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Le contenu de l’accord sur la loi de financement

Un accord est intervenu samedi vers 7 heures à la présidence de la Chambre, après une réunion qui aura durée près de vingt heures, sur une révision de la loi spéciale de financement (LSF) des entités du pays. Après BHV, il s’agit du deuxième grand accord partiel engrangé par le formateur Elio Di Rupo.

L’autonomie fiscale porte sur 10,736 milliards d’euros, soit près d’un tiers de l’impôt sur les personnes physiques. L’accord veille à ne pas appauvrir les entités fédérées, grâce au maintien du mécanisme de solidarité et notamment à l’encadrement de la progressivité de l’impôt (on évoque des « marges limitées »).
La soutenabilité de l’Etat fédéral est assurée, notamment par la perception de cotisations des Régions et Communautés sur la pension de leurs fonctionnaires. Un refinancement de Bruxelles est prévu, soit 134 millions d’euros dès 2012 puis 461 millions d’euros à l’horizon 2015, montant qui continuera à croître par la suite.

L’augmentation de l’autonomie fiscale, revendication néerlandophone, est compensée par un mécanisme de solidarité avec les entités francophones, moins riches. Ce mécanisme corrige pendant les dix premières années quelque 80% de la différence entre le nord et le sud. Il faiblira progressivement pour finir par disparaître dans dix ans. Aucun montant n’a encore été définitivement arrêté même si certaines sources indiquaient samedi que le mécanisme porterait sur environ 500 millions d’euros par an.

En ce qui concerne le financement des Communautés, tout en ne touchant pas à l’âge des élèves pris en compte (6 à 18 ans), le facteur population l’emporterait progressivement sur l’indice IPP, ce qui devrait assurer un meilleur financement de la Communauté française, dont la population est moins riche mais plus jeune que celle de la Flandre. Ce financement accru en fonction des besoins portera sur environ 800 millions d’euros.

Divers mécanismes de responsabilisation (l’entité réalisant des efforts est récompensée) ont été avalisés. Ce sera le cas en matière d’emploi, en vertu de la clé IPP. Cette clé favorise les entités les plus prospères, mais l’équilibre global de l’accord (notamment la clé population pour le financement des Communautés) permet des compensations.

Un mécanisme de responsabilisation a également été retenu en matière de climat, une revendication chère aux écologistes. « La loi spéciale contiendra un mécanisme qui encouragera les Régions à agir davantage pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et mieux isoler l’ensemble des bâtiments sur leur territoire, en récompensant chaque année par un bonus les Régions qui dépasseront leurs objectifs, et en sanctionnant par un malus les Régions moins actives en la matière. Les dynamiques en cours à Bruxelles et en Wallonie avec les Alliances Emploi Environnement positionnent idéalement nos Régions par rapport à ces défis », ont souligné les co-présidents d’Ecolo, Jean-Michel Javaux et Sarah Turine.

Scission des allocations familiales

L’accord prévoit d’ores et déjà le transfert de certaines compétences dont la défédéralisation des allocations familiales, soit 5 milliards d’euros. La matière sera communautarisée. A Bruxelles, la Commission communautaire commune (COCOM) hérite de la matière. Côté francophone, on souligne que la Région-Capitale est ainsi confortée dans son statut. Ce sera partout « un enfant égale un enfant », indiquait-on samedi.

A total, autonomie fiscale et transferts de compétences (allocations familiales, dispositions en matière de santé, emploi) pèseront quelque 17 milliards d’euros.

Un principe de « loyauté fédérale » sera inscrit dans la Constitution en préambule des lois spéciales à venir. Ce principe est censé garantir la non concurrence fiscale entre entités du pays. La Cour constitutionnelle veillera au respect de ce principe.

Le nouveau mécanisme d’autonomie fiscale sera également inscrit dans les lois spéciales mais aussi dans la Constitution. Celle-ci autorisera aux Régions le prélèvement d' »un impôt sur l’impôt fédéral ». En restant dans un cadre fédéral, on évacue de la sorte le recours au « split rate », plutôt d’inspiration confédérale, indiquait-t-on samedi dans les rangs francophones.

Au MR, on se réjouissait samedi de ce que l’accord n’avait pas encore arrêté des montants définitifs. Ils ne le seront que dans les prochains jours, après la discussion sur l’assainissement financier à l’horizon 2015 et donc les négociations sur les réformes socio-économiques et de structure, a indiqué Charles Michel. Ce point a également été mis en avant au nord du pays.

« Pour les francophones et le cdH, c’est mission accomplie », a commenté samedi Joëlle Milquet. « Nous avions plusieurs balises, elles y sont toutes. C’est important car il s’agissait d’un des dossiers les plus compliqués et les plus dangereux. Le niveau de vie des Wallons et des Bruxellois sera préservé et le niveau de la Sécurité sociale maintenu », s’est-elle réjouie.

Joie et soulagement

« C’est une grande joie et un soulagement. Les francophones et les néerlandophones de ce pays ont réussi ensemble à redessiner tout le financement de la nouvelle Belgique fédérale », s’est félicitée Laurette Onkelinx (PS). « Et ce qui est particulièrement important c’est qu’enfin il y a un refinancement pour Bruxelles », a-t-elle fait observer, précisant également que les Wallons allaient pouvoir poursuivre leur redéploiement et que l’avenir de la Sécurité sociale était préservé.

Le président du MR Charles Michel a vu dans l’accord intervenu samedi « un pas de géant dans la bonne direction » qui permettra d’assurer « la prospérité des entités francophones », la Wallonie, Bruxelles et la Communauté française, tout en conservant un Etat fédéral fort capable d’assumer ses missions en matière de Sécurité sociale et de pensions notamment. Charles Michel se réjouit particulièrement de l’adoption d’un principe de « loyauté fédérale », élément également mis en exergue par Joëlle Milquet.
Ecolo s’est réjoui dans un communiqué d’avoir pu obtenir un « un accord équilibré qui permettra à chacun de construire l’avenir avec de justes moyens ». Jean-Michel Javaux a insisté sur le fait que cet accord « encadre l’autonomie fiscale » et « préserve les moyens d’action du fédéral ». Il garantit par ailleurs le financement de la Communauté française, permet le refinancement de Bruxelles, tout en consolidant les moyens devant permettre à la Région wallonne de confirmer son redéploiement.

« Sans toucher aux mécanismes ni aux modalités, la loi spéciale de financement sera finalisée à l’issue de la discussion sur l’assainissement des finances publiques devant ramener la Belgique à l’équilibre budgétaire en 2015. Les différentes variables de la LSF seront alors définitivement fixées », a indiqué samedi dans un communiqué le formateur Elio Di Rupo au nom des huit partis associés à la table des négociations. Celles-ci se poursuivront lundi à 14h sur les transferts de compétences aux entités fédérées, « afin d’aboutir au plus vite à un accord sur l’ensemble des questions institutionnelles », a ajouté le formateur.

Il s’agira ensuite d’aborder le volet socio-économique et de constituer une coalition près de 500 jours après les élections législatives du 13 juin 2010. A cet égard, on connaît les griefs manifestés par l’Open Vld et le CD&V en faveur d’une équipe resserrée, donc sans les Verts. « La famille écologiste continuera à se montrer particulièrement active et créative pour franchir (les obstacles restants) et aboutir à la mise en place d’un gouvernement fédéral de plein exercice », a souligné samedi Jean-Michel Javaux.

Le Vif.be, avec Belga

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