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Le procureur requiert la perpétuité à l’encontre de Mehdi Nemmouche

Le Vif

Mehdi Nemmouche, déclaré jeudi dernier coupable d’un quadruple assassinat à caractère terroriste au Musée juif de Belgique le 24 mai 2014, ne mérite aucune circonstance atténuante, selon l’avocat général Yves Moreau.

Ce dernier a donc requis la réclusion criminelle à perpétuité à l’encontre de l’auteur matériel des faits, lundi, devant la cour d’assises de Bruxelles.

L’avocat général a demandé aux jurés de prendre en compte la « froideur » de Mehdi Nemmouche au moment des faits, le risque de récidive, sa dangerosité et sa « lâcheté » lors du procès.

« Oui, Monsieur Mehdi Nemmouche, vous êtes un lâche », a asséné Yves Moreau en se tournant vers l’auteur des faits. « Vous tuez des gens en tirant par derrière, sans prendre aucun risque, pour votre plaisir. Vous n’être même pas capable d’assumer vos actes. »

Si le jury considère, comme l’accusation, que Mehdi Nemmouche ne mérite pas de circonstance atténuante, il n’aura « pas le choix » et devra prononcer la réclusion criminelle à perpétuité, a tranché l’avocat général.

« On a atteint le plus grave, on a touché l’extrême de l’extrême. Il y a une réelle nécessité de protéger notre société. L’accusé a tué froidement et gratuitement quatre êtres humains, quatre innocents, dans un contexte terroriste », a-t-il répété à deux reprises. « Tout est déjà dit. Le droit à la vie est absolu. Mehdi Nemmouche a égoïstement retiré ce droit aux quatre victimes. Sa faute est tellement énorme qu’il n’y a aucun mot pour la qualifier, c’est indescriptible en termes de gravité. Personne ne comprendrait que vous accordiez une circonstance atténuante, ce serait indécent. »

Pour l’accusation, Mehdi Nemmouche « savait qu’il ferait d’autres victimes: les filles Riva, la mère d’Alexandre Strens et la fille de Dominique Sabrier sont aussi victimes de sa folie meurtrière ». « Elles ont été condamnées à perpétuité, sans espoir de libération anticipée. »

Yves Moreau a encore invité les jurés à tenir compte de la « froideur » de l’auteur au moment des faits, dans les heures qui ont suivi, lors de son arrestation, lors de sa garde à vue ou encore à ce procès. Ce qui témoigne à suffisance « d’une absence de remords ». « C’est de la provocation et c’est terrifiant. »

L’avocat français de Nacer Bendrer extrêmement amer face au jury

Me Blot, le conseil français de Nacer Bendrer, a poursuivi lundi après-midi les plaidoiries sur la peine, devant la cour d’assises de Bruxelles. L’avocat s’est montré extrêmement amer quant au verdict rendu par le jury, qui a déclaré son client coupable comme co-auteur de la tuerie au Musée juif de Belgique.

« Je ne me laisserai pas aller à vous confier mon amertume, je vais le défendre jusqu’au bout », a dit Me Blot, qui a eu beaucoup difficulté à masquer son dépit quant à la motivation du verdict de culpabilité à l’encontre de son client.

« Cette qualification (de co-auteur), je ne sais pas ce que ça veut dire, je ne sais pas si c’est annonciateur d’une sauvagerie répressive qui piétinerait le principe de personnalisation des peines et qui va s’abattre sur lui dans quelques heures », a déploré le conseil de Nacer Bender. « Peut-être avez vous laissé trop de place à l’opinion publique, à celle qu’on qualifie parfois de ‘prostituée qui tire le juge par la manche' », s’est interrogé l’avocat au sujet des jurés. « Je ne peux pas me résoudre à penser que vous croyez que c’est un terroriste, un antisémite. »

« Je ne vais pas refaire l’Histoire, mais je trouve que vous êtes allés très loin », leur a-t-il dit. « On a décidé de ne pas le croire parce qu’il a menti, du coup on peut aller très très loin. Je ne me résous pas à accepter ce déchaînement répressif qui vous est proposé et auquel (l’accusation) vous demande de souscrire. »

Selon la motivation de l’arrêt de culpabilité, l’élément intentionnel n’est pas nécessaire, a relevé l’avocat. « Il n’avait pas la volonté personnelle de s’en prendre à qui que ce soit », a martelé Me Blot. « Renoncer à savoir est punissable, mais c’est quand même très différent. »

Pour son conseil, « il n’est pas nécessaire de sacrifier Nacer Bendrer sur l’autel d’une politique sécuritaire ». « Il est là, il existe, ce n’est pas un dossier. La justice doit rester libre et indépendante! »

Me Blot a aussi rappelé que les règles d’exécution des peines n’étaient pas les mêmes en France et en Belgique. « Vous l’avez déjà affublé d’une étiquette de terroriste, ce boulet il l’a au pied et il va le traîner. La peine que vous déciderez va s’appliquer en tant que telle. En Belgique, un condamné peut bénéficier en théorie d’une libération conditionnelle à un tiers de la peine, mais ce n’est pas le cas en France. Une fois condamné à plus de 10 ans, il faut faire au moins la moitié avant de pouvoir discuter. Dans ce genre d’infraction, vous imaginez bien que le parcours d’exécution est très long et très surveillé. C’est beaucoup plus sévère qu’en Belgique, surtout dans le climat actuel », a-t-il précisé aux jurés.

Pour le conseil de Nacer Bendrer, l’accusation a été trop loin en mettant à charge du Marseillais des éléments qui pourraient plutôt être considérés comme positifs, comme le fait qu’il ait une famille et une compagne qui le soutiennent, par opposition à Mehdi Nemmouche qui a été renié par les siens. « On vous aura vraiment pris pour ce que vous n’êtes pas jusqu’au bout », a-t-il déploré auprès du jury.

« Est-ce qu’il a commis des attentats, est-ce qu’il a mis Bruxelles à feu et à sang pendant ses six mois encore en liberté alors que son co-auteur avait été arrêté? Cela montre bien qu’il ne va pas passer à l’acte quand il se retrouvera en liberté. Tout a été analysé, il n’y a rien de djihadiste et on vous demande 30 ans parce qu’il a été négligent? », a interrogé le pénaliste français, qui a rappelé que son client avait été libéré par la justice belge durant l’enquête.

A ce moment-là, Nacer Bendrer est rentré chez lui et a même travaillé, a souligné Me Blot. « Est-ce le comportement d’un individu dangereux? », a-t-il questionné.

« Que la peine ait une fonction punitive et de protection de la société, je suis d’accord. Mais une fonction exemplative non. Selon le principe de personnalisation, la peine doit être adaptée à chaque personne. On le punit pour ce qu’il a fait et ce qu’il est, mais ça s’arrête là! »

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