© Belga

Les propositions citoyennes françaises pour le climat, possibles chez nous?

Olivier Mouton
Olivier Mouton Journaliste

La Convention instaurée par le président Macron propose d’inscrire le climat dans la Constitution, de réduire la vitesse sur autoroutes, d’isoler d’urgence les bâtiments ou de créer un  » crime d’écocide « . Des sujets qui parlent chez nous, mais qui restent des voeux pieux.

La Convention citoyenne pour le climat a clôturé ses travaux ce week-end en France. Cette démarche participative avait été lancée par le président français Emmanuel Macron, après avoir été bousculé par le Mouvement des Gilets jaunes. Les 150 citoyens, tirés au sort, avaient débuté leurs travaux le 4 octobre 2019. Ils ont transmis au gouvernement d’Edouard Philippe un rapport de 600 pages, contenant pas moins de 150 propositions. Certaines sont assez ‘radicales’, la plupart ont été entérinées, mais pas, par exemple, la réduction du temps de travail drastique à 28 heures par semaine sans perte de salaire (au lieu des 35 heures de mise en France). Il reste désormais à voir comment le président Macron et son gouvernement vont s’en emparer.

Tout cela est-il possible chez nous ? Plusieurs demandes de ces citoyens français rencontrent des débats qui ont vécu en Belgique… en vain, la plupart du temps.

Une révision de la Constitution, un cadre, une Autorité. Les 150 citoyens français demandent une révision de la Constitution pour inscrire la protection de l’environnement dans le marbre. Le texte prévoit notamment que « la liberté des droits, libertés et principes ne saurait compromettre la préservation de l’environnement, patrimoine commun de l’humanité ». Ils prônent notamment la création d’une « haute autorité » chargée de faire respecter les « limites planétaires » jugées soutenables pour la survie de l’humanité, intégrant notamment les recommandations des experts scientifiques. Cela fait sérieusement songer à la proposition faite par les scientifiques en Belgique d’adopter une Loi climat, en changeant la Constitution pour baliser les fondements d’une vraie politique climatique belge. L’idée consistait à fixer des objectifs clairs, à élaborer un Plan national pour le climat, à créer une Agence interfédérale pour le climat accompagné d’un Comité indépendants d’experts. Tons ces voeux sont restés lettre morte à ce jour.

La réduction de vitesse à 110 km/h sur les autoroutes. La voiture est ciblée par plusieurs propositions de cette Convention citoyenne. Il est suggéré de réduire la vitesse maximale à 110 km/h sur les autoroutes au lieu des 130 km/h actuels. Cela permettrait une réduction des émissions de CO2 de 20% en moyenne. Le débat, chez nous (où la vitesse maximale est de 120 km/h), avait été amené sur la scène politique après une velléité similaire venue des Pays-Bas. Mais là encore, rien n’avait abouti après quelques jours d’échanges et de lobbying intensif. Même les experts autoroutiers avaient signifié qu’une réduction linéaire n’est pas une idée optimale, les nouvelles technologies permettant désormais une gestion intelligente de la vitesse sur les routes.

Une journée de télétravail/semaine, suppression de vols intérieurs. La Convention citoyenne française propose d’autres façons de limiter les déplacements en voiture. Il est par exemple question d’instaurer une journée de télétravail obligatoire par semaine. La volonté consiste aussi à décourager l’usage de l’avion, notamment d’organiser progressivement, d’ici 2025, la suppression des lignes intérieures pour lesquelles il existe des alternatives écologiques plus intéressantes. Ces débats devienent davantage audibles après la crise du coronavirus, chez nous aussi.

Obligation de rénovation des bâtiments. Les 150 citoyens consacrent tout un chapitre à cette nécessité d’isoler et de rénover le bâti existant. Il s’agit de rendre obligatoire la rénovation énergétique globale des bâtiments d’ici 2040, avec une palette de mesures pour favoriser et contraindre les propriétaires. Chez nous, l’accord du gouvernement wallon d’Elio D Rupo vise à atteindre la neutralité carbone de l’ensemble du bâti en 2050. Pour atteindre cet objectif, le gouvernement va jouer sur une série de leviers comme un renforcement des exigences de performance énergétique des bâtiments, la généralisation de l’isolation des toitures d’ici 2030. Une alliance « emploi environnement rénovation » figure également au menu de la tripartite PS-MR-Ecolo.

Une taxe sur les dividendes. La Convention citoyenne française propose encore une taxe de 4 % sur les dividendes distribués au-delà de 10 millions d’euros: elle serait destinée à financer la transformation « vert » de l’appareil productif. Chez nous, si une taxe sur les dividendes existe bel et bien, elle n’a pas pour objectif unique de financer une politique environnementale ambitieuse.

Un « crime d’écocide ». Enfin, les 150 citoyens français ont, par ailleurs, plébiscité à 99,3 % la proposition d’introduire dans le droit pénal français un « crime d’écocide ». Un texte, rejeté par le Sénat français, définissait l’écocide comme le fait de « porter atteinte de façon grave et durable à l’environnement et aux conditions d’existence d’une population, en exécution d’une action concertée tendant à la destruction ou à la dégradation totale ou partielle d’un écosystème, en temps de paix comme en temps de guerre ». Chez, nous, c’est essentiellement le secteur associatif qui estime « urgent »d’instaurer cette nouvelle règle de droit. Mais il n’y a pas eu de réel débat politique à ce sujet.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire