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Mesures antitabac : la Belgique est-elle à la traîne?

Stagiaire Le Vif

La ville de Sydney va interdire de fumer sur la Martin Place, la plus grande zone piétonne de la métropole australienne. Ce projet-pilote d’une durée d’un an vise à interdire la cigarette dans tous les espaces publics ouverts de la ville. La Belgique pourrait-elle suivre un tel modèle ?

Les législations antitabac sont de plus en plus virulentes à travers le monde. Au Japon, par exemple, des rues entières sont non-fumeurs et à New York il est interdit de fumer dans des espaces publics en plein air. Au niveau européen, la Belgique fait partie des mauvais élèves. Elle est seulement treizième dans la lutte contre le tabagisme.

Pour Luk Joosens, expert tabac à la Fondation contre le Cancer, cette mauvaise place s’explique surtout par le manque de décisions politiques : « Depuis 2007, aucune nouvelle initiative n’a été prise par le gouvernement belge dans la lutte contre le tabagisme. Et depuis le nouveau gouvernement, rien n’a changé. Même la proposition pour l’arrivée sur le marché belge d’un paquet neutre a récemment été rejetée et le gouvernement n’a pas accepté les auditions proposées afin de voir l’impact possible d’une telle mesure sur la consommation. C’est incompréhensible.« 

On pourrait croire que les politiques ne veulent pas traiter ce dossier, qui pourrait être synonyme de mesures impopulaires, mais selon le spécialiste, il n’en est rien : « On ne comprend pas pourquoi le gouvernement refuse d’agir contre le tabagisme lorsque l’on sait qu’il s’agit de mesures soutenues par la population. Deux tiers des personnes soutiennent la proposition d’une interdiction de fumer en voiture et 58 % de la population est favorable à une augmentation du prix des paquets de cigarettes.« 

D’autant plus incompréhensible quand on sait que chaque année, le cancer des poumons chez les femmes augmente. Tous les ans, ce sont plus de 7000 fumeurs qui décèdent d’un cancer du poumon et le double du tabagisme. Pour la Fondation contre le cancer, le refus du paquet neutre est la conséquence d’une influence du lobbying sur le politique : « Le lobbying a un impact auprès du monde politique. Ce que l’on ne comprend pas, c’est que l’industrie du tabac a fermé ses portes en Belgique et que de telles mesures ne profiteraient qu’aux multinationales, dont le siège est basé en Suisse. « 

Els Cleemput, porte-parole de la ministre de la Santé, Maggie de Block, se défend : « Nous ne nous laisserons pas influencer par les propos de cette fondation , qui je le rappelle fait du lobbying. La proposition d’arrivée sur le marché d’un paquet neutre a été refusée, mais momentanément. La ministre a demandé une évaluation du cas de l’Australie, seul pays à avoir instauré les paquets neutres pour le moment. On souhaite se baser sur un cas réel. Le cas est étudié, et on évalue les effets d’une telle mesure sur la population. Madame De Block est toujours ouverte à de nouvelles propositions, mais elle veut avant tout se baser sur des chiffres, des conclusions et des analyses scientifiques avant de prendre une décision.« .

Pour la Fondation contre le cancer, si la Belgique veut remonter dans le classement des pays qui luttent contre le tabagisme , elle devrait tout d’abord s’attaquer aux prix : « La mesure la plus importante à mettre en place concerne les prix. Le prix du tabac à rouler, de plus en plus consommé chez les jeunes est encore beaucoup trop bas ». Une deuxième mesure serait d’interdire la publicité sur le lieu de vente, comme dans les librairies par exemple. Et enfin accepter le paquet neutre, qui sera d’ailleurs d’application en France bientôt.

L’association espère que le centre piétonnier de Bruxelles deviendra bientôt une zone non-fumeurs, à l’image de ce qu’a fait Sidney. Mais le projet n’est, pour le moment, pas à la table du gouvernement. Selon Els Cleemput, il s’agit avant tout « d’une mesure démocratique, à prendre avec les citoyens« .

L.V.

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