© Belga

Les tracteurs à Bruxelles: situation de plus en plus difficile sur le réseau routier

Les colonnes de tracteurs en route vers Bruxelles et le rond-point Schuman causent d’importants embarras de circulation sur les autoroutes, indique lundi le centre flamand du trafic. La E40 entre Everberg et Crainhem, la E411 depuis Overijse et le ring extérieur entre Braine-l’Alleud et Tervuren sont les tronçons les plus touchés.

Les colonnes s’arrêtent régulièrement et obstruent généralement l’ensemble de la chaussée. Les routes régionales vers Bruxelles sont pour l’instant peu touchées, mais la situation évolue constamment, souligne le centre.

Le syndicat agricole européen EMB (European Milk Board) attend un signal très fort de l’Europe en vue de trouver une solution à la crise que traverse le secteur laitier. « On ne se contentera pas de primes et de subventions. Sans changement structurel, la colère va monter et nous promettons des actions beaucoup plus fortes », a indiqué lundi Erwin Schöpges, représentant belge de l’EMB.

Au cours d’une conférence de presse, les représentants de l’EMB ont rappelé leurs revendications, insistant notamment sur la mise en place d’un instrument de crise qui permette de mettre en oeuvre une réduction des quantités de lait en période de crise. « Notre programme de responsabilisation face au marché (PRM) prévoit entre autres des versements de bonus en faveur des producteurs en cas de réduction volontaire de la production », ont-ils expliqué. « Une aide à court terme n’est pertinente que si l’on réduit la production », a souligné Romuald Schaber, président de l’EMB. Tout en tançant l’attitude du commissaire européen à l’Agriculture, Phil Hogan, et du ministre allemand de l’Agriculture, Christian Schmidt, l’EMB a pointé deux combats différents, le sien défendant les petits paysans, et celui des groupes industriels. « Deux modèles d’agriculture se font concurrence: celui de l’agrobusiness et celui des petits paysans », précisait une source syndicale.

200 km de file

Vers 9h30, quelque 1.200 tracteurs conduits par des fermiers défendus par l’EMB étaient en route vers Bruxelles. Ils devaient se rassembler vers 11h00 à proximité du rond-point Schuman, en marge du Conseil extraordinaire des ministres européens de l’Agriculture. Quelque 200 km de file étaient enregistrées sur les routes du pays lundi matin peu après 8h. Les premiers ralentissements importants ont été notamment constatés sur la E429 à hauteur de Marquain, sur la E40 à Barchon et la nationale 4 à proximité de Marche-en-Famenne, indique Inforoutes, le site de la police fédérale de la route. Des tracteurs avaient déjà atteint le boulevard Albert II vers 8h, indique la zone de police Bruxelles Capitale-Ixelles.

Une colonne de 200 tracteurs, faisant environ 5 km, poursuit son périple sur la E40 vers Bruxelles. Elle avait atteint Hannut vers 8h15. Une quarantaine de tracteurs roulent sur la nationale 4, à Courrière, et sont sur le point de ralier la E411, tandis qu’une trentaine d’autres engins agricoles se trouvaient sur la E411 à proximité de Wanlin. Une trentaine de tracteurs sont également signalés à Gosselies sur la N5 et une quarantaine d’autres roulent sur la N6 à hauteur de Dour. Enfin, pas moins de 145 tracteurs sont concentrés sur la N7 près de Ghislenghien. A Bruxelles, l’avenue de Tervueren a été coupée à la circulation pour les véhicules en provenance du ring à hauteur des Quatre-Bras.

Leur trajet

Deux actions parallèles sont annoncées. Un premier groupe d’agriculteurs, emmenés par l’European Milk Board (EMB), « attirera plusieurs centaines de tracteurs et environ 1.500 participants de différents pays européens vers la place Schuman », indique la police locale. Un deuxième groupe d’environ 3.000 agriculteurs et quelques centaines de tracteurs, coordonnés par le Copa, le principal syndicat agricole européen, se déplacera en colonne de la gare du Nord vers la place Schuman via le boulevard Albert II, le boulevard du Jardin Botanique, la Petite Ceinture, la rue Belliard, la rue Breydel et l’avenue d’Auderghem. « Ce cortège sera rejoint par deux autres colonnes de plusieurs centaines de participants chacun à hauteur de l’avenue d’Auderghem et du Parc Léopold », précise la police.

Les mesures de circulation habituelles seront d’application dans le quartier européen. De plus, la station de métro Schuman sera fermée toute la journée (le métro y passera sans s’y arrêter). « Pour vos déplacements indispensables, nous vous demandons de privilégier les transports en commun. Les lignes de bus et les trams circulant en surface seront également perturbés, mais les trains, le métro et les trams en sous-sol circuleront normalement », prévient la police.

La station de métro Schuman restera fermée toute la journée de lundi. Les arrêts Charlemagne, Froissart, Breydel, Parc Léopold (bus 21), Livingstone (22) et Ambiorix (22) ne seront par ailleurs pas desservis. Il est conseillé aux usagers de rejoindre les arrêts Maelbeek (depuis Parc Léopold, Charlemagne, Livingstone ou Ambiorix), Nerviens (depuis Breydel) ou Froissart (arrêt provisoire rue Belliard) pour emprunter les bus. La Stib précise que les lignes de tram 92 et 93, et de bus 14, 27, 29, 47, 57, 58, 61, 63, 64, 65, 66, 80 et 88 seront touchées par les perturbations liées à la manifestation, puisqu’elles se trouvent sur le parcours.

L’association représentative des intérêts des producteurs laitiers en Europe attend un maximum de manifestants dès 11h00 au rond-point Schuman, à l’occasion du conseil extraordinaire des ministres européens de l’Agriculture. Les colonnes de tracteurs devraient quitter la capitale dès 16h00.

Pourquoi les agriculteurs protestent

Le prix du lait est intenable pour les agriculteurs et, selon l’EMB, seule une réduction des volumes produits peut résoudre la crise. « Les producteurs de lait ne manifestent pas pour obtenir des subventions, mais une limitation des quantités par le biais d’un programme de crise », a insisté le président de l’EMB, Romuald Schaber, lors d’une conférence de presse au sujet de la manifestation du 7 septembre. Le jour de l’action, l’EMB tiendra une nouvelle conférence de presse à 9h30. A partir de 11h00, sont attendus devant le bâtiment Justus Lipsius quelque 5.000 agriculteurs venus de toute l’Europe, principalement de Belgique, de France et d’Allemagne. Parmi ces agriculteurs, un millier rejoindront la capitale en tracteur, a précisé Erwin Schöpges, porte-parole de l’EMB et membre du syndicat belge MIG. Il s’attend à de gros embarras de circulation, mais espère que la population se montrera compréhensive.

L’EMB représente environ 100.000 producteurs laitiers répartis dans toute l’Union européenne. Il plaide pour des instruments de surveillance du marché capables d’anticiper les crises. Lorsque ces instruments montrent que les coûts de production ne sont pas couverts, les agriculteurs devraient être incités ou obligés à réduire leur production de lait en fonction de l’intensité de la crise. Ceux, dont la Commission européenne et l’Allemagne, qui prônent une augmentation des exportations pour écouler les stocks font fausse route, selon l’EMB. « Ce ne sont en effet pas le blocus des importations russes ni la baisse de la consommation de lait enregistrée chez les Chinois qui ont déclenché la crise, mais bien le fait que, face à un recul de la demande, en particulier dans l’UE, on a réagi en augmentant la production », considère la fédération. Favoriser les exportations nuit aux pays en développement, a également déploré Erwin Schöpges, appuyé par un conseiller politique de l’ONG Oxfam, Thierry Kesteloot. Des subventions et une majoration du prix d’intervention, quant à elles, ne sont pas des solutions durables, a ajouté l’agriculteur. Les producteurs laitiers poursuivront leurs actions tant que l’Union européenne ne change pas de voie, a promis M. Schöpges. Contrairement à l’EMB, le Copa, le principal syndicat agricole européen non sectoriel, attribue la crise qui frappe les producteurs de lait, mais aussi de viande porcine, bovine, de fruits et légumes, aux restrictions sur les exportations imposées par la Russie, « qui ont entraîné du jour au lendemain la fermeture du principal marché pour les exportations européennes ». Il accueille favorablement les actions déjà entreprises par la Commission européenne mais les estime insuffisantes.

Le Copa, dont font partie la Fédération wallonne de l’agriculture (FWA) et le Boerenbond, manifeste également ce lundi, mais sous sa propre bannière. Il rassemblera ses membres gare du Nord vers 10h00 avant de rejoindre le rond-point Schuman à 11h00. Toutefois, pratiquement, les agriculteurs wallons qui rallient la capitale en tracteur se réuniront directement à proximité du rond-point Schuman pour éviter de devoir traverser Bruxelles, précise Anne Pétré, la porte-parole de la FWA.

Rassemblement de quelques centaines de personnes en prélude à la manifestation

Quelque 150 personnes selon la police, 600 selon les organisateurs, ont répondu ce dimanche au rond-point Schuman à Bruxelles, à l’invitation du collectif citoyen Alliance D19-20 à témoigner son soutien aux agriculteurs confrontés à de graves crises, notamment dans le secteur laitier.

Si le Conseil européen ne commence pas cette semaine à mettre sur pied ce programme de régulation, des actions plus dures seront menées dans les prochains mois par les producteurs laitiers, avertit Raf Verbeke de l’Alliance D19-20. L’évènement a débuté par un match de football symbolique entre une équipe représentant les agriculteurs et une autre l’industrie agro-alimentaire au cours duquel il est rapidement apparu que les lobbyistes de l’industrie étaient de connivence avec l’arbitre. Les manifestants ont attendu en vain l’arrivée d’une colonne de tracteurs qui étaient censés être partis à 10 heures de Battice (province de Liège) mais en milieu d’après-midi, leur présence n’avait toujours pas été signalée par la police fédérale. « Ils vont passer la nuit ici dans le parc du Cinquantenaire. Nous avons préparé de la nourriture et des agriculteurs et des citoyens vont fraterniser ici ce dimanche soir », explique-t-on parmi les organisateurs. « Nous n’avons pas besoin d’étables de 500 à 700 vaches avec des Roumains qui viendraient les traire. Laissons chaque agriculteur décider de ses propres modes de production au lieu de les enfermer dans une logique d’agrandissement », poursuit Raf Verbeke.

Contenu partenaire