Muriel Targnion (PS), bourgmestre de Verviers. © BELGA

Muriel Targnion: « Je n’ai jamais empêché Theo Francken de s’exprimer »

Olivia Lepropre
Olivia Lepropre Journaliste au Vif

Theo Francken (N-VA) a annulé une conférence qu’il devait donner à Verviers suite à une manifestation ayant rassemblé 200 personnes. Trois questions à Muriel Targnion (PS), bourgmestre de la commune, qui se tenait parmi les manifestants.

Levif.be : Pourquoi avoir participé à la manifestation contre la venue de Theo Francken à Verviers ? Estimez-vous que c’est la place d’une bourgmestre ?

Muriel Targnion : Dans mon combat politique depuis 20 ans, j’ai toujours manifesté contre les idées que je considérais comme populistes ou extrémistes. C’était déjà le cas quand j’étais Jeune socialiste. Je trouve que c’est un combat qu’il ne faut jamais lâcher, surtout dans notre pays où l’on retrouve ce genre de personnage au gouvernement. Manifestement Theo Francken s’oppose au fait que j’aie le droit de manifester, mais j’en ai le droit. Un bourgmestre est l’élu d’un parti, c’est normal qu’il ait des opinions politiques. Il n’y a rien qui lui interdise d’exprimer ses opinions, il ne doit pas être neutre. Un bourgmestre est également citoyen et a le droit de manifester, c’est un droit constitutionnel.

Ce que je réprouve en revanche, c’est qu’une vingtaine de radicaux de gauche, cagoulés, se soient joints à notre manifestation. C’est eux qui étaient contre la police, qui ont envoyé des pétards, qui ont lancé des cailloux. Je me suis d’ailleurs engueulée à plusieurs reprises avec une partie des manifestants, car je n’approuvais pas leur attitude violente. Ces gens-là sont des casseurs. Je ne cautionne absolument pas cette partie-là des manifestants et j’avais bien dit à la police qu’il fallait agir s’il y avait des débordements à cause de casseurs. La police a fait son travail. Mais la majorité des manifestants était simplement là pour exprimer une position, contre des idées qu’on ne partage pas.

Theo Francken présente son livre
Theo Francken présente son livre « Continent sans frontière ».© BELGA

Vous manifestiez par opposition aux propos tenus dans le livre « Continent sans frontière », que Theo Francken devait présenter mardi, ou contre le personnage et ses idées ?

Je ne manifestais pas contre le livre, car je n’ai pas eu l’occasion de le lire. Hier, j’ai vu des gens venir pour la conférence avec le crâne rasé, avec des croix gammées tatouées sur eux. Même si, dans notre pays, on a considéré que la N-VA n’était pas extrémiste, il est de mon droit de considérer que ce n’est pas le cas. C’est l’ensemble du discours de Theo Francken au cours de sa carrière que je n’aime pas. On sait qu’il ne faut pas banaliser ce genre de personnage et c’est ce qu’on voulait dire à travers cette manifestation.

Theo Francken n’a-t-il donc pas le droit à la liberté d’expression ?

Je n’ai pas interdit sa conférence. Elle se tenait dans un lieu privé, avec des invitations privées donc je n’avais pas à me positionner. J’aurais pu me positionner comme bourgmestre en trouvant une excuse de problématique d’ordre public. C’est Theo Francken qui a fait demi-tour. Je trouve que, face aux extrémistes, on doit justement être attentifs à être démocrates le plus possible. Je n’ai donc pas voulu prendre de fausses excuses démocratiques. Que du contraire, il a pu venir, de même que ses sympathisants. Mais la liberté va dans les deux sens : il a le droit de s’exprimer, mais la Constitution nous autorise à nous rassembler pour nous exprimer sur n’importe quel sujet, on a le droit de manifester. C’est pour ça que j’ai décidé de prendre part à cette manifestation.

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