31 mars 1958: la reine Elisabeth est reçue comme une véritable souveraine à Moscou. © belga image

Le 23 mars 1955, la reine Elisabeth quitte Varsovie en attendant Moscou

Au coeur des années 1950, la vieille reine fantasme sur le communisme. Lorsqu’elle projette d’aller de l’autre côté du Mur, elle met le gouvernement dans l’embarras.

Rouge toujours! Dès les années 1920, la reine Elisabeth se passionne pour l’URSS naissante. Seulement contrariée par le sort réservé à la famille des Romanov, elle voit dans l’oeuvre de Lénine l’espoir d’un monde plus juste. Sa fibre sociale est titillée. Et c’est tout naturellement qu’elle se met à apprendre le russe. Se rendre à Moscou? Elle en rêve. Mais après 1947 et l’émergence de la guerre froide, pareille idée devient osée. La vieille dame, pourtant, n’en démord pas. Elle va procéder par étapes. Et par le biais de la musique…

Le 18 novembre 1954, le cabinet de la reine reçoit un courrier un peu particulier. Les autorités polonaises invitent Elisabeth à se rendre à Varsovie pour y participer au cinquième concours Chopin. Grande admiratrice du virtuose, la souveraine bondit de joie! Mais ce n’est pas le cas de tout le monde. Même à gauche, la nouvelle ne fait pas l’unanimité. Paul-Henri Spaak, le ministre socialiste des Affaires étrangères, indique qu’il « apprécierait ce voyage sans réserve s’il ne s’agissait pas de la reine ». Par écrit, puis oralement, il tente de dissuader la grand-mère du roi Baudouin. « La reine Elisabeth jouit de la sympathie unanime du peuple et il y aurait intérêt à ce que cette unanimité ne subisse aucune atteinte », lui dit-il explicitement. Mais la reine n’a cure des doutes des politiques, et le gouvernement se voit contraint de couvrir l’initiative.

Le représentant diplomatique de la Belgique à Varsovie salue cette u0022messagère de fraternitéu0022.

Le 12 mars, elle s’envole de l’autre côté du rideau de fer. Chopin est au coeur du voyage. En plus d’assister au concours, Elisabeth visite plusieurs lieux ayant marqué la vie du compositeur. Mais elle donne aussi une couleur politique à son séjour. En se rendant à Auschwitz. En vantant les réalisations culturelles et sociales polonaises. En demandant au régime l’une ou l’autre faveur d’ordre humanitaire. Le voyage se passe sans accroc. Le 23 mars, la reine quitte la capitale. Parmi d’autres, elle a séduit le représentant diplomatique de la Belgique à Varsovie, qui salue cette « messagère de fraternité, oublieuse d’elle-même, de son âge et de ses fatigues ». Le comte de Meeûs d’Argenteuil ajoute: « La visite de la reine est de nature à apporter sa contribution au rapprochement de deux idéologies qui comprennent, tous les jours davantage, qu’elles n’ont d’autre choix que de coexister pour survivre. »

Varsovie servira de tremplin pour Moscou. En 1958, la première édition du Concours international Tchaïkovski est le prétexte idéal. En URSS, l’épouse de feu le roi Albert Ier est reçue comme une véritable souveraine. Pour Moscou, la visite de cette reine occidentale a valeur de reconnaissance ; pour Elisabeth, 82 ans, c’est une sorte de renaissance. Mais à Bruxelles, elle commence à devenir gênante. Pour qu’elle ne devienne pas un problème, on chuchote de plus en plus fort qu’elle en a un…

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