Charles Michel © BELGA

Michel II : La Belgique ne peut se permettre une impasse

Au moment où de noirs nuages économiques s’amoncellent, la Belgique risque d’être confrontée à une longue période d’ingouvernabilité.

Le gouvernement Michel II a trois priorités, d’après le Premier ministre Charles Michel (MR) : « Préserver le pouvoir d’achat, la politique de sécurité et la politique climatique « . Il n’y a aucune trace de ces trois priorités dans le gouvernement Michel I. « Jobs, jobs, jobs. » Manifestement, la politique de l’emploi, la réforme des pensions, le deal pour l’emploi accompagné d’une baisse accélérée des allocations de chômage et le l’activation des inactifs ne sont plus importants pour Michel II. Dans ces domaines, les résultats de Michel I sont d’ailleurs très médiocres, certainement comparés au le reste de l’Union européenne.

Ce que le Premier ministre entend exactement par « politique de sécurité » n’est pas clair. Comme dans beaucoup d’autres ministères, la Justice a encore de nombreux projets inachevés. En insistant sur « le maintien du pouvoir d’achat » Michel semble vouloir répondre aux protestations des « gilets jaunes », qui dénoncent la hausse du coût de la vie et les taxes excessives. Et sa « politique climatique » répond aux demandes de 65 000 manifestants qui, au début du mois, exigeaient une politique climatique de grande envergure pour sauver notre planète. Le Premier ministre Michel « oublie » que la Belgique a voté contre des objectifs climatiques européens plus stricts deux jours après la manifestation. L’opportunisme n’est pas étranger à la plupart des politiciens, et certainement pas à ce Premier ministre libéral.

Le gouvernement Michel II souhaite tenir jusqu’aux élections du 26 mai, afin que nous puissions élire un nouveau parlement régional, européen et fédéral. Ce ne sera pas facile, car le gouvernement MR-Open VLD-CD&V ne compte que 52 sur 150 sièges parlementaires. Pour obtenir une majorité parlementaire, il doit trouver 24 voix dans l’opposition. De qui peuvent-ils venir ? Les écologistes (Ecolo 6 sièges et Groen également 6 sièges) seraient d’accord pour les questions climatiques par exemple. Les chrétiens-démocrates francophones du CDH (9 sièges) peuvent aider. Mais les principaux fournisseurs de voix sont ailleurs.

Ces derniers jours, le PS (23 sièges) était remarquablement silencieux. Il n’est pas exclu que pour certains dossiers, il aide le gouvernement Michel II, pour le pouvoir d’achat par exemple. Cela pourrait aussi être un prélude à la formation de coalitions régionales et fédérales MR-PS après le 26 mai. Il est tout aussi remarquable que le président du sp.a, John Crombez déclare que son parti (13 sièges) n’a pas envie de soutenir le « gouvernement de démolition » Michel II. Une fois de plus, il prouve qu’il n’est pas aussi malin que ses camarades francophones.

Bien entendu, la N-VA (31 sièges) peut aussi dépanner le gouvernement Michel II. Mais le vice-premier ministre Kris Peeters (CD&V) a déjà déclaré que la coalition bleu-orange ne sera pas la même que la coalition suédoise : « Ce ne sera pas un copier-coller. Il y aura un certain nombre d’accents. » La N-VA soutiendra-t-elle ce gouvernement « aux accents différents  » ? A quel prix ? En outre, il y a la querelle entre Theo Francken et son successeur à l’Asile Maggie De Block, et par extension entre le N-VA et l’Open VLD. Une guerre entre les deux pourrait compliquer la recherche d’une majorité pour Michel II.

Un premier test pour Michel II devrait être le vote de confiance, suivi de l’approbation du budget avant le 31 décembre. S’il survit, le gouvernement minoritaire devra chercher une majorité pour chaque dossier au cours des cinq prochains mois. On ne peut s’attendre à beaucoup d’esprit de décision de la part de ce cabinet chancelant. Et comme après les élections, les négociations de coalition risquent d’être assez difficiles, il y a de fortes chances pour que Michel II passe en affaires courantes et doive encore faire tourner la boutique pendant des mois.

La Belgique ne peut se permettre une telle impasse. Comme les gouvernements précédents, Michel Ier n’a pas mis d’ordre dans les finances publiques. Nous n’avons pas de tampon contre les désastres. Et ils approchent. Il y a le Brexit. Les menaces de guerre commerciale avec les États-Unis subsistent. L’Italie reste un problème avec son budget et ses banques. Les perspectives de croissance de l’économie mondiale se détériorent à vue d’oeil, ici et là on parle de récession.

Certains suggèrent que des élections anticipées sont encore la meilleure solution. Mais même là, nous arrivons trop tard. Nous pourrions gagner quatre mois, mais la Belgique risque de devenir ingérable pour une période beaucoup plus longue. C’est pourquoi certains pensent à un cabinet technocratique pour diriger notre pays, non seulement jusqu’aux élections, mais aussi après, jusqu’à ce qu’un nouveau gouvernement soit formé. Quoi qu’il en soit, l’avenir s’annonce sombre, tant sur le plan politique qu’économique.

Nous vous souhaitons donc une bonne santé en 2019.

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