Un lot d'armes illégales saisies en 2012. © BELGA/Nicolas Maeterlinck

Les armes illégales, pas une priorité pour la police

La police belge consacre beaucoup trop peu d’attention au commerce illégal d’armes, laisse entendre lundi l’Institut flamand pour la Paix (Vlaams Vredesinstituut). Cet organisme a mené une étude sur la possession d’armes dans notre pays, dont il ressort notamment que nombre d’entre elles sont importées de l’ancien bloc de l’Est mais également que beaucoup d’armes sont volées en Belgique-même.

Après l’attentat déjoué de vendredi, la Belgique, et surtout Bruxelles, fait à nouveau office sur la scène internationale de plaque tournante du commerce illégal d’armes. D’après le Vredesinstituut, cette problématique ne fait actuellement pas partie des priorités de la police. « Les armes sont d’une importance secondaire dans les enquêtes policières », selon le chercheur Nils Duquet. « Les enquêteurs se concentrent principalement sur l’auteur et ses motivations. »

D’après lui, la police doit, de façon urgente, se constituer une image représentative des armes utilisées lors de crimes dans notre pays. « Il n’y a, pour le moment, aucun chiffre fiable disponible. L’enregistrement des saisies ne se déroule pas de façon optimale et les résultats disponibles ne sont pas analysés. Ce n’est que lorsque l’on disposera d’une bonne image que l’on pourra développer une approche à cette problématique. »

Le Vredesinstituut souligne cependant que la Belgique dispose d’une bonne loi sur les armes mais que les services de renseignement manquent de moyens pour lutter contre les réseaux et qu’il y a trop peu de collaboration internationale.

Le plupart des armes qui sont actuellement introduites illégalement en Belgique proviennent de l’ancien bloc soviétique. Un grand nombre d’armes restées dans nos contrées après la guerre est tombé dans les mains de criminels, qui les revendent à un prix dérisoire.

D’après la police, outre les bandes criminelles organisées originaire d’Albanie, des bandes de motards criminelles et des individus issus du milieu des portiers sont également concernés par ces transactions illégales. L’entièreté du trafic n’est pas le fait de ces seules organisations criminelles. Des particuliers se rendent ainsi eux-mêmes dans des pays où le régime est plus souple quant à l’acquisition d’armes à feu. Il y a également des personnes qui achètent des armes sur Internet à l’étranger.

Le vol d’armes à feu permet également d’approvisionner le marché des armes illégales. De très nombreuses sont ainsi volées en Belgique. Selon des statistiques de la police fédérale, quelque 1.600 à 2.100 vols d’armes ou d’explosifs sont en effet recensés chaque année.

Le ministre de la Justice avance 4 points d’action pour lutter contre le trafic d’armes

Le ministre de la Justice Koen Geens (CD&V) a avancé lundi quatre points d’action afin de lutter contre le trafic d’armes en Belgique, après l’attentat déjoué vendredi dans un train Thalys. Il demande notamment une meilleure collaboration au sein de l’Union européenne, mais aussi la remise sur pieds du comité de coordination interdépartemental de lutte contre les transferts d’armes illégaux. Après l’attentat déjoué de vendredi, la Belgique est pointée comme plaque tournante du commerce illégal d’armes sur la scène internationale.

Koen Geens souligne d’abord la nécessité d’une meilleure collaboration européenne. « Je ne crois pas que ces armes soient d’origine belge. Il s’agit plutôt d’un problème externe à la zone Schengen », explique le ministre de la Justice. Il demande ainsi un contrôle plus efficace des armes en dehors de la zone Schengen et une uniformisation de la législation sur la démilitarisation d’armement militaire, face au risque de voir ces armes disparaître dans des trafics, surtout en Europe de l’Est. Le ministre propose également un meilleur échange d’informations qui touchent au trafic d’armes via Europol.

Le ministre de la Justice demandera également le 3 septembre prochain l’évaluation de la circulaire confidentielle des Procureurs généraux du 22 octobre 2012, qui avait été introduite à la suite de la fusillade de la Place Saint-Lambert à Liège. Cette circulaire définit les principes de base les plus importants de l’approche répressive du trafic d’armes par le parquet et les services de police, précise sa porte-parole. « Je veux savoir si on n’en est pas resté aux bonnes intentions », explique Koen Geens.

Le ministre de la Justice souhaite ensuite réactiver le comité de coordination interdépartemental de lutte contre les transferts d’armes illégaux, dont la création remonte à 1999. Le comité veille à l’amélioration de la coordination et de l’échange d’information en matière de lutte contre le trafic d’armes illégales. « Depuis 2003, ce comité n’a plus été mentionné. Un texte est en préparation pour le remettre en place », selon Geens. Le texte élaboré par l’administration judiciaire devra être consulté par toutes les parties impliquées et sera, en outre, transmis à la police fédérale pour avis. Le précédent gouvernement a planché sur la création du nouveau comité avant les élections de 2014, tenant compte de la réforme du parquet fédéral, mais le projet n’avait finalement pas abouti.

Le CD&V devrait introduire une proposition de loi permettant la mise en oeuvre d’écoutes téléphoniques et de méthodes particulières de recherche en matière d’enquêtes relatives au trafic d’armes à feu. « Actuellement, ces méthodes peuvent être appliquées pour les affaires de terrorisme mais pas en rapport avec le trafic d’armes », conclut le ministre.

L’efficacité des mesures dépendra de leur « exécution fidèle », estime Koen Geens. « J’ai foi en l’efficacité au niveau européen. Nous ne sommes néanmoins pas maître du jeu à ce niveau. J’espère que nous ne devrons pas faire face à d’autres actes terroristes avant que des outils ne soient mis en place pour les contrer. »

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