Tom Bauwens et Bernard Wesphael. © Belga

Me Bauwens défend la thèse de l’intoxication et critique l’instruction

Me Tom Bauwens a poursuivi sa brillante plaidoirie, mercredi, devant la cour d’assises du Hainaut qui juge Bernard Wesphael, accusé du meurtre de son épouse, Véronique Pirotton. A la fois sérieux et ironique, l’avocat a critiqué l’instruction, et notamment l’inculpation pour assassinat qu’il juge rapide, et il a terminé en soutenant la thèse de l’intoxication alcoolo-médicamenteuse. Le tout en s’appuyant sur des éléments du dossier.

Me Bauwens est revenu sur le carton huit du dossier, relatif à la détention préventive de l’accusé qui a duré dix mois à la prison de Bruges. « J’invite le jury à lire les déclarations de M. Wesphael et les conclusions déposées. Vous verrez que la défense n’a jamais changé de position. »

Selon l’avocat, c’est le ministère public qui a changé à plusieurs reprises de position dans ce dossier. Il revient notamment sur la circonstance aggravante de préméditation, donc l’assassinat, premier chef d’inculpation retenu contre Bernard Wesphael, « sur base des déclarations d’Oswald », glisse-t-il.

Me Bauwens note aussi que le ministère public avait constaté « l’absence suicidaire chez Véronique Pirotton », ce qui a été contredit par les témoignages, et soutenu la thèse que Bernard Wesphael n’était pas le bienvenu à Ostende, « ce qui est contredit par la déclaration du fils de la victime ».

L’avocat est revenu aussi sur le flagrant délit retenu par le juge d’instruction, Christine Pottiez. « Le 1er novembre, à 00h30, M. Wesphael déclare qu’il est parlementaire wallon et tous les feux rouges ont commencé à clignoter. A ce moment là, il y a un coup de téléphone entre le juge d’instruction et le parquet général de Gand. Après 30 minutes, on est arrivé à la conclusion que ce dossier devait être qualifié comme un flagrant délit. L’est-il réellement sachant que le juge d’instruction, arrivé sur place, va décrire ce qui est pour lui, à 4h15, les premiers éléments suspects ? « .

Le second avocat de Bernard Wesphael est passé à la lecture du procès verbal et il ironise: « la chambre est très en désordre. Ce qui est suspect, on trouve des médicaments, un petit cahier dans lequel il est écrit en français, un stylo à billes de couleur bleu, oulalala ! Un lit en désordre qui aurait été occupé par deux personnes, un bureau en désordre. A côté du bureau, une poubelle qui contient des canettes et des bouteilles en plastique ».

L’avocat rappelle que les témoignages des voisins, à décharge, ont été jetés aux oubliettes. « Les enquêteurs n’ont retenu que les témoignages de ceux qui avaient entendu du bruit venant de la chambre 602 ».

Me Bauwens est revenu sur le suicide avec le sachet en plastique et sur un procès-verbal du 8 novembre 2013 envoyé par le parquet de Hasselt au parquet de Bruges, relatif à un suicide avec un sac en plastique qui a eu lieu dans le Limbourg, et il ajoute que ce procès-verbal n’est ressorti qu’un an plus tard, juste avant la clôture du dossier.

Il s’est ensuite penché sur les tendances suicidaires de la victime. « Le 16 avril 2012, Mme Pirotton invitait des gens de Livrer à domicile chez elle. Dans son living, il y avait un livre « Rien ne s’oppose à la nuit », dans lequel un enfant âgé de 15 ans, battu, s’est suicidé à l’aide d’un sac en plastique ».

Me Bauwens se demande dans quel état d’esprit était la victime les 30 et 31 octobre 2013. « Deux choses m’interpellent. Tout d’abord, la lettre adressée à son fils. Pourquoi a-t-elle indiqué, à un gamin de 14 ans, que sa voiture était garée près de la gare. Comptait-elle revenir ou pas ? Dans la chambre, on a découvert une carte « ne pas déranger, sur laquelle était notée son adresse, le genre de carte sur laquelle on note rarement son adresse ».

Il revient sur un incident qui s’est produit à Liège, le 16 septembre 2013. « Sans avertir personne, elle s’est retrouvée dehors et elle a vomi. Elle avait combiné alcool et benzodiazepines. Si elle n’avait pas vomi, elle serait morte ».

L’avocat ajoute que la dose de clozan retrouvée dans le corps de la victime était cinquante fois supérieure à la dose thérapeutique minimale et dix fois à la dose thérapeutique maximale (deux comprimés), « une dose toxique selon les experts », poursuit l’avocat qui note que vingt-trois comprimés manquaient dans la chambre. Ce qui a entrainé plusieurs symptômes dont une détresse respiratoire. « La combinaison avec alcool nécessite une hospitalisation car le risque est mortel, c’est écrit noir sur blanc sur la notice », ajoute l’avocat.

L’avocat général avait insisté sur le fait que Véronique Pirotton était « tolérante » car elle était suivie depuis longtemps. « La tolérance ne change pas le résultat final ».

Du Sipralexa a été retrouvé en dose toxique et presque létale dans l’estomac de la victime, avec risque de convulsions, perturbations du rythme cardiaque, saignements anormaux au niveau de la peau et au niveau gastro-intestinaux, gonflement du pharynx, de la langue, de la peau, etc. Il énumère la notice du produit.

« Si la cause de la mort est expliquée toxicologiquement, je ne comprends pas pourquoi la juge d’instruction a dit que ce n’est pas au toxicologue de se prononcer sur la cause de la mort. Pour nous, c’est clair que le décès fait suite à une combinaison alcool-médicaments », conclut l’avocat qui plaidé pendant près de deux heures.

Me Mayence a repris le flambeau après une pause de quelques minutes.

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