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Le décret « armes » revu en urgence

Le gouvernement wallon réuni en cabinet restreint s’est accordé jeudi sur un projet de décret qui réforme la procédure d’octroi des licences d’exportation d’armes. La note d’orientation qui contenait les grandes lignes de la réforme avait été approuvée en avril 2010 mais avait été contestée par les entreprises et syndicats du secteur de l’armement.

Le projet reprend le principe de gradation dans le traitement des demandes de licences. Plus la demande est sensible, plus elle est entourée de garanties. A l’inverse, plus le destinataire entretient des relations habituelles avec la Wallonie, plus la procédure est souple et rapide. Une attention particulière a été portée sur les pays ou régions dont la situation politique se révèle instable puisque la procédure pourra être suspendue à tout moment, y compris l’examen de la demande, pendant une durée déterminée éventuellement prolongeable. La procédure d’autorisation préalable à la signature d’un contrat, prévue pour certaines licences plus sensibles, est maintenue. Elle avait suscité l’hostilité des entreprises et du monde syndical qui craignaient l’affaiblissement de la position concurrentielle des entreprises wallonnes.

L’entreprise ne devra toutefois pas solliciter systématiquement cette autorisation puisqu’elle sera valable pendant trois ans. Par ailleurs, la période au cours de laquelle une licence doit être exécutée a été étendue: elle passera de 12 mois à 18 mois. Une procédure raccourcie, dite de « Fast Track », sera comme prévu d’application pour les pays membres de l’OTAN, l’OCDE ou de l’Espace économique européen, comme prévu dans la note d’orientation. Une précision est toutefois apportée pour les pays de l’OCDE: ils devront être entrés dans l’Organisation avant le 7 septembre 2010. Israël sera donc exclu du bénéfice de cette procédure et restera sous le coup de la procédure d’autorisation préalable.

Jusqu’à présent, une procédure unique régissait cette matière sujette à de nombreuses polémiques. La dernière controverse en date est née en juin 2009 après l’octroi d’une licence à la FN Herstal pour exporter des armes vers la Libye et la suspension de cette licence par le Conseil d’Etat pour cause d’affaires courantes. Le gouvernement a décidé de revoir la façon dont les demandes étaient traitées. Un accord est intervenu en avril 2010 sur une note d’orientation. Sa mise en oeuvre a connu à son tour des atermoiements jusqu’à l’insurrection qui a éclaté il y a quelques jours en Libye. Le cdH et Ecolo ont enfoncé le clou pour accélérer la concrétisation de la réforme tandis que le PS devait composer entre Rudy Demotte, compétent pour octroyer des licences, et Jean-Claude Marcourt, plus sensible aux milieux économiques et syndicaux liégeois. Mercredi, la conclusion d’un accord sur un projet de décret semblait peu probable avant la semaine prochaine, quand M. Demotte répondra aux députés wallons sur le sujet. Jeudi, l’écueil a finalement été surmonté.

Pour André Antoine, la responsabilité devrait être européenne

Le ministre wallon de l’Emploi, André Antoine (cdH), a déploré vendredi matin l’absence d’un cadre européen en matière d’exportations d’armes, qui permettrait d’assurer une concurrence équitable entre les entreprises. « Je regrette qu’on n’ait pas un cadre européen », a-t-il dit au micro de Matin Première (RTBF), tout en soulignant que plusieurs pays de l’UE réfléchissaient, à l’instar de la Wallonie, à un durcissement de leur législation à la lumière des événements en Libye.

Les ventes d’armes, « ce n’est pas une responsabilité régionale, ni même fédérale – rappelez-vous le dossier du Népal -, mais une responsabilité européenne », selon lui. M. Antoine n’a pas manqué de rappeler que la répression orchestrée par le colonel Kadhafi s’exerçait aussi avec « des hélicoptères, des tanks et des roquettes » vendus par d’autres pays européens. « Avec le recul, nous ne pouvons que regretter (l’octroi d’une licence à la FN Herstal pour l’exportation d’armes vers la Libye), mais à l’époque, la situation était totalement différente », a-t-il encore indiqué, en référence à l’image plus favorable dont a brièvement bénéficié la Libye au début des années 2000.

Antoine a rejeté les vives critiques lancées par le syndicats à l’encontre du cdH, Joëlle Milquet, qui a réclamé jeudi une réforme urgente des règles wallonnes sur les armes. « Je ne peux accepter l’accusation d’intégriste. Nous sommes des humanistes, nous faisons des choix et nous les assumons », a-t-il dit. « L’emploi, ce n’est pas que les armes », a-t-il renchéri, rappelant les bonnes économiques wallonnes sur le plan de l’emploi.

LeVif.be, avec Belga

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