucléaire en 2040 est purement théorique, il s’agit d’un point de comparaison », a dit Marie-Christine Marghem (MR), ministre fédérale de l’Energie.

Mais à quoi joue donc la Suédoise ? Le contexte est, il est vrai, particulier. Le gouvernement fédéral peine à élaborer le Pacte énergétique qu’il s’était pourtant engagé à finaliser en 2017. Ce texte doit prévoir les moyens pour assurer la sortie du nucléaire en 2025. Ce retard est dû à la N-VA, dont la position est, cette fois, compréhensible : le parti nationaliste a demandé que l’on chiffre plus sérieusement l’épure rédigée par Marie-Christine Marghem (MR) en concertation avec les trois ministres régionaux de l’Energie (Jean-Luc Crucke, MR, Wallonie, Celine Frémault, CDH, Bruxelles, Bart Tommelein, Open VLD, Flandre). Bart De Wever, président de la N-VA, a même affirmé son rejet de la sortie du nucléaire à l’échéance annoncée, affirmant que le sujet serait l’un des enjeux de la campagne des prochaines législatives du 26 mai 2019 (si la majorité tient jusque-là…). Dans ce dossier comme dans d’autres, on attend désormais la version finale du texte.

Délicate, le sujet de la sortie du nucléaire en 2025 avait déjà suscité des discussions tendues lors des négociations de formation du gouvernement, en 2014. La N-VA était déjà réservée sur cet engagement, mais le dossier ne constituait pas alors une priorité pour les nationalistes, confient des sources directement liées aux négociations. Au sein du MR aussi, certains se demandaient alors si cet objectif était tenable. Et pour cause : nous sommes très loin, aujourd’hui encore, d’avoir prévu les alternatives nécessaires. Et le marché, dans cette incertitude, attend… Le débat, qui n’avait pas été complètement tranché, resurgit à l’occasion du Pacte énergétique. Un expert réputé comme Damien Ernst, de l’université de Liège, défend la thèse selon laquelle l’agenda de 2025 est intenable.

Au sein du MR aussi, certains se posent toujours de sérieuses questions à ce sujet. Le Premier ministre, Charles Michel, serait avant tout motivé par la nécessité de ne pas se contredire… et de ne pas faire un cadeau d’envergure aux écologistes d’ici les élections. Ce serait pourtant écrit dans les astres, certains réacteurs devront bel et bien être prolongés, une décision qui serait annoncée après le scrutin. Alors que la Belgique n’a jamais brillé par une politique énergétique ambitieuse et cohérente, ne serait-ce toutefois pas judicieux d’oser un discours vérité ? Non, on ne pourra pas sortir du nucléaire en 2025. Oui, des mesures transitoires devront être prévues. Mais oui, tout est mis en oeuvre pour que la Belgique soit, en 2030, un modèle en matière d’énergies renouvelables.

Gageons toutefois que tel ne sera pas le contenu audacieux du Pacte énergétique…

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