Namur: les trois triomphes de Maxime Prévot

Christophe Leroy
Christophe Leroy Journaliste au Vif

A nouveau plébiscité par les Namurois, Maxime Prévot va pouvoir parachever son projet de ville dans un fauteuil plus confortable que jamais, après la défaite du PS. Son succès sur trois tableaux annonce, aussi, le style directif qu’il maintiendra dans sa majorité CDH-Ecolo-MR.

Un chiffre : 724. C’est le coût, en voix préférence perdues, de l’épreuve du pouvoir dans une ville de 111 000 habitants, dont 82 661 électeurs, quand on s’appelle Maxime Prévot. Une bien maigre perte, au regard des 12 825 citoyens qui lui ont accordé leur confiance, après son premier mandat complet en tant que bourgmestre de la capitale wallonne. Ce dimanche 14 octobre, il a recueilli personnellement les faveurs de près de 20% des bulletins validés. Au total, sa liste CDH ne perd que 2,49% des voix par rapport à 2012, malgré l’arrivée fracassante de nouvelles formations dans le paysage politique.

« Je n’ai aucune raison de vouloir jeter à la poubelle une équipe qui gagne », avait-il confié au Vif/L’Express à un mois des élections. Malgré le recul des libéraux, la majorité sortante CDH-MR-Ecolo ne s’oxyde que d’un siège. Elle en totalise 31 sur 47 et se voit donc reconduite pour six années de plus. De son côté, le PS, emmené par Eliane Tillieux, subit une lourde défaite, partiellement imputable à l’entrée du PTB (3 sièges) et de DéFi (4 sièges) dans le conseil communal. En perdant presque 10% des voix par rapport à 2012, les socialistes ne possèdent plus que 9 sièges. Une proportion historiquement basse dans une ville qu’ils ont perdue en 2006.

Pour Maxime Prévot, qui a toujours défendu sa politique en citant la « légitimité des urnes », gagnée en 2012, c’est l’heure de compter les triomphes. Ils sont au nombre de trois :

  • Le triomphe d’une méthode, d’abord. A Namur comme ailleurs, plusieurs partis concurrents, PS et DéFi en tête, avaient largement axé leur programme sur la gouvernance et la participation citoyenne, reprochant à la majorité de ne pas suffisamment prendre en compte l’avis des habitants. En 2015, le « non » majoritaire issu de la consultation populaire sur le projet clivant de centre commercial en coeur de ville, que la tripartite défend toujours avec vigueur, avait pu donner l’impression d’un désaveu du style très directif de son capitaine. Le plébiscite de ce 14 octobre démontre, au contraire, qu’il n’a pas été sanctionné en ce sens dans les urnes. Il est dès lors peu probable que Namur ouvre grand la porte de la participation citoyenne, que Maxime Prévot a toujours considérée comme un appoint, tout au plus, au pouvoir de décision des élus. La législature qui s’annonce restera donc marquée par le sceau du Prévot-centrisme.
  • Le triomphe d’un projet de ville, aussi. Depuis quelques années, le centre-ville de Namur est en profonde mutation. Téléphérique, nouveau quartier, port numérique, gare multimodale, passerelle, cité des métiers, salles de spectacle… Dans trois ou quatre ans, les nombreux chantiers lancés sous la législature sortante, largement subsidiés par la Région ou par l’Europe, seront finalisés. En 2012, Maxime Prévot entendait mettre fin à l’image « pantouflarde » de la capitale wallonne, en misant sur des « projets structurants ». Il avait donc fait le pari de se présenter aux élections de cette année dans une ville percluse de travaux. Là où ses opposants pointaient une vision de ville peu en phase avec les préoccupations réelles des habitants, le bourgmestre n’a pas été désavoué dans ses choix et sa stratégie. Même si les Namurois restent très divisés sur la question, rien ne le pousse à revoir sa copie.
  • Ces résultats traduisent, enfin, le triomphe plus collectif d’un rapport de force. Si le CDH était déjà le premier parti en 2012, il ne devançait à cette époque que d’un siège le parti socialiste. En outre, pour ce scrutin, une grande question demeurait : comment les formations traditionnelles, plus encore quand elles sont au pouvoir, allaient-elles encaisser la dispersion des votes, vu les nouveaux venus sur la scène politique ? A Namur, DéFi, au regard des personnalités populaires qui l’avait rejoint, se profilait comme le probable arbitre des élections, susceptible de faire basculer la majorité dans un camp ou dans l’autre. Le PTB, quant à lui, présentait pour la première fois une liste complète, à l’instar du mouvement Oxygène. Finalement, la multiplication du nombre de listes n’aura eu qu’un impact anecdotique sur le poids du CDH namurois et plus largement de la majorité sortante, à l’inverse du PS.

A mi-mandat, Maxime Prévot aura abattu les cartes les plus symboliques de son projet de ville. Les Namurois pourront alors voir, juger, s’approprier ou critiquer les nouveaux espaces et équipements qui ont tant changé le visage de leur ville. C’est là que se situe, probablement, l’ultime inconnue pour le bourgmestre CDH : à cet horizon, les nombreux administrés sceptiques ou dans l’expectative ne lui laisseront plus le bénéfice du doute.

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