Wouter Beke, président du CD&V. © Belga

Négocier avec les chrétiens-démocrates? « Un chemin de croix »

François Brabant
François Brabant Journaliste politique au Vif/L'Express

Voici deux semaines déjà, on pensait la formation du gouvernement fédéral imminente. L’officialisation de la nouvelle coalition suédoise n’était plus qu’une question de jours, voire d’heures. Mais les heures ont passé, les jours ont passé, et les pourparlers continuent de caler sur une série de dossiers, notamment socio-économiques.

Seul parti centriste du (probable) futur gouvernement, le CD&V apparaît désormais comme « l’empêcheur de tourner à droite », comme l’écrivait hier La Libre Belgique. D’où certains pics de tension avec les négociateurs de la N-VA et de l’Open VLD ; le MR jouant en quelque sorte un rôle d’arbitre.

Cette situation fait curieusement écho à une anecdote racontée par l’actuel vice-Premier ministre MR, Didier Reynders, dans un livre d’entretiens paru en décembre dernier. L’histoire se passe en 1985. Le gouvernement réunit sociaux-chrétiens et libéraux, sous l’égide du Premier ministre Wilfried Martens, issu du CVP (futur CD&V).

Selon Reynders, Jean Gol, qui était alors chef de file des libéraux francophones, aurait adressé ce conseil à Guy Verhofstadt, valeur montante des libéraux flamands : « Tu vas voir, tu vas travailler avec des sociaux-chrétiens du CVP et du PSC. Ne crois pas que tu auras facilement un véritable accord. Tu vas aller au Comité ministériel de coordination économique et social, tu vas avoir un accord. Puis le point va venir en Conseil des ministres. Ils vont te dire : on a eu une réunion des ministres, il y a encore un petit quelque chose à changer. Puis, après le Conseil des ministres, le projet partira au Conseil d’Etat. Soit ils trouveront dans l’avis un truc ou l’autre pour justifier de grignoter encore quelque chose, soit il y aura eu un article dans la presse, soit une réunion du groupe parlementaire. Mais il faudra encore amender quelque chose. Le point reviendra donc au Conseil ; là, tu te diras que c’est bon. Puis le texte ira à la Chambre. Et là le groupe CVP ou PSC hésitera quand même. Donc il faudrait encore un petit changement. Après la Chambre, il faudra aller au Sénat, où le texte sera encore un peu modifié. Et je ne parle pas de ce qui peut se passer en commission. A la fin, tu auras fait douze ou treize stations, le chemin de croix se termine plus ou moins et, à ce moment-là, tu peux aller te faire crucifier. »

Didier Reynders sans tabou, entretiens avec Martin Buxant et Francis Van de Woestyne, éditions Racine.

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