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« Les chiffres de Koen Geens cachent une navrante réalité sous-jacente »

Le Collège des cours et tribunaux réagit dans un communiqué mercredi aux chiffres et propos du ministre de la Justice, Koen Geens, sur la situation du personnel judiciaire. Le Collège, qui représente les chefs de corps à l’exception de la Cour de Cassation, estime que les chiffres avancés par le ministre « cachent une navrante réalité sous-jacente ».

Pour le Collège, les pénuries de personnel sont criantes et sont dues aux décisions du pouvoir exécutif de remplacer seulement une partie des départs des juges et de leurs collaborateurs, et de ne combler volontairement qu’une petite partie des places vacantes. « Une telle attitude (…) porte atteinte à l’équilibre entre les trois pouvoirs constitutionnels ».

A la suite des propos tenus par Jean de Codt, le premier président de la Cour de Cassation dimanche à la RTBF, le ministre Koen Geens avait affirmé que « le cadre des magistrats a été augmenté de 30% depuis 2014 et est entièrement rempli ». Le cadre total de personnel judiciaire a été doublé depuis 2014 et il est rempli à hauteur de 83% », avait-il ajouté. Pour contrer cette déclaration, le Collège affirme utiliser les chiffres transmis par l’administration du ministre de la Justice.

Au total, « les cours et tribunaux (hors Cour de Cassation) devraient compter 1.646 juges et 4.790 membres du personnel ». Or, en mai 2016, 1.555 juges (soit -91 par rapport au cadre légal) étaient nommés. Les membres du personnel étaient eux au nombre de 4.177 (-613) en avril. Les absences pour maladie ne sont pas comptées. Pour le Collège, le manque de candidats ne peut expliquer l’ampleur de la pénurie de personnel. « Il revient au ministre et à son administration de suivre la rotation de personnel (…) et d’organiser à temps les sélections nécessaires (…). De telles mesures n’ayant pas été prises, les réserves de recrutement de certaines régions et pour certaines fonctions sont épuisées ».

Les magistrats admettent que le ministre a réussi à obtenir une dérogation au rythme des économies imposées par le gouvernement. Cependant, ceci n’a permis que d’engager des membres à durée déterminée. Les contrats étaient conclus d’août à décembre 2015. « Cette aide a été la bienvenue, mais elle n’a apporté aucune solution structurelle », disent-ils. En février, le monde judiciaire a reçu l’autorisation d’engager 100 collaborateurs sous contrat à durée déterminée mais cela n’a pas encore été publié dans les places vacantes, déplore le Collège. Celui-ci réagit enfin aux propos du ministre de la Justice sur la comparaison des montants par habitants alloués par les pays européens à la Justice.

Le Collège admet que, dans son rapport 2014, la Cepej (Commission européenne pour l’efficacité de la Justice) mentionnait que la Belgique se situait au-dessus de la moyenne des 45 pays étudiés. Cependant, il précise que le montant alloué en Belgique est bien inférieur à ceux d’autres pays comme les Pays-Bas ou l’Allemagne. Il ajoute que le montant dépensé par habitant doit être considéré par rapport à la prospérité du pays. « En procédant de la sorte, les efforts consentis par la Belgique se situent précisément dans la médiane, au même titre que l’Albanie ou la Géorgie ». Le Collège conclut en indiquant avoir remis au ministre une proposition visant à garantir « une administration de la Justice de qualité ».

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