Gérald Papy

« Les dispositions du déconfinement exposent davantage les politiques aux erreurs. Elles n’ont pas manqué »

Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

Au bon vieux temps du confinement… Accablés de critiques depuis quelques semaines, les politiques en viendraient à regretter la première phase de la crise sanitaire où la peur du virus et la sidération face à sa propagation rapide facilitaient l’adoption et l’application de mesures poursuivant un objectif commun : rester chez soi, pratiquer les gestes barrières élémentaires, maintenir le système hospitalier hors de l’eau et continuer à faire fonctionner le pays avec les personnes les plus indispensables, qui n’étaient pas nécessairement celles qu’on disait l’être.

Quoiqu’inédite et déstabilisante, la situation était, en matière de gestion politique, simple. Pour une raison évidente développée par le sociologue Patrick Pharo :  » En affichant son souci de la santé publique et de la prévention du malheur, n’importe quel gouvernement joue « sur du velours », puisque ce sont là des préoccupations cruciales pour n’importe qui. On peut donc supposer qu’au moins dans un premier temps, les injonctions de plus en plus directives des autorités seront acceptées, sinon réellement suivies.  »

Le premier temps de la crise passé, les difficultés ont surgi pour les politiques avec la concurrence de l’urgence économico-sociale, le déconfinement et ses dispositions ciblées, différenciées, sectorielles. Forcément, elles souffrent plus la critique qu’un confinement abrupt mais compris et exposent davantage les dirigeants politiques aux erreurs. Celles-ci n’ont pas manqué et ont pris des formes variées. Des injonctions contradictoires (inciter à la reprise du travail tout en maintenant les écoles maternelles fermées) aux imprécisions (autoriser la reprise des stages d’été en en excluant ensuite les versions sportives) en passant par les incohérences (relancer la fréquentation des transports en commun et une certaine promiscuité et continuer à interdire l’accès aux plages) ou les différences de traitement ressenties comme des injustices (en Belgique, dans les primes différentes accordées au nord et au sud du pays aux gérants de bars et de restaurants ; en Europe, par la course à celui qui ouvrira le plus tôt son pays aux touristes).

Cette grande confusion donne de la pertinence au retour, après le momentum d’union nationale, de la critique de la société civile et des adversaires politiques. C’est la vertu de la démocratie de la susciter. Mais cette grande confusion contribue aussi au relâchement du respect des mesures de sécurité sanitaire et à une forme de désobéissance civile. C’est beaucoup moins sain pour la démocratie. Parce que, même si cette tendance est encore contenue, elle met en péril à la fois la bonne marche du déconfinement et accroît la menace de ce que nous redoutons tous le plus : un reconfinement mortifère pour la société et l’économie, qui annoncerait pour le coup une vraie révolte. Au gouvernement dès lors de préserver au maximum la cohésion sociale d’une population déjà atteinte par les préjudices du lockdown et par le désappointement d’un déconfinement qui n’est pas le retour à la vie d’avant mais un entre-deux incertain. Aux citoyens de reconnaître que des catégories d’entre eux, à leur corps défendant, souffrent plus de la crise et qu’ils requièrent des attentions particulières, sans y voir la faveur de privilèges.

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