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Les affaires discrètes du prince Lorenz

Olivier Rogeau
Olivier Rogeau Journaliste au Vif

La princesse Astrid a-t-elle « les moyens » de se passer d’une dotation ? Les revenus de son mari semblent indiquer que oui. Reste à savoir si ce serait une bonne idée de l’en priver.

Fabiola, ou la moderne Pandore. En créant une fondation privée pour soutenir ses neveux dans le besoin, avant de faire marche arrière, la veuve du roi Baudouin a relancé le sempiternel débat sur les dotations royales. A commencer par la sienne, mais aussi, peut-être, celles de Laurent et Astrid . Au point que cette dernière a éprouvé le besoin d’en parler à un journaliste de VTM. Si le gouvernement ou le Parlement veut changer les règles du jeu, elle s’y pliera, aurait dit la princesse en substance. De quoi faire réagir le prince Laurent : « Si ma soeur peut se le permettre, je suis ravi pour elle, a répliqué le cadet d’Astrid à une journaliste de Sud Presse. Vous savez, moi, je ne suis pas de ces personnes qui jalousent ceux qui ont les moyens. »

Et tous les regards de se tourner vers le mari d’Astrid, supposé fort riche. A l’heure actuelle, outre ses revenus générés par ses fonctions d’associé-gérant de la banque privée suisse E. Gutzwiller & Cie (depuis 1990), Lorenz exerce au moins trois activités rémunérées :

chez Suez Environnement, société cotée en bourse, les publications officielles 2011 indiquent que Lorenz a touché cette année-là 50 750 euros bruts en jetons de présence. En comptant 25 % de retenue à la source, comme c’est le cas en France, cela lui laisse environ 38 000 euros nets par an. les fonctions de Lorenz au sein de BNP Paribas sont beaucoup moins limpides. Nous avons sollicité à ce propos le service communication de la banque française, en vain. Selon un spécialiste belge du monde financier, qui souhaite s’exprimer en « off », il semble toutefois peu probable que ses revenus excèdent 30 000 ou 40 000 euros par an. « C’est ce que gagne un bon apporteur d’affaires mais à condition d’amener effectivement des affaires. Dans tous les cas, je doute que sa rémunération dépasse celle d’un administrateur. » Or ce dernier montant est connu : au minimum 29 750 euros en 2011. À peu près 30 000 euros, c’est le bénéfice de la SPRL Société d’Etudes économiques, que le prince gère depuis le 30 novembre 2006. Très précisément : 37 496 euros de bénéfice avant impôt en 2011 et 26 292 euros après impôts, selon ses comptes publiés à la Banque nationale.

Résumons : en comptant quelque 30 000 euros chez BNP Paribas et 50 750 euros chez Suez Environnement, les rémunérations annexes du prince pourraient donc avoisiner les 6 700 euros bruts par mois. Et près de 13 000 euros entre 2001 et 2009, à l’époque d’UCB. Tout cela sans même compter sans son activité principale en Suisse.

Combien peut gagner l’associé-gérant d’une banque privée helvétique ? Mystère. Ces sociétés de personnes n’ont pas d’actionnaires et ne sont tenues de publier leurs comptes que si elles font appel à l’épargne publique. Ce qui n’est pas le genre de la discrète maison E. Gutzwiller & cie : pour faire partie de ses clients, le ticket d’entrée s’élève à 250 000 francs suisses (environ 203 000 euros).

Depuis 1994, la banque compte quatre associés. Dans « Question(s) Royale(s) », Frédéric Deborsu se hasarde à évaluer leurs revenus : au moins 2,5 millions d’euros, voire 4 millions « les bonnes années » ! Pour aboutir à ces montants faramineux, il se fie aux estimations d’un expert suisse resté anonyme. Notre spécialiste belge déjà cité, lui, est pour le moins sceptique : « 2,5 millions, c’est énorme en Europe, surtout pour une petite banque de rien du tout (NDLR : une soixantaine de salariés). Cela voudrait dire que les quatre associés se partagent au minimum 10 millions d’euros par an ! Un patron du Bel 20 en gagne de 500 000 à 600 000, malgré toutes les responsabilités qui sont les siennes. »
Impossible donc d’estimer la rémunération que s’accorde le prince Lorenz. En tout cas, rien ne permet d’affirmer que l’ensemble de ses revenus dépasse forcément ceux de sa femme : 320 000 euros de dotation annuelle, cela représente tout de même 26 666 euros nets par mois. Ce n’est sans doute pas pour rien que, malgré ses occupations professionnelles, Lorenz participe activement aux activités de la famille royale. On en comptait 28 en 2012 et 30 en 2011. C’est moitié moins qu’Astrid (63), mais presque autant que le prince Laurent (35) ou la princesse Claire (30).

Astrid pourrait-elle vivre sans sa dotation ? Sans doute. On l’a vu, les revenus de son mari semblent à tout le moins confortables. Le couple et sa dernière fille à domicile, la princesse Laetitia Maria, bénéficient d’un logement au domaine de Stuyvenberg, à proximité du château où vit la reine Fabiola. Une superbe « gentilhommière » baptisée « villa Schöneberg », que la Donation royale a construite pour eux et mise à leur disposition gracieusement en 2002. Leur patrimoine immobilier connu semble se limiter à un terrain en Italie et à un chalet suisse à Bluche – qui pourrait valoir au moins deux ou trois millions d’euros, selon un promoteur du Valais que nous avons interrogé. Quant à leur train de vie, il n’a jamais défrayé la chronique.

Le dossier intégral (« Le business de Lorenz, Astrid mérite-t-elle sa dotation ?, Laurent est-il un prince dans le besoin ?) dans Le Vif/L’Express de cette semaine

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