Walter Pauli

« Les attaques de Wouter Beke obligent la N-VA à soutenir le gouvernement »

Walter Pauli Walter Pauli est journaliste au Knack.

« En focalisant ses attaques sur le ministre des Finances sur la N-VA, le président du CD&V Wouter Beke veut faire porter le chapeau de ce qui ne tourne pas rond au plus grand parti de la majorité » écrit notre confrère de Knack Walter Pauli. Or, « c’est une position que De Wever essaie d’éviter à tout prix depuis les élections. »

Même aux normes de la politique belge, le discours de Wouter Beke dans les quotidiens De Morgen et De Tijd à propos du ministre des Finances Johan Van Overtveldt (N-VA) était inhabituellement dur. Le président du CD&V estime même que ce qui se passe aux Finances est un échec personnel du ministre : « Son palmarès n’est pas très bon. »

Beke trouve qu’aucune proposition de Van Overtveldt n’a été efficace et utile et que sa suggestion de baisser l’impôt sur les sociétés de 32,5 à 20 % est totalement loufoque. À court terme, cette mesure creuserait un trou de 3,5 milliards d’euros dans les finances publiques. Les défenseurs de la baisse prétendent que la compétitivité de nos entreprises et donc l’emploi augmenteraient spectaculairement, ce qui entraînerait aussi une forte hausse des revenus de l’État. Mais Beke n’est pas convaincu: « Lorsque Van Overtveldt était encore rédacteur en chef de Trends, il menait une croisade contre les effets d’amortissement. À présent, il dit que ces 3,5 milliards d’euros seront amortis. J’attends plus de sérieux de la part d’un ministre des Finances », conclut Beke.

Sérieux et fiabilité: c’étaient les deux qualités mises en avant par Bart De Wever chaque fois qu’il attirait un non-politique dans les rangs de la N-VA. Le ténor de la VOKA Philippe Muyters était le premier de cette série, pour l’instant, le journaliste de la VRT Jan Becaus est le dernier de la liste. La venue de Johan Van Overtveldt a aussi marqué les esprits. Van Overtveldt était économiste, (ancien) rédacteur en chef de Trends et de Knack, publiciste, académicien à temps partiel, ancien chef d’entreprise et ancien directeur de la fédération des employeurs VKW. Il est devenu tête de liste européenne aux élections de 2014 et s’est vu offrir un poste de ministre lors de la formation du gouvernement fédéral qui a suivi.

Van Overtveldt a plus de 60 ans. C’est l’âge où les ministres ne s’inquiètent plus de leur future carrière et  » y vont à fond ». C’était également ce que De Wever lui a demandé lors de son entrée à l’Hôtel des Finances: être lui-même. Et c’est ce qu’il fait en étant perpétuellement contre trop de charges supplémentaires pour les entreprises et les investisseurs.

Ces mesures ont nui à la popularité du ministre des Finances auprès du centre gauche. Cependant, van Overtveldt permet à la N-VA de gagner du crédit auprès de son nouveau public : les professions libérales, les épargnants, les managers, les entrepreneurs et les investisseurs. Généralement, ces riches Flamands qui ont de l’argent et du capital ne sont traditionnellement pas des flamingants. La plupart d’entre eux étaient de fidèles électeurs du CD&V ou de l’Open VLD. Mais depuis quelques années, ils préfèrent la N-VA. Ce sont eux qui ont conduit la N-VA à 30% et à sa position historique de plus grand parti du pays. Battre le tambour flamand, comme l’a fait la N-VA pour plaire aux Flamands purs et durs impatients, n’est pas une priorité pour eux. Ce qui les inquiète davantage, c’est qu’on reproche à la N-VA de pas tenir les cordons de la bourse. Surtout que c’est précisément cela qu’ils attendaient de Bart De Wever : qu’il fasse bien attention à leurs sous.

Wouter Beke y voit une belle opportunité. D’où son intérêt à persuader le Flamand que le déficit budgétaire n’est pas l’affaire des partis de la majorité ou du premier ministre Charles Michel, mais du ministre Johan Van Overtveldt. En focalisant sur le ministre des Finances et la N-VA, Wouter Beke place la responsabilité politique de ce qui ne va pas auprès du plus grand parti de la majorité. C’est une position que De Wever essaie d’éviter à tout prix depuis les élections. C’est la raison pour laquelle il n’a jamais exigé le poste de premier ministre pour lui-même et qu’il ne voulait pas qu’un autre membre de la N-VA devienne premier ministre. Il a laissé ce poste à Kris Peeters (CD&V) et quand, cela ne s’est pas fait, à Charles Michel (MR).

Les attaques comme celle de Beke obligent la N-VA à soutenir le gouvernement, à affronter l’opinion publique et à se battre.

Les attaques comme celle de Beke obligent la N-VA à soutenir le gouvernement, à affronter l’opinion publique et à se battre. Wouter Beke est politologue de formation et connaît jusqu’au bout des doigts l’histoire politique. Le président du CD&V est en train de pousser la N-VA dans la position qu’occupait un jour le CVP.

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