Des experts conseillent le gouvernement. © Belga

L’organigramme de « l’intelligence collective » qui gère la crise du coronavirus

Olivier Mouton
Olivier Mouton Journaliste

Nous ne sommes pas loin d’un « gouvernement d’experts » autour de la Première ministre, Sophie Wilmès. Le Vif/L’Express et Knack illustrent la mécanique actuelle du pouvoir.

C’était au début de l’année 2020, c’était en apparence il y a un siècle. La Belgique était dans une impasse politique complète consécutive aux élections de mai 2019. La N-VA et le PS ne parvenaient pas à s’entendre, le pays était « gouverné » en affaires courantes depuis plus d’un an. Des voix s’élevaient, en vain, pour appeler à ce que les partis prennent leurs responsabilités, mais aussi pour que l’on repense la manière de faire de la politique, via davantage de démocratie participative ou une gestion appuyée par des experts. En réalité, nous avons atterri dans cette phase-là, sans vraiment le vouloir, en raison d’une urgence sanitaire.

La N-VA et le PS n’ont pas su s’entendre, mais nécessité faisant loi, neuf partis soutiennent aujourd’hui le gouvernement Wilmès II de l’extérieur – la N-VA ayant même ajouté une dixième voix aux pouvoirs spéciaux dont il est doté. Pour encadrer ce processus et gérer une situation inédite, la Première ministre Sophie Wilmès (MR) fait appel à un grand nombre d’organes composé d’experts, virologues et épidémiologistes, mais aussi d’économistes pour préparer la reprise. En présentant son groupe pour le déconfinement, lundi soir, celle-ci a d’ailleurs évoqué l’importance de cette « intelligence collective ».

Un gouvernement d’experts? Pas complètement. Le politique garde la main. Le Conseil national de sécurité, organe créé par Charles Michel pour gérer à l’époque la gestion de la menance terroriste, réalise les principaux arbitrages politiques en présence du gouvernement fédéral et des ministres-présidents desx entités fédérées. Mais une partie importante du pouvoir d’influence a été délégué aux experts – et pour cause, vu le caractère inédit de la crise.

L’organigramme ci-dessous, dévoilé à la demande de Knack et du Vif/L’Express, donne une vision plus large du processus de décision en cette nouvelle ère. Les textes qui en décrivent les contours sont issus du cabinet de la Première ministre, en guise de transparence.

L'organigramme des organes de décision dans la crise du coronavirus.
L’organigramme des organes de décision dans la crise du coronavirus.© DR

Des organes stratégiques et politiques

  • Le « Conseil National de Sécurité » (CNS) : prend les décisions politiques pour la gestion de cette crise.

Composition : présidé par le Premier Ministre et comprend en outre les Ministres ayant dans leurs attributions la Justice, la Défense nationale, l’Intérieur et les Affaires étrangères, et les Vice-Premiers Ministres qui n’ont pas ces matières dans leurs compétences. Les Membres du Gouvernement qui ne font pas partie du Conseil peuvent être invités par le Premier Ministre à y participer pour l’examen des dossiers qui les concernent particulièrement (Dans ce cas – ci, la Ministre de la Santé publique et le Ministre de la Mobilité).Pour le dossier du COVID-19, les Ministres-Présidents des Régions et des Communautés sont invités.

Le Directeur général du Centre de crise, le Président du SPF Santé publique et le Président du RMG sont invitées aux réunions du CNS. Ce dernier fait rapport concernant les évolutions de la situation et explicite les recommandations de CELEVAL.

  • Le « Comité fédéral de coordination » (COFECO) : prépare et coordonne au niveau stratégique l’implémentation des décisions politiques du CNS.

Composition : présidé par le DG du Centre national de crise. Coprésidé par le directeur de cabinet de la Ministre de la Santé publique pour le volet santé. Pour le reste, sa composition est la suivante : Président du RMG et de représentants de la Première Ministre, des Ministres fédéraux de l’Intérieur, de la Justice, des Finances, Affaires étrangères, Santé publique, Budget, Mobilité, Défense, Emploi et Travail, ainsi que des Ministres-Présidents des Régions et des Communautés. Y sont également représentées : les SPF Santé publique, Mobilité, Economie et la Défense, ainsi que les Centres de crise régionaux et la Police fédérale.

Chaque Cabinet fait rapport à son Ministre des éléments importants évoqués à l’occasion des réunions du COFECO.

Des concertations entre acteurs de la santé publique

  • Le Risk Assessment Group (RAG) analyse le risque pour la population en se fondant sur des données épidémiologiques et scientifiques. Composition : Présidé par Sciensano et composé d’experts de Sciensano et des autorités de santé.
  • Le Risk Management Group (RMG) s’appuie sur l’avis du RAG pour prendre des mesures de protection de la santé publique. Composition : Présidé par le SPF Santé publique, il se compose de représentants des autorités fédérales et fédérées de santé.
  • Le Comité scientifique Coronavirus (CSCovid) aide les autorités de santé à combattre le coronavirus. Le comité prononce un avis scientifique sur l’évolution du virus et contribue à la préparation optimale de notre pays à l’arrivée du nouveau virus respiratoire.

Ces trois organes de concertation transmettent leurs avis à une « Cellule d’évaluation » (CELEVAL). Cette dernière remet un avis de santé publique pour conseiller les autorités dans la prise de décisions pour lutter contre la pandémie.

Composition : Présidée par le SPF Santé publique et composée de représentants de Sciensano, du Comité scientifique sur le COVID19, du Conseil Supérieur de la Santé, des administrations en charge de la santé au sein des Régions et des Communautés ainsi que des SPF Intérieur et Mobilité.

Des cellules spécifiques

  • La « Cellule opérationnelle » favorise, via sa permanence 24/7, le flux d’information entre les autorités, veille à l’opérationnalité des infrastructures de crise et assure l’alerte si nécessaire des cellules de crise.
  • La « Cellule socio-économique » (Cel Ecosoc) fait des analyses et remet des avis sur l’impact socio-économique des mesures prises ou à prendre. + de collecter des informations notamment destinées à ERMG.
  • Les « Cellules juridiques » (Cels juridiques) veillent à la rédaction des textes légaux et apportent des réponses aux multiples questions juridiques qui se posent dans le cadre de cette gestion complexe de crise.
  • La « Cellule internationale » (Cel intl) facilite le flux d’information entre les autorités homologues de crise au niveau européen.
  • La Task Force Police intégrée (TF GPI) est notamment chargée de clarifier le cadre légal dans lequel la police peut intervenir et exécuter les tâches qui lui sont demandées.
  • La « Cellule d’information » (CelInfo) est co-présidée par le SPF Santé publique et le Centre de Crise. Elle veille à la coordination de l’ensemble des autorités pour une cohérence des stratégies et actions de communication de crise. Elle donne un avis stratégique aux autorités compétentes en se basant son action sur les perceptions en besoins en information de la population.

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