Denis Grimberghs. © Laurie Dieffembacq/ Belgaimages pour Le Vif/L'Express

« Le communautarisme n’a pas toujours été du même côté »

Homme de l’ombre de la démocratie chrétienne, l’ancien député Denis Grimberghs, échevin des Finances à Schaerbeek, a été le mentor de Mahinur Özdemir. Il tire les leçons de l’éviction de la jeune Belgo-Turque.

Le Vif/L’Express : Joëlle Milquet vous impute la responsabilité du recrutement de Mahinur Özdemir. Vrai ?

Denis Grimberghs : Mahinur s’est affiliée au CDH dans le cadre de la transformation du PSC en CDH, à une époque où de nombreux jeunes de moins de 30 ans, y compris belgo-belges, se sont intéressés à la chose publique et ont adhéré à notre parti. A Schaerbeek, Clotilde Nyssens et moi-même avons piloté ce renouvellement. Aux élections communales de 2006, bien que n’étant pas la mieux placée, Mahinur a créé la surprise en étant élue. La question de son couvre-chef ne s’est jamais posée car elle reflétait assez naturellement la diversité du public de Schaerbeek et elle avait fait ses études à l’ULB. Je n’ai pas perçu de rejet à son égard. Elle s’est intégrée comme n’importe quel « petit jeune » qui adhère à un parti, avec une certaine ambition. En 2009, elle a exprimé sa volonté de participer aux élections régionales. Pour ma part, alors que j’étais chef de groupe sortant au Parlement bruxellois, j’ai fait le choix de ne pas me présenter.

Etiez-vous conscient des difficultés qu’allait poser son voile ?

En 2006, au moment de la campagne, j’ai indiqué qu’il me semblait impossible qu’une fonction exécutive soit confiée à un élu qui marquerait ses convictions religieuses par une tenue vestimentaire manifestement en lien avec ses convictions personnelles. Cela vaut pour tous les cultes, évidemment. Une seconde recommandation, également en 2006, s’adressait à tous les candidats de Schaerbeek : je leur demandais de ne pas se positionner sur des enjeux communautaires relevant de la politique internationale. Un candidat d’origine marocaine avait posé avec un drapeau palestinien, ce qui n’était pas très intelligent, et, pourtant, chacun sait la sympathie que j’ai pour cette cause.

La décision du comité de déontologie du CDH de lui retirer le label du parti vous a-t-elle surpris et vous semble-t-elle justifiée au regard des statuts ?

Je fais confiance aux instances nationales de mon parti et, manifestement, le cas de Mahinur dépassait le contexte d’un débat au sein de la section locale. L’engagement pris dans le cadre du nouveau code de déontologie de reconnaître tous les génocides reconnus internationalement était-il suffisamment clair ? Les conditions d’une exclusion étaient-elles remplies ? Je n’ai pas à me prononcer mais, localement, l’exclusion de Mahinur est perçue comme un véritable gâchis. L’amertume des militants est d’autant plus grande que nous sommes convaincus que le CDH doit poursuivre sa politique d’ouverture.

Comment voyez-vous l’avenir des candidats d’origine étrangère en politique ?

L’idéal serait que chaque élu s’occupe de tout le monde, indépendamment de son origine. Longtemps, cela n’a pas été le cas. Lorsque Roger Nols dirigeait la commune de Schaerbeek, il ne s’occupait que des quartiers belgo-belges. Le communautarisme n’a pas toujours été du même côté.

L’intégralité de l’entretien dans Le Vif/L’Express de cette semaine. Avec :

– Mahinur Özdemir a-t-elle vraiment donné l’exemple ?

– N’aurait-il pas fallu déminer le terrain avant le centenaire du génocide arménien ?

– Le CDH a-t-il perdu les voix turques ?

– Le CDH de Joëlle Milquet a-t-il exagéré la pêche aux voix d’origine étrangère ?

– Y a-t-il, derrière l’affaire Özdemir, une forme de rejet de l’islam ?

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