© Belga

Les CPAS bruxellois craignent une réforme aux relents communautaires

Les CPAS bruxellois qui assurent une grande partie de l’octroi de l’aide médicale urgente octroyée aux personnes qui ne sont pas en ordre de séjour sur le territoire craignent que la réforme du dispositif du ministre de l’Intégration sociale Denis Ducarme ne masque quelques « relents communautaires », a indiqué vendredi à l’agence Belga un des co-présidents de la fédération, Jean Spinette (PS).

Les trois fédérations craignent l’effet d’une réforme qui vise à mettre en place un contrôle a posteriori de l’opportunité d’octroi de l’aide, par un fonctionnaire médecin-conseil de la Caisse auxiliaire d’assurance maladie-invalidité (CAAMI).

Selon Jean Spinette, il s’agit d’un « stress » supplémentaire pour les CPAS qui risquent de voir les frais consentis non pris en charge par le fédéral en guise de sanction. Et encore, on revient de loi, souligne celui qui est également président du CPAS de St-Gilles, puisqu’a été supprimée l’idée d’une sanction multipliée par dix.

Autre évolution positive, un allongement des délais, de 45 à 60 jours, permettra aux CPAS de mieux s’accorder sur leur compétence territoriale face à des personnes dont la vulnérabilité les conduit à changer régulièrement de localisation. Les CPAS avaient dès lors tendance à « se renvoyer la balle ». Or, ils risquent de continuer à le faire avec la sanction de non prise en charge.

« 63% de l’aide médicale urgente est octroyée en Région bruxelloise, et par exemple 8% par le CPAS de St-Gilles », souligne Jean Spinette. « Les CPAS bruxellois sont dénoncés comme laxistes mais les personnes en séjour illégal se trouvent très majoritairement dans la capitale et les CPAS et les hôpitaux publics bruxellois, taxés de tourisme médical, sont, de loin, les plus actifs en la matière, ce qui peut expliquer un nombre plus important d’erreurs dans l’application des conditions », justifie-t-il. « Par ailleurs, on nous parle de laxisme mais il me revient des acteurs de santé de première ligne que le CPAS d’Anvers délivre, pour l’aide médicale urgente, une carte médicale pour une semaine ». Cette carte permet, après acceptation du dossier, de bénéficier des soins appropriés auprès du médecin et du pharmacien.

« Les CPAS sont demandeurs de bonnes pratiques et la situation actuelle n’est pas aisée lorsqu’il s’agit de se prononcer sur le diagnostic du médecin-traitant », admet Jean Spinette. « Mais parler comme l’a fait le ministre de soins de confort, c’est malheureux et ne correspond à aucune acception juridique connue », poursuit-il. Le ministre s’est fondé sur le rapport du médecin-conseil de la CAAMI qui a évoqué l’un ou l’autre exemple comme la circoncision à des fins religieuses, la réduction mammaire ou des cas de lombalgies.

« Il faut s’entendre sur l’aide médicale urgente qui a une vertu préventive et nécessaire. Un vieux de 75 ans doit-il forcément se voir refuser une prothèse au risque d’être définitivement coupé de toute vie sociale? Par ailleurs, au CPAS de St-Gilles, nous n’avons pas pour philosophie d’encourager la circoncision lorsqu’elle ne correspond pas à un besoin sanitaire mais nous nous devons aussi de respecter toutes les confessions. Et lorsqu’elle est pratiquée chez soi, au scalpel, la circoncision ne risque-t-elle pas d’entraîner un problème de santé? Et la jeune fille handicapée dans sa vie sociale, souffrant de problèmes de dos en raison d’une poitrine trop volumineuse ne peut-elle bénéficier d’une réduction mammaire qui lui rendra sa dignité? Ce rapport du fonctionnaire de la CAAMI est à gerber », conclut Jean Spinette.

Les CPAS ont rendez-vous mardi avec le ministre Ducarme pour une nouvelle consultation. Jean Spinette n’attend pas grand chose de l’entretien même si le ministre s’est engagé en commission de la Chambre, où le projet de loi a été approuvé, à une large consultation en vue de la rédaction de l’arrêté royal d’exécution (le projet de loi doit encore être examiné en séance plénière). « Ce gouvernement écoute mais n’entend pas. Il y a consultation mais pas concertation », regrette-t-il, se voulant cependant constructif.

Contenu partenaire