Renaud Duquesne

L’organisation de l’élection du ou de la Président(e) du MR : Le côté obscur de la Force?

Renaud Duquesne Avocat à Marche-en-Famenne

L’élection d’un Président(e) de Parti en Belgique est un moment très important dans la perspective du bon fonctionnement démocratique de nos institutions. Le pouvoir qui est le sien est des plus importants. Il dirige son Parti, imprime la marche à suivre, mène campagne, définit les éventuelles coalitions et nomme les ministres. Il fait bien sûr beaucoup d’autres choses.

Son pouvoir est immense, bien plus que l’on ne peut l’imaginer. D’aucuns appellent cela, la Particratie. Le pouvoir politique décisionnel est donc concentré dans les mains d’un Parti et souvent d’un seul homme ou femme, qui en est le Président.

L’élection du ou de la futur(e) Président(e) du MR devrait donc incliner, tout un chacun, tous les bons démocrates de quelque bords que ce soit, à se poser la question de savoir comment le processus électoral est organisé par les instances du Mouvement Réformateur.

Car finalement cette élection, nous concerne tous, en ce qu’elle va mettre à la table politique, une personne qui doit être légitime et bien élue. En somme, qui est le choix des militants et de personne d’autre.

Le propos développé dans cette carte blanche n’est évidemment dirigé contre personne. Il se veut interrogatif et permettant de comprendre au mieux l’organisation de la campagne présidentielle interne au MR.

En effet la transparence totale doit être de mise. A défaut de la pratiquer, c’est la porte ouverte à toutes les interprétations et supputations.

En effet, l’observateur attentif de cette élection aura relevé qu’il est répété à l’envi que l’appareil du Parti soutient un candidat. Il est donc primordial que l’élection organisée par la structure du Parti soit organisée avec la plus grande impartialité, sous peine d’être sujette à caution.

A bien y regarder, on en sait peu de chose. Il n’existe manifestement pas, de texte détaillé, arrêté et concerté, avec l’ensemble des candidats, pour définir le déroulé de la campagne et des votes garantissant sa totale transparence et impartialité.

Il doit toutefois, sûrement exister, en interne un document complet et détaillé qui explique comment les choses vont se passer. On aurait du mal à imaginer le contraire.

A ce jour toutefois, il n’a nullement été remis, aux candidats et donc a fortiori pas aux militants. Aucune publicité ne lui a été donnée et on ne sait pas par qui il a été rédigé. C’est dommage.

Mais peut-être pas surprenant quand on voit que les statuts du MR datent « d’une époque que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaitre« .

Il faut donc recouper les informations glanées ici et là, et qui ne sont pas à prendre pour « argent comptant« . L’exercice est imposé par ce clair-obscur qui pèse sur le processus électoral.

Commençons donc par le début. Qui peut voter ?

Difficile à dire, car il a été décidé de refuser de permettre aux candidats de disposer du listing des membres. C’est évidemment très surprenant, alors que pour les élections fédérales et régionales les têtes de liste disposent d’un registre des électeurs.

Il est donc difficile, et ici, il s’agit d’un exercice de style que tout démocrate doit s’imposer, de vérifier, si l’ensemble des militants autorisés à participer par le vote à l’élection le peuvent. Plus simplement dis, de vérifier quand ils ont pris leur carte de membre, s’ils sont en règle de cotisation et d’où vient l’affiliation.

En droit et dans le code électoral, cela s’appelle vérifier si les conditions sont respectées par les votants pour pouvoir valablement voter. Souvent, pour éviter les problèmes et les inscriptions qui poseraient questions, on ne prend pas en compte les personnes affiliées dans un délai trop proche. (6 mois)

Les candidats ne savent donc pas qui peut voter pour eux, et donc encore moins prendre contact avec eux. Par la parole ou par des écrits. Comment dès lors mener campagne dans de bonnes conditions. C’est interpellant, car le MR est le chantre de la démocratie directe et participative. Les candidats s’adressent à des électeurs invisibles, en tout cas pour eux.

Si on devait résumer la situation : « je ne sais pas qui vous êtes, mais faites-moi quand même confiance ». On aura surement l’occasion d’en parler après les élections.

Mais pour pallier à cela, les candidats ont été invités à rédiger un papier A4, un seul, pour développer leurs programmes et idées. Le Parti s’occupera de la distribution aux militants dont on ne sait rien.

Est-il possible et sérieux, pour une élection aussi importante, avec autant de candidats, de faire tenir le programme de chacun sur une feuille A4 ? On pourrait oser : « Que poser la question est y répondre ».On est d’autant plus surpris, quand on voit les moyens financiers utilisés par le MR pour mener campagne en d’autres occasions.

Certaines mauvaises langues parlent du tract de campagne en l’appelant « le confetti de campagne ». Alors que tant de choses doivent être abordées. On ne peut pas faire campagne sur « sa bonne bouille et avec quelques formules réductrices et creuses« .

Mais attention, chacun à la possibilité de consulter le programme des candidats, c’est ainsi qu’on appelle « Le confetti » sur le site du MR.

Et puis, le parti organise sous la houlette des seniors et des jeunes MR, un débat avec les candidats le 23 octobre 2019 à NAMUR-EXPO. L’honneur est sauf. Surtout les apparences ?.

L’envoi des bulletins de vote se fera par envoi postal du 21 au 23 octobre 2019. En conséquence, il sera possible et même certain, que des militants recevront leur bulletin de vote qui valide leur droit de voter, après la date prévue pour le débat.

Il n’est donc pas impossible, d’imaginer que des militants attendent d’abord de savoir s’ils sont des électeurs certifiés conformes, avant se rendre au débat. Pour certains, ils le sauront après le débat et pour les autres, il faut espérer que leur agenda n’est pas trop chargé et qu’ils aient le temps de se libérer.

Qui viendra à ce débat finalement ou plutôt qui pourra venir ?

Singularité au MR, il sera possible de voter, alors que la campagne des candidats n’est pas terminée. En effet, les militants vont recevoir un bulletin de vote qu’ils doivent retourner au siège du Parti et quand ils le souhaitent, avec la restriction évidente que ce soit avant le dépouillement. On le dit sans rire.

La règle ne vaut-elle pas que l’on dissocie le temps de la campagne électorale du temps du vote ? Comme on fait partout ailleurs. Même dans les contrées les plus éloignées.

Quid si par impossible un candidat se retire ? Ou que des évènements de campagne ou autres se produisent. Tant pis pour ceux qui ont déjà voté.

Un conseil, pour ceux qui ont le droit de vote : « Prenez le temps de vous faire une opinion, mais pas trop « . Les mauvais esprits diront : « Le temps d’un confetti ».

Pour le vote en lui-même, chaque électeur va recevoir un bulletin de vote, non nominatif, muni d’un code-barre (qui parait-il garantit le secret du vote) qu’il devra retourner par la poste, au siège du Parti pour ainsi exprimer son choix ou pas.

Manifestement très rares sont ceux qui connaissent les tenants et les aboutissants techniques du procédé mis en place pour le comptage et le dépouillement.

C’est au siège du Parti et de l’appareil que les bulletins seront envoyés et donc réceptionnés. On ne sait pas par qui. Et où ils seront stockés et gardés de toutes éventuelles influences extérieures.

Comment seront-ils comptabilisés, comment sera garanti le secret du vote … ? Un processus fiable doit surement avoir été mis en place. Les explications sur la sécurité du vote, quasi électronique, mis en place n’étant pas portées à la connaissance du grand public, ne devraient-elles pas simplement être divulguées pour éviter tout malentendu.

En effet il est important que la garantie absolue soit apportée de l’absence certaine d’interférence extérieure possible sur les votes émis.

Quant au deuxième tour éventuel, on ne connait rien de son organisation, si ce n’est que le dépouillement aura lieu le 12 novembre 2019. A chacun de combler les trous.

Une élection, c’est le moment le plus important dans une démocratie. Elle ne peut souffrir la suspicion. Elle se doit d’être transparente. Un complément d’information sur l’organisation de l’élection du ou de la Président(e) n’apparait pas inutile. Les lignes peuvent encore bouger, si besoin en est, pour améliorer les choses.

En procédant de la sorte, le MR se rendra service, mais aussi fera la preuve que le respect de la démocratie est une réalité avec laquelle il ne transige pas.

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